La Turquie va prendre en main l’affaire d’Idlib et l’opération militaire dans le nord-ouest de la Syrie n’est qu’une « question de temps », a prétendu le président turc Recep Tayiip Erdogan, le 19 février.
Erdogan a déclaré que la Turquie n’était pas satisfaite des discussions à ce sujet avec la Russie et qu’il ne laisserait pas la région aux mains du « régime Assad et de ses partisans ». Il a rappelé qu’il ne restait que quelques jours avant la fin du mois de février, délai donné par Ankara aux forces syriennes pour arrêter les opérations contre les groupes armés à Idlib. Si les Syriens ne se retirent pas, la Turquie a promis d’attaquer et de repousser l’armée syrienne de ces zones.
Le « dernier avertissement » d’Erdogan tombe alors que les médias turcs diffusent des informations montrant comment des colonnes de troupes et de véhicules turcs se dirigent vers la frontière syrienne. Cependant, la Turquie a-t-elle vraiment déployé suffisamment de forces pour porter un coup dévastateur à l’armée syrienne et ne pas y laisser ses plumes ?
Dans le cadre des accords d’Astana, la Turquie a créé 12 postes d’observation. Alors que l’armée syrienne progressait vers Idlib, Ankara a créé une pléthore de postes militaires supplémentaires dans une tentative infructueuse de mettre fin à l’effondrement de la défense des terroristes [comme le prétendent des autorités turques]. On compte à ce jour, 27 installations militaires turques dans la région.
À en juger par les images, il y a entre une douzaine et deux douzaines de soldats ainsi que 4 à 6 véhicules militaires à chaque poste situé dans l’une des zones contrôlées par le gouvernement syrien. Les postes récemment érigés sont beaucoup plus solides et peuvent être décrits comme de véritables positions militaires avec des chars de combat, des obusiers, des mortiers et des structures fortifiées.
Le nombre total estimé d'équipements militaires déployés par les forces armées turques à Idlib serait 3 000. Depuis le 2 février, la Turquie a déployé 2 315 camions et véhicules militaires ainsi que 7 000 soldats. Pendant ce temps, la Turquie a positionné environ 30 000 soldats le long de la frontière syrienne.
L'équipement et les armes qui sont livrés comprennent des camions blindés, des MRAP, des véhicules blindés de transport de troupes, des chars de combat, des ATGM, diverses pièces d'artillerie et des lance-roquettes. Les troupes de l'armée turque sont renforcées par un nombre remarquable de forces spéciales.
Selon des sources pro-« opposition » syrienne, il y a plus de 100 000 membres de divers groupes terroristes, principalement Hayat Tahrir al-Cham à Idlib. Ces groupes participent déjà activement à la lutte contre l'armée syrienne. Cependant, le réel potentiel de mobilisation démontré par ces factions lors des récentes batailles ne dépasse pas 10 000 à 20 000 hommes.
À titre de comparaison, lors de l'opération « Bouclier de l’Euphrate », la Turquie a déployé environ 8 000 soldats, en plus des 11 000 miliciens pro-Ankara, contre 7 000 terroristes de Daech. Cette opération est devenue largement connue pour ses nombreuses victimes parmi les soldats et les mandataires turcs ainsi que pour un grand nombre d'équipements militaires, notamment des chars de combat Leopard 2A4, perdus lors de la bataille d'al-Bab.
Un autre exemple est l'opération « Rameau d’olivier » qui implique environ 6 000 soldats turcs et 20 000 terroristes soutenus par la Turquie contre environ 20 000 forces démocratiques syriennes et forces alliées.
Cependant, les groupes armés kurdes n'ont pas engagé les forces dirigées par la Turquie dans des combats ouverts ou urbains intenses et ont choisi de se retirer de la région après des semaines de tirs d'artillerie et de bombardements. Depuis lors, Ankara tente de consolider le contrôle de la zone et de mettre fin aux attaques constantes contre ses forces depuis les cellules restantes des YPG.
Il serait également utile de noter que les terroristes que la Turquie prétend avoir combattus en Syrie étaient peu nombreux dans la zone d'opération et souffraient d'un manque d'armes modernes, de matériel militaire lourd et d'artillerie et n'avaient aucun moyen de combattre l'armée de l'air turque. Aucun combat intense n'a eu lieu dans les grandes zones urbaines. Malgré cela, les opérations susmentionnées sont devenues un véritable défi pour la Turquie et ses groupes mandataires.
Il est donc peu probable que les forces turques actuellement déployées à Idlib et dans le nord-ouest de la Syrie soient suffisantes pour concrétiser les menaces et les promesses d'Erdogan. La Turquie devrait se dépêcher et augmenter son groupe militaire à plusieurs fois ou alors les partisans d'Erdogan devraient commencer à se préparer pour le 1er mars, le jour où les rêves d’une victoire rapide et puissante sur les «forces d'Assad» seront brisés.
Selon Sputnik, le ministre turc de la Défense Hulusi Akar n’a pas exclu la possibilité du retrait de troupes turques de Syrie après des élections qualifiées de "légales" dans ce pays.
« Quand il y a une Constitution, des élections législatives ont lieu, le gouvernement légal entre en jeu et un gouvernement démocratique émerge, c’est à ce moment-là que nous quitterons la Syrie », a-t-il prétendu.