L’Irak vient de passer une semaine fort chargée en visites de responsables des pays voisins, dont la RII, l’Arabie saoudite et le Qatar.
Insistant, devant ses invités, sur l’« arabité » de son pays, le Premier ministre irakien, Adel Abdel Mahdi, a préféré utiliser l’expression « acteurs de la libération » au lieu de l’« axe iranien ». Ce qui montre, selon l’agence de presse Fars News, son souci de préserver l’équilibre dans ses relations régionales et internationales. Mais cela ne l’empêchera pas de vouloir établir des « liens particuliers » avec Damas, selon le principe du « sort identique », écrit le journal libanais Al-Akhbar, citant des personnes qui ont rencontré le Premier ministre irakien.
Le président syrien, Bachar al-Assad, est attendu dans deux mois. Sur ce fond, ces sources estiment que Bagdad aura un rôle stratégique lors de l’étape suivante.
« Notre rôle ne se limitera plus à être un acteur régional ; nous assumerons aussi un rôle dans le règlement des différends et l’élaboration des initiatives, en ce qui concerne la donne saoudo-iranienne », aurait dit Adel Abdel Mahdi selon ces sources.
C’est en ces termes que le ministre des Affaires étrangères iranien, Mohammad Javad Zarif, résume les résultats de la visite du président Hassan Rohani en Irak : « Règlement de questions vieilles de plusieurs décennies, dont la livraison à titre gratuit de visas pour les pèlerins, le dragage du fleuve Arvand Roud et la création de la ligne ferroviaire Shalamcheh-Bassora ».
Le ministre délégué saoudien pour les pays du golfe Persique et ancien ambassadeur saoudien à Bagdad, Thamer al-Sabhan, était le deuxième invité du gouvernement irakien.
Thamer al-Sabhan se montrait très curieux d’apprendre quels étaient exactement les objectifs du président iranien en Irak, a déclaré une source bien informée au journal Al-Akhbar.
« Ne vous mêlez pas de nos affaires intérieures et de nos relations avec des pays voisins. […] Nous souhaitons entretenir des liens particuliers avec tous nos voisins », lui aurait rétorqué la partie irakienne.
Par ailleurs, l’arrivée en Irak d’une délégation qatarie a suscité des questions sur une probable rivalité entre ces deux pays riverains du golfe Persique dans une soi-disant course au rapprochement avec Bagdad. Le Qatar semble vouloir affirmer sa place en Irak et envisage de vastes investissements dans les secteurs de la reconstruction, des télécommunications et des gisements gaziers.
Al-Akhbar ajoute que les milieux décisionnels en Irak semblent préférer l’interaction avec les Qataris, restant sceptiques et inquiets quant aux véritables intentions des parties saoudienne et émiratie.
Parlant de l’Arabie saoudite, le journal Al-Akhbar fait allusion aux événements meurtriers de 2007 et 2017, dont l’Arabie saoudite était le seul responsable. D’ailleurs, il ne reste plus rien du soi-disant Conseil de coordination saoudo-irakien créé en 2017 et conçu en principe dans une optique de rivalité avec l’Iran. Le journal Al-Akhbar ajoute que Riyad et Bagdad n’ont réalisé aucun projet ou plan commun.
Et en ce qui concerne les Émirats arabes unis, des sources gouvernementales ont dit à Al-Akhbar qu’il n’y avait pas de sérieuse volonté politique dans le sens d’un rapprochement avec Bagdad. Et cela semble vraisemblable, selon l’article. Le prince héritier des EAU chercherait plutôt à se cacher derrière son homologue saoudien. Une fois que la mission de rapprochement de Mohammed ben Salmane aura échoué, Mohammed ben Zayed pourra en profiter, mettant toute la responsabilité de cet échec sur le dos de son homologue saoudien.
Pour certains responsables irakiens, le fait que des pays arabes de la région se sont activés pour se rapprocher de l’Irak s’explique par trois motivations :
– Investir dans l’Irak de l’après-Daech ;
– Rivaliser avec l’Iran, en répétant que leurs territoires sont situés dans la « profondeur arabe » de l’Irak ;
– La crainte de perdre totalement leur place en Irak.
C’est pourquoi les pays arabes du golfe Persique s’impatientent de pouvoir montrer les nouvelles lettres de créance de leurs ambassadeurs en Irak, signes de leur retour de ce pays, au président US, qui ne cache pas son souhait de garder un œil sur l’Iran voisin depuis l’Irak.
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