Les relations entre la Russie et l’Iran ne sont pas seulement bilatérales ; leur dimension et leur impact géostratégique, à la lumière des variations sur les scènes internationale et régionale, animent les observateurs.
Le site de la chaîne Al-Jazeera rapporte que l’Iran s’est arrogé une place particulière dans la politique étrangère de la Russie. Il est considéré par Moscou comme un pays privilégié dans la coopération régionale, selon les termes du Concept de politique étrangère de la Fédération de Russie (approuvé par le président russe Vladimir Poutine le 30 novembre 2016).
Hormis les facteurs qui favorisent le rapprochement des deux pays, le principal obstacle à ce dessein est la méfiance de Téhéran envers la politique russe. Dans la mémoire collective iranienne, la Russie fait partie de ces pays qui laissent en plan leurs alliés.
Mais ce qui pourrait renforcer le lien qui unit la Russie à l’Iran est avant tout d’ordre économique :
1. Le niveau des échanges commerciaux est sans doute considérable, mais dans le domaine des transports, les projets à venir sont encore plus prometteurs. Le projet de construction d’un canal transiranien qui traverserait l’Iran du nord au sud et relierait la mer Caspienne au golfe Persique est toujours d’actualité. Il atteindrait l’Europe du Nord et contribuerait au transit de 10 millions de tonnes de marchandises par an.
L’importance stratégique du projet est notamment due à l’Iran, qui entrerait dans la chaîne de liaison entre l’Asie et l’Europe. « L’histoire de ce projet stratégique est déjà vieille de plusieurs décennies […] et revêt une grande importance pour, entre autres, les relations russo-iraniennes », déclarait en 2016, Bahram Amirahmadiyan, expert en géographie politique, à l’agence Sputnik.
2. Dans le secteur énergétique, l’Iran et la Russie possèdent d’énormes ressources pétrolières et gazières, parmi les plus grandes au monde, et s’évertuent à promouvoir leurs coopérations dans ce domaine.
Autre domaine où se renforceraient les relations irano-russes : la coopération régionale. Elle ne concerne pas seulement le Moyen-Orient, mais s’étend à l’Asie centrale, au Caucase et à la mer Caspienne. Ces zones sont en relation directe avec la sécurité intérieure de la Russie. L’Iran possède avec ces trois régions névralgiques des frontières communes, d’où l’importance du maintien d’une interaction avec l’allié russe.
3. L’axe de la Résistance et le défi de l’Occident : les deux pays sont confrontés à l’influence et à la présence militaire des États-Unis et des pays occidentaux dans la région. L’objectif principal de ces derniers est de contrer la puissance russe. L’OTAN étudie l’encerclement de la Russie à l’est et cherche donc à élargir ses activités en se rapprochant de l’Iran et des pays de la mer Caspienne.
Le Moyen-Orient est le point de départ de la Russie si elle veut recouvrer son lustre d’antan. Or, la région est un champ de rencontre incontournable avec l’Iran, tout comme l’est la Syrie, où les deux pays sont entrés en action pour défendre leurs intérêts, ce qui leur a permis de raffermir leur partenariat.
Pour Téhéran, Moscou peut contrebalancer les positions américaines. Et pour Moscou, Téhéran a suffisamment d’influence dans la région pour faire face aux États-Unis.
Par ailleurs, certains faits illustrent encore plus leur rapprochement : suite aux dernières évolutions en Iran, la Russie a manifesté un grand soutien au gouvernement iranien, jusqu’à s’opposer à une réunion du Conseil de sécurité des Nations unies qui devait se tenir en janvier à la demande des États-Unis au sujet de la crise iranienne. Fin février, elle a opposé son veto à une résolution britannique soutenue par les États-Unis et la France, qui visait à renouveler l’embargo sur les armes au Yémen en épinglant l’Iran, et a fait adopter à l’unanimité une résolution technique épargnant Téhéran.
Il va de soi que face à la pression des États-Unis et de l’Occident, l’Iran et la Russie ne cessent de resserrer leurs liens, qui toutefois, n'ont pas encore atteint une véritable coalition stratégique. Leurs intérêts communs au Moyen-Orient, en Asie centrale et dans le Caucase sont trop importants pour que leurs relations soient mises à mal aisément.