Y a-t-il un quelconque lien entre un avion IL-20 avec près de 20 des meilleurs officiers de renseignement russes à bord qu’un F-16 israélien a fait abattre en 2018 par S-200 syrien interposé, en s’en servant comme d’un bouclier et ce, dans le strict objectif de bousiller les réseaux de renseignement satellitaire russes au-dessus de la Syrie et partant rendre la tâche plus facile à ses bombardiers d’une part, et ces missiles de croisière air-sol qui viennent de frapper le territoire syrien ce 7 décembre ?
Bien sûr que oui, si on se rappelle que dans l’un comme dans l’autre cas, c’est Lattaquié, soit la côte-ouest syrienne, réputée être le front anti-OTAN de la Russie en Méditerranée, puisqu’abritant deux de ses principales bases extraterritoriales, Hmeimim et Tartous, qui a été ciblée et que les missiles air-sol israéliens qui en ont été responsables, bien qu’interceptés et détruits en majorité par des batteries de « Pantsir S », sont parvenus, tout de même, pour deux d’entre eux à percer le puissant bouclier anti-missile russe et à s’abattre respectivement à 25 et 85 km de « Hmeimim » et de « Tartous ».
En 2018, cette culottée tentative israélienne de faire liquider les généraux russes au-dessus de Lattaquié, zone qui tout raison garder pourrait être la première à être assaillie, si jamais l’idée venait aux Otaniens de tenter une opération de débarquement comme celle qu’ils ont tentée, sans succès, en été et en pleine Crimée, a valu à Tel-Aviv l’apparition-choc dans l’arsenal syrien des batteries de missiles S-300 qui pour n’avoir jamais été activée depuis, continuent néanmoins à inspirer les pires craintes au camps d’en face.
Or ce 7 décembre, le camp d’en face, US/Israël, a franchi non pas un seul mais une centaine de pas en une fois, en frappant sous prétexte d’avoir à y anéantir les cargaisons maritimes de missiles iraniens, le parc de conteneurs de Lattaquié, là où arrivent des dizaines voire des centaines de cargos, de pétroliers de navire pour y décharger pétrole, denrées alimentaires et autres produits de bases non seulement en provenance de l’Iran mais aussi depuis les ports russes.
Après tout, les Sionistes russophones sont peut-être bien chers à Moscou mais pas autant que l’avenir énergétique de la grande fédération de la Russie en Méditerranée. Les accords d’Abraham littéralement ratatinés par l’axe de la Résistance dans le golfe Persique, les Émirats voire l’Arabie étant de plus en plus enclins à renouer avec l’Iran, il est grand temps que les effets s’en fassent aussi ressentir en Méditerranée orientale où Israël nourrissait il y a peu couper le transit du gaz russe vers l’Europe. Ces quelques mots particulièrement acerbes du MAE syrien, Fayçal Meqdad à Téhéran où il a affirmé qu’une réponse « par avion » ne tarderait pas à être donnée aux raids aériens d’Israël, ne devraient guère pris à la légère, l’armée russe ayant commencé dès le 17 novembre à apprendre aux pilotes syriens comment se battre contre les F-16 israéliens une fois au volant des MiG-29… Et ces MiG-29 décolleront de Lattaquié à destination de Haïfa.
Pierre Dortiguier, analyste politique et Philippe Hugon, reporter de guerre, s'expriment sur le sujet.