Il y a trois jours le journal israélien, Jpost, faisait part d'une proposition « israélienne » faite à Poutine pour débloquer la « situation en Syrie » : « Puisque ni la Russie ni les États-Unis ne voudraient pas d'une confrontation militaire directe, et que la Russie a plutôt l'air de se conformer à la présence US et turque sur le sol syrien comme celle d'Israël dans le ciel du Levant, autant diviser la Syrie en plusieurs morceaux : « La solution pourrait consister à diviser le pays en un État alaouite dans l'Ouest à céder à l'Etat syrien, un État sunnite à l'Est, comme le Kosovo a été séparé de la Serbie dans des circonstances similaires ».
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Mais pourquoi les Israéliens feraient-ils preuve d'autant de générosité à l'égard de la Russie qui s'est engagée depuis 2015 aux côtés de l'État syrien, pour que ce dernier ne soit justement pas démembré? La suite de l'article de Jpost apporte la réponse : « De cette manière, la Russie aurait à se désengager du sud de la Syrie, à le laisser avec toutes ses provinces stratégiques que sont Deraa et Quneitra, le Golan non occupé. Le mécanisme servirait la cause d'occupation israélienne qui est obsédée par la présence du Hezbollah dans les rangs de l'armée syrienne, son côtoiement avec les Russes. De cette manière, tout attaque depuis le Golan contre Israël, qui pourrait provenir bien plus tôt que le croit Israël, la partie israélienne ayant l'intention de prendre le contrôle des hauteurs du Golan, ne pourrait se faire « sous protection russe » et aurait davantage de chance de déclencher une réponse américaine.
Cette proposition qui a l'air d'un net recul en arrière, quand l'entité sioniste croyait toujours que le Père Noël US est capable de changer la donne en Syrie, de l'anéantir pour qu'il y ait un méga-hiatus sur la route stratégique d'acheminement des armes depuis l'Iran vers le Hezbollah, aurait été rejetée d'emblée par la Russie, celle ci ne reconnaissant évidemment pas l'occupation israélienne du Golan. N'empêche que c'est là l'aveu le plus cuisant d'une défaite militaire, politique et diplomatique totale d'Israël qui le force à avouer la stérilité de sa campagne de « guerre dans la guerre » contre la présence de la Résistance en Syrie, un autre aveu étant celui sur la nature des liens qui existent entre la Russie et le Hezbollah. l'article de Jpost fait suite en effet à une première visite d'une délégation de haut rang du Hezbollah à Moscou, visite marquée par des rencontres entre le député Raad d'une part et messieurs Lavrov et Riyabkov de l'autre. De cette visite on ne savait pas grand chose si ce n'est les pourparlers de part et d'autre sur la Syrie, et le Liban, et la région. Le journal El-Nashra vient de nous en apprendre plus dans un article qui devrait bien inquiéter les Israéliens. En effet, la Russie demanderait à ce que le Hezbollah reste en Syrie puisque son départ reviendrait à créer un vide « que ni les Russes ni les Syriens ne sauraient remplir, les Américains et les Turcs guettant l'occasion pour s'en emparer ».
La Russie voit-elle à travers le Hezbollah une puissance régionale dont les dimensions va au-delà des frontières libanaises? Cela ne pourrait en être autrement : « le Hezbollah est déployé sur 131 points stratégiques en Syrie, comparativement à 95 pour la Russie, auxquels il faut ajouter l’aéroport militaire de Hmeimim et les bases navales militaires de Tartous (sous le contrôle de la Russie). Par conséquent, une coordination et une relation stratégique entre le Hezbollah et la Russie sont devenues inévitables. Pour Moscou, le Hezbollah revêt un statut régional sinon les États-Unis ne l'auraient jamais accusé de s'être immiscé dans les élections US. »
Et l'article de poursuivre : « Au cours des dernières années, de nombreux rapports et informations ont été publiés dans les médias hostiles au gouvernement syrien et à ses alliés qui parlent des mesures que la Russie aurait entreprises pour "expulser" le Hezbollah et l'Iran de Syrie, ou du moins limiter leur présence. Pur mensonge ! Au cours de la visite de la délégation du Hezbollah à Moscou, les Russes ont ouvertement clarifié leur position concernant la présence du Hezbollah en Syrie.
À Moscou, la performance militaire du Hezbollah est très appréciée : le professionnalisme, la discipline et la capacité de ses combattants à atteindre leurs objectifs de combat avec une stratégie et une tactique précise et jamais loupée. Dans le même temps, Moscou admire le “pragmatisme” du Hezbollah qui semble avoir grandement contribué à la protection de l'État syrien : des implantations internes avec des groupes armés dans de nombreuses régions, notamment dans le sud, et des accords majeurs avec la Turquie. Dans les deux cas, le Hezbollah s'est montré résolu à tout ce qui pouvait être fait pour que ces règlements et accords aboutissent et ce, sans aucune considération partisane. »
« Les militaires et les politiciens russes ont la ferme conviction que la présence du Hezbollah en Syrie est plus que jamais nécessaire. Tout vide laissé par ce mouvement ou par l'Iran dans n'importe quelle province syrienne sera comblée aussitôt par les Américains, et ni par les Russes ou les Syriens. De ce point de vue, les responsables russes ont tenu à délivrer un message clair aux dirigeants du Hezbollah : la Russie fera tout pour que le Hezbollah reste en Syrie, en politique comme dans l'armée.
La Russie compte sur une coopération future avec le mouvement dans les deux domaines. L'appel à la coopération est si large que les Russes semblent ne plus considérer le Hezbollah comme une organisation exclusivement libanaise, mais plutôt comme un parti présent dans de nombreux pays de la région, et puissamment. Lors des réunions avec des responsables russes, en particulier le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, son adjoint Mikhail Bogdanov et des responsables de la Chambre des représentants, ainsi ont été abordés la situation au Yémen, en Irak, en Syrie, en Palestine et dans d'autres pays de la région. Israël est passé en revue et les deux parties ont souligné la nécessité de renforcer les moyens de communication entre leurs forces, et d'adopter des voies de communication directes entre le Hezbollah et Moscou, tout en étudiant la possibilité de créer même un bureau de représentation permanente de ce mouvement dans la capitale russe. C'est grave pour un Israël qui a fait des milliers de frappes aériennes pour expulser le Hezbollah et qui en est arrivé au point où la Russie se dit prête à livrer des armements antiaériens à la Résistance libanaise. »
Et de conclure : « La visite, qui a eu lieu suite à l’invitation russe, constitue un message de Moscou à l’adresse de Washington qui ne cesse de harceler le Liban pour obtenir le désarmement du Hezbollah. L'arsenal du Hezbollah est reconnu par la Russie, une grande puissance militaire et à ceci il y a un sens. Car toute coopération militaire au sol aura son pendant aérien et rien ne dit qu'un jour les Russes ne se mettraient pas à entraîner les pilotes du Hezbollah ! Les Russes ont d’ores et déjà dit à tous les pays occidentaux, arabes et régionaux, mais aussi aux puissances avec lesquelles ils communiquent au sujet du Liban, que “le Hezbollah est une force majeure, ce dernier représentant un acteur clé pour parvenir à tout règlement”. »