Si une confrontation militaire venait à opposer les États-Unis à l'Iran, la Russie s'engagera-t-elle militairement aux côtés de l'Iran?
L'expert russe Ruslan Mamedov estime que la Russie ne pourrait rester indifférente en cas de conflit USA/Iran:
« L’Iran constitue un acteur stratégique incontournable capable de contrer l’hégémonie américaine aussi bien sur le plan régional qu'au sein du système financier mondial. Difficile donc pour la Russie de se passer d'un partenaire d'un si grand poids dans la guerre que mène Moscou pour endiguer la domination US. En effet l'intervention militaire de la Russie en 2015 en Syrie reste bien présente dans l'esprit des Américains et les pousse surtout à être méfiante sur ce sujet. Une éventuelle guerre contre l’Iran s’étendra, si elle commence, jusqu’à Israël en passant par l’Irak, la Syrie, le Liban et tout le golfe Persique. On n'écarte même pas l'extension du conflit à la mer Rouge. Une présence militaire sur toutes ces scènes n'arrangera rien pour les Americains. Comme l’avait écrit l’ancien secrétaire d’État américain, John Kerry, dans ses mémoires : « La Russie n’a donné aucune indication à l’administration d’Obama sur ce qu'elle allait faire en Syrie. Les USA y ont été pris de court. »
En cas de conflit US/Iran il va sans dire que l'engagement militaire aux côtés de l’Iran de l'une des principales puissances nucléaires rivales aux États-Unis, puissance accusée par ailleurs d'ingérence dans les élections US ne peut qu'inquiéter Washington, estime l'analyste russe.
Mais comment peut se traduire dans les faits l'engagement militaire russe?
« Une telle intervention pourrait se produire sous la forme d’un transfert d’armes ou encore l’envoi des conseillers militaires russes comme ce fut le cas en Syrie, au cas où l’Iran le demanderait. La Russie est sûre que les États-Unis cherchent à provoquer un changement de "régime" en Iran, ce qui s'avère une pure tentative de déstabilisation pour toute la région. »
« Aux yeux de la Russie, l’Iran est un acteur géostratégique incontournable capable d'endiguer la domination des États-Unis dans le Moyen-Orient, de limiter sérieusement les capacités de nuisance de Washington sur le marché de l’énergie et de revigorer ce processus si attendu qu'est la dédolarisation. Pour la Russie sans l'Iran, il est impossible de contrer voire de bousculer le poids de l'hégémonie US au Moyen-Orient. En d'autres termes, la Russie ne saurait asseoir son influence dans la région sans un acteur de stature de l'Iran. D'où sans doute la proposition de la vente par la Russie des missiles S-400 à Téhéran. En effet dans le cas iranien,
cette proposition est bien significative puisque Moscou sait parfaitement que l'Iran s'en servira contre les États Unis et Israël. Si l'Iran est attaqué, Moscou ne saurait rester les bras croisés, ne serait-ce que par le partenariat gagnant-gagnant qu'elle entretient avec l'Iran sur la scène syrienne. En Syrie, la force terrestre c'est l'Iran qui la fournit aux côtés de l'armée syrienne. la Russie domine les cieux. Et puis, les ondes de choc d'un Iran instable n'épargneront ni l'Afghanistan ni le Caucase. »
