L'Irak choisit une entreprise chinoise pour un accord de paiement anticipé de 2 milliards de dollars. La nouvelle tombe alors que ces derniers temps, des événements suspicieux, explosions d’installations pétrolières ou découvertes de mine attachée au pétrolier, semblaient suivre un seul et unique objectif : barrer la route à la présence chinoise dans le secteur de l’énergie en Irak.
L'Irak a confirmé qu’il avait choisi une entreprise chinoise pour un accord d’approvisionnement en pétrole de plusieurs milliards de dollars. Le pays arabe était en quête de fonds afin de soutenir une économie sous le choc de l’effondrement des prix de l’énergie déclenché par le coronavirus.
L’agence étatique chargée de la commercialisation du pétrole irakien, SOMO, qui supervise les exportations de pétrole du pays, a choisi une société chinoise après avoir reçu des offres de plusieurs commerçants, a rapporté l’agence de presse officielle irakienne (INA) citant une interview avec le chef de la SOMO, Alaa Al-Yasiri.
Bien que l’INA n’ait pas annoncé le nom de la société chinoise en question, ni précisé si le Premier ministre Mustafa al-Kazemi avait signé l’accord, Bloomberg a rapporté le mois dernier que ZhenHua Oil Co., une filiale du plus grand entrepreneur de défense appartenant à l’État chinois, était le gagnant.
« Il y avait une concurrence intense entre les deux sociétés européennes et chinoises, et la société chinoise a fini par gagner », a déclaré Al-Yasiri, cité par l’INA.
Peu connue à l’extérieur de la Chine, la compagnie Zhanghua a pourtant un rôle important dans les activités de production et de commerce du pétrole, dans le cadre d’une politique à travers laquelle Pékin cherche à s’imposer en tant qu’un acteur majeur à l’échelle internationale sur le plan énergétique. Fondée en 2003, ZhenHua est présente dans le secteur pétrolier des Emirats arabes unis, du Kazakhstan et du Myanmar, à quoi s’ajoute un rôle actif dans la commercialisation du pétrole en provenance de Koweït, de Brésil et de la République démocratique du Congo.
C’est la première fois que Bagdad se montre intéressé par un accord de remboursement anticipé, dans lequel le pétrole est effectivement utilisé comme garantie d’un prêt. Il s’agit effectivement du dernier modèle de prêt accordé par la Chine à des producteurs de pétrole en difficulté, via des sociétés commerciales et des banques contrôlées par l’État, ajoute Bloomberg.
La SOMO a proposé de fournir environ 130 000 barils de brut par jour pendant cinq ans, selon une lettre envoyée aux commerçants en novembre. Elle a demandé en échange un paiement initial pour un an d’approvisionnement, ce qui, aux prix actuels, rapporterait plus de 2 milliards de dollars, selon les calculs de Bloomberg. Le gagnant aura la possibilité de choisir quand expédier le brut pendant un an, a déclaré Al-Yasiri. Ce mécanisme a été approuvé par le cabinet, a-t-il ajouté.
Alors que tous les grands exportateurs de pétrole ont été touchés par la chute des prix depuis mars, l'Irak est dans l’une des positions les plus faibles, rappelle Bloomberg. Selon les chiffres fournis par le Fonds monétaire international (FMI) concernant l’Irak, le plus grand producteur de l’OPEP après l’Arabie saoudite, l’économie irakienne a connu une contraction de 11% l’année dernière. Le gouvernement a réduit de près de 20% le taux de change du dinar par rapport au dollar américain en décembre - la première dévaluation depuis l’invasion américaine en 2003 - alors que ses réserves de change se réduisaient.
Les problèmes auxquels sont aux prises l’Irak a rendu difficile, pour le gouvernement irakien, la tâche de se procurer des fonds de manière plus conventionnelle sur le marché Obligataire [un marché financier où les entreprises peuvent emprunter des liquidités par création de titres de dette connue sous le terme obligation]. Le rendement du dollar du pays est en moyenne de 8,2%, l’un des niveaux les plus élevés parmi les pays du monde.
L’accord d’approvisionnement en pétrole [conclu entre Bagdad et Pékin] a suscité un intérêt général parmi les principaux négociants, selon des personnes proches du dossier. Le contrat sera l’un des plus importants du genre dans l’histoire récente et il permet au gagnant d’expédier du brut là où il le souhaite pendant un an. Normalement, le brut du Moyen-Orient est vendu avec des clauses strictes empêchant les négociants et les raffineurs de revendre les barils dans différentes régions, précise Bloomberg.
« L'Irak a obtenu 2 milliards de dollars sans intérêt avec une prime sur le prix », a affirmé Al-Yasiri. « La flexibilité que l'Irak a accordée aux entreprises est la liberté de déterminer le jour de chargement des envois, la destination de l’exportation, la possibilité de revente », a également ajouté le responsable irakien.