La Jordanie semble séparer discrètement son chemin de l’Arabie saoudite pour rejoindre le camp des autres acteurs de la région.
En un seul jour, on a assisté à la réouverture du point de passage de Nassib à la frontière avec la Syrie, à l’invitation du président du Parlement jordanien, Fayçal al-Fayez, pour une visite à Doha et à des négociations entre le Premier ministre du pays et le ministre turc des Affaires étrangères sur le développement des échanges commerciaux, a rappelé le journal Raï al-Youm.
Tout en veillant à ne pas nuire à ses relations avec l’Arabie saoudite, la Jordanie songe à diversifier ses relations et oriente celles-ci vers le Qatar et la Syrie, tout en se rapprochant prudemment de la Turquie.
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En dépit de la déclaration de solidarité avec Riyad dans l’affaire du journaliste saoudien Khashoggi, par le biais d’un communiqué assez sobre, Amman profite de la tourmente qui a frappé les Saoud pour renforcer ses relations avec le Qatar, la Syrie et la Turquie.
Dans les circonstances actuelles, la réouverture du point de passage stratégique de Nassib, situé à la frontière syro-jordanienne, est dans l’intérêt d’Amman. En effet, la reprise des relations économiques avec la Syrie semble annoncer que les liens politiques devraient bientôt être renoués, malgré le report des rencontres entre les ministres des Affaires étrangères des deux pays.
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En pleine affaire Khashoggi, le journaliste saoudien assassiné au consulat de Riyad à Istanbul, Amman se dirige vers une normalisation des relations avec Doha, mais tout en agissant avec circonspection sur le plan politique. Le président du Parlement jordanien, Fayçal al-Fayez, un proche du roi, n’a pas caché l’invitation de Doha qui est intervenue dix jours après la visite à Doha de Nael al-Kabariti, un parlementaire jordanien à la tête d’une délégation, visite au cours de laquelle les relations entre les deux pays ont été qualifiées de particulières. La nouvelle visite de Fayçal al-Fayez à Doha et les sujets qui y seront discutés constitueront une étape décisive pour renforcer les relations entre les deux pays.
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Quant à ses relations avec la Turquie, les tensions entre Ankara et Riyad, qui ont atteint leur point culminant, ont fait qu’Amman aurait des difficultés à faire aboutir les négociations avec Ankara et tarderait donc à prendre des mesures pragmatiques visant à renforcer ses relations économiques avec la Turquie.
Cela étant dit, Ankara voit un double intérêt dans les relations avec Amman, notamment depuis la réouverture du point de passage Nassib. La visite du ministre turc du Commerce et la tenue d’une conférence sur l’investissement en Jordanie à la mi-novembre en sont la preuve.
Amman tient à faire preuve d’intelligence et de patience en maintenant ses relations avec Riyad dans l’attente du dénouement de l’affaire Khashoggi, voulant tout d’abord voir ce qui en ressortira à l’échelle régionale et internationale. Les experts tablent sur une diminution de la domination de l’Arabie saoudite non seulement au niveau des relations bilatérales, mais aussi sur le plan régional, où les Saoud risquent d’être obligés de faire des compromis encore plus grands si l’implication de Riyad dans le meurtre de ce journaliste dissident saoudien venait à être confirmée.
Après une longue période de silence qui a suivi la disparition de Jamal Khashoggi, Amman, par la voix de son porte-parole du gouvernement, a fait une déclaration en signe de solidarité et en soutien à Riyad, qualifiant de « rumeurs » les accusations qui visent le royaume wahhabite.
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