Peter Zeihan, stratège géopolitique, spécialiste dans l’énergie mondiale, la démographie et la sécurité, traite dans son nouvel ouvrage « Nations désunies : la ruée vers le pouvoir dans un monde non gouverné » de la décomposition de l’ordre mondial avec la désunion des grandes puissances.
Si nous faisons fi des théories du complot entourant le coronavirus parmi lesquelles figure l’origine anthropique de la pandémie – qui suppose que le virus ne serait qu’une arme biologique mise au point en laboratoire –, les faits montrent que Donald Trump a tiré parti du vent de panique causé par la propagation du virus dans le monde.
Le nouveau coronavirus a fait plus de 5 000 morts et le nombre de cas a dépassé les 110 000 dans le monde depuis son apparition en décembre. Les scientifiques des pays les plus touchés par l’épidémie, dont la Chine, ont réalisé des recherches en laboratoire.
Et si les États-Unis avaient vraiment conçu une arme biologique ? Quels seraient leurs objectifs ? En auraient-ils atteint quelques-uns ? Auraient-ils omis le fait que le virus peut aussi contaminer la nation américaine et créer une crise économique ?
Les avantages de la récession économique en Chine
Dès les premiers jours de la découverte du coronavirus en Chine, le secrétaire américain au Commerce, Wilbur Ross, a su y trouver un côté « positif ». Invité sur la chaîne Fox Business ce jeudi 30 janvier, il a estimé que cette épidémie de pneumonie pourrait bénéficier à l’économie nord-américaine.
« C’est un nouveau facteur de risque que les gens doivent prendre en compte. Donc je pense que cela va aider le retour des emplois en Amérique du Nord. Certains aux États-Unis, probablement d’autres au Mexique aussi », a-t-il déclaré. Sa déclaration a, sans surprise, déclenché un torrent de réactions indignées sur les réseaux sociaux.
La crise sanitaire liée au coronavirus a mis à l’arrêt nombre de secteurs productifs en Chine et contamine déjà l'économie mondiale. La Chine aura du mal à s’en relever. Pour l’extrême droite américaine, il s’agit d’une victoire.
Floraison de l’industrie aux États-Unis
Pour encourager l’industrie américaine à quitter la Chine pour les États-Unis, Donald Trump a imposé des droits de douane sur des milliers de produits importés de Chine. Entamé au printemps 2018 pour mettre fin aux pratiques commerciales chinoises jugées « déloyales », ce conflit s’est matérialisé par des droits de douane punitifs réciproques sur des centaines de milliards de dollars de marchandises.
« Nos formidables entreprises américaines ont pour ordre de commencer immédiatement à chercher une alternative à la Chine, y compris en ramenant vos entreprises à la maison et en fabriquant vos produits aux USA », avait dit le président américain sur Twitter.
En annonçant – ou en faisant croire aux yeux du monde – que l’épicentre de l’épidémie de COVID-19 était Wuhan en Chine, le département d’État a recommandé fin janvier aux ressortissants américains de « ne pas se rendre » en Chine. Il est donc probable que les entreprises américaines implantées dans le pays pensent à se « redélocaliser » dans des zones plus sûres sur le territoire américain.
Guerre commerciale avec l’Europe
À partir du 18 octobre, une liste d’environ 150 catégories de produits en provenance d’Europe (principalement des pays européens partenaires d’Airbus : la France, l’Espagne, l’Allemagne et le Royaume-Uni) ont été soumis à des droits de douane américains.
Avec une vision mercantiliste du commerce international, Donald Trump cherche à promouvoir les exportations et freiner les importations. Force est de constater que l’apparition du coronavirus contribue à l’endiguement de l’importation des produits européens. D’ailleurs, Trump n’a-t-il pas été élu sur la promesse de réindustrialiser les États-Unis et du slogan « America first » ?
Promesses aux investisseurs américains
« Make America great again ». Ce n’était peut-être pas l’objectif premier du slogan de sa campagne, mais depuis son élection fin 2016, Trump a contribué à refaire de l’Amérique le champion toute catégorie sur les marchés financiers. Le secteur bancaire américain compte aussi parmi les grands gagnants de la réforme fiscale adoptée par le président américain. Cette réforme avait permis une réduction des impôts dus pour les entreprises sur les bénéfices qu’elles réalisaient.
Politique anti-immigrés de Trump
L’apparition du coronavirus aide à la mise en œuvre de la politique étrangère de Trump. Après le financement de la construction d’un mur à la frontière mexicaine et le refus de délivrer un permis de séjour ou d’accorder la nationalité américaine aux migrants bénéficiant d’aides sociales ou susceptibles d’en dépendre, Trump ferme les frontières aux voyageurs en provenance d’Europe. Devant une crise qui prend de l’ampleur, Donald Trump s’est adressé mercredi soir 11 mars, aux Américains depuis le bureau ovale, annonçant la suspension des voyages vers les États-Unis « en partance de l’Europe ». La fermeture des frontières, à laquelle échappe le Royaume-Uni, s’appliquera pour 30 jours.
Les démocrates et les détracteurs de Trump mis en sourdine
La mauvaise gestion de la crise sanitaire survenue pourrait jouer au détriment de la réélection de Donald Trump aux présidentielles de 2020. La campagne de dénigrement du président américain et les critiques des démocrates n’ont pas fait le poids face au pouvoir médiatique que s’est procuré Trump. Ses interventions télévisées répétées lui ont été bénéfiques. En outre, l’opinion publique, prise de panique avec la propagation de la COVID-19, n’a plus d’intérêt à donner de la tête aux débats des démocrates.
Le même scénario s’est produit à l’époque du mandat de Bush, avec l’invasion de l’Irak suite à la menace terroriste d’al-Qaïda et aux attentats du 11 septembre 2001.
L’ennemi numéro un des États-Unis est désormais un « virus d’origine chinoise » qui a permis à l’administration Trump de mener le bateau à sa guise.