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L'armée saoudienne « infiltrée » par la Résistance

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Les arrestations, ordonnées par la commission anti-corruption dirigée par le prince héritier seraient une manière d’étouffer les contestations internes. (Archives)

Pour supprimer les militaires qui dérangent, Mohammed ben Salmane dit MBS s’est soustrait à l’embarras du choix : peine de mort ou détention. De ce fait, il se libère de la responsabilité de l’échec dans la guerre au Yémen et s’assure de son héritage du royaume saoudien.

Sept années de guerre lamentable et d’usure qui n’a eu pour effet qu’une catastrophe humanitaire incomparable dans l’histoire des guerres, et les dirigeants saoudiens cherchent à se tirer avec un minimum de frais d’un bourbier qu’ils ont eux mêmes créé.

La réalité d’aujourd’hui est très éloignée de ce que Riyad avait envisagé en 2015. Le royaume pensait pouvoir dominer sur le Yémen en seulement quelques semaines d’une campagne aérienne. Sept ans sont passés et la perspective d’une sortie de crise n’est toujours pas envisageable.

Suppression suspecte des militaires saoudiens

Le ministère saoudien de la Défense a récemment annoncé qu’il avait ordonné l’exécution de trois responsables militaires pour haute trahison. Un communiqué du ministère indique que trois militaires nommés Muhammad ben Ahmad ben Yahya Akam, Shaher ben Issa ben Qassem Haqwi et Hammoud ben Ibrahim ben Ali Hazemi avaient commis le crime de haute trahison. L’enquête révélait qu’ils avaient collaboré avec l’ennemi contre les intérêts militaires de l’Arabie saoudite.

Par la suite, le parti saoudien Umma islamique a estimé dans une déclaration que leur exécution sur le front de Jizan faisait partie de la politique d’intimidation du régime pour contrecarrer les désertions devenues fréquentes au sein de l’armée depuis que les avantages sociaux des soldats ont été coupés. En effet, la situation des forces saoudiennes engagées au Yémen est inquiétante, leurs salaires sont bas, voire impayés. La crainte de la peine de mort les fait rester sur le champ de bataille. Des officiers de l’armée ont même fait l’objet d’une purge pour chantage ou corruption financière.

En mars 2020, 298 hauts responsables militaires saoudiens ont été arrêtés pour des chefs d’accusation similaires, notamment de corruption et de blanchiment d’argent, dont 29 responsables du ministère saoudien de l’Intérieur dans la province d’al-Sharqiya. Parmi eux trois colonels, un général de division et un général de brigade.

En septembre 2020, le roi saoudien Salmane ben Abdelaziz a publié un décret révoquant Fahd ben Turki, commandant en chef des forces de la coalition saoudienne au Yémen, pour corruption. Par ailleurs, son fils a été évincé de l’émirat d’al-Jawf pour la même raison. Les ordres ont été émis directement par MBS.

Pour les experts, les actions du régime saoudien à l’encontre des responsables militaires peuvent être examinées à deux niveaux : primo, l’armée saoudienne, le gouvernement ainsi que la famille royale sont visés par une purge dite « anti-corruption » instigué par MBS en 2017. Les arrestations, ordonnées par la commission anticorruption dirigée par ce denier, seraient une manière d’étouffer les contestations internes avant tout transfert formel du pouvoir par son père, le roi Salmane.

Secundo, l’Arabie saoudite est dans l’impasse au Yémen. Au cours des sept dernières années, les éléments de l’armée n’ont pas été en mesure de fonctionner de manière satisfaisante. En dépit des dépenses faramineuses entreprises par Riyad, le résultat escompté n’a pas été atteint. La suppression de certains responsables militaires, dont Fahd ben Turki, n’a pas non plus eu d’effet second dans la guerre contre Ansarallah.

Avec leurs défaites consécutives, les soldats saoudiens n’ont plus la tête à guerroyer, d’autant plus que leurs salaires ont été réduits ou ne sont payés à temps. En conséquence, les analystes estiment que les lourdes peines (détention et exécution) sont un avertissement pour empêcher les désertions.

À cet égard, Abdul Wahed al-Harbi, l’un des officiers évincés, a déclaré dans un entretien avec Al-Akhbar que le moral de l’armée est en berne depuis le quatrième mois de l’offensive contre le Yémen. Concernant les affrontements internes, il a déclaré que « la désobéissance aux ordres à l’intérieur de l’armée a pris de l’ampleur et des soldats (au moins 62) ont disparu dans la région frontalière sud de l’Arabie saoudite.

D’autres comportements témoignent de la détresse qui règne à l’intérieur de l’armée. Selon les rapports des commandements, certains soldats mettent le feu à leurs véhicules militaires ou leurs postes pour être ciblés par la partie yéménite.

Bref, à travers la suppression de hauts responsables militaires, MBS cherche en quelque sorte à les faire passer pour responsable de l'échec dans la guerre du Yémen. Et puisque de hauts responsables saoudiens sont souvent évincés sous prétexte d'une lutte contre la corruption, Ben Salmane pourra aussi en profiter pour redorer son blason auprès de l'opinion publique et confier les postes vacants à ses proches.  

 

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SOURCE: FRENCH PRESS TV