Le Premier ministre irakien est arrivé à Paris, une visite qui est loin d’être simple et sans histoire.
Le Premier ministre irakien Haïder al-Abadi a pris l’avion, mercredi 4 octobre, à destination de Paris, où il s’entretiendra avec des responsables français au sujet des relations bilatérales. Il répond à l’invitation du président français Emmanuel Macron. Avec les autorités françaises, Haïder al-Abadi devra discuter également de la lutte contre le terrorisme en Irak. Avant de quitter Bagdad, le Premier ministre irakien a déclaré, devant des journalistes, que la France et d’autres pays avaient besoin d’investir en Irak et qu’il allait en discuter avec les autorités françaises. Le déplacement de M. al-Abadi en France durera un jour.
De son côté, la diplomatie française a publié, sur son site web officiel, un communiqué affirmant qu’« alors que la reconquête des territoires sous l’emprise de Daech a connu des progrès considérables au cours des derniers mois, la France souhaite donner une nouvelle impulsion à sa relation avec l’Irak dans tous les domaines et développer ses actions de coopération, ses relations économiques et son dialogue politique avec l’Irak. Elle continuera de soutenir les autorités irakiennes pour les aider à relever les défis de la reconstruction, de la réconciliation nationale et de la mise en œuvre d’une gouvernance inclusive ».
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Barzani et ses rencontres secrètes avec des autorités étrangères
Avant même d’avoir eu lieu, la visite à Paris, jeudi, du Premier ministre irakien, a provoqué un cafouillage diplomatique entre Paris et Bagdad sur la question kurde, Emmanuel Macron ayant été contraint de réviser son offre de médiation. En effet, Abadi a sèchement repoussé l’offre de médiation de Paris sur le dossier du Kurdistan irakien, ce qui a provoqué un certain "embarras" à l’Élysée et au Quai d’Orsay. En réalité, les autorités de Bagdad sont bien conscientes des relations privilégiées que Paris entretient avec le clan Barzani.
À vrai dire, Paris marche sur des œufs : de l’occupation étrangère à Daech, la France n’a jamais apporté un appui explicite à Bagdad. Le décret du Premier ministre Abadi qui a ordonné l’expulsion des conseillers étrangers à Erbil concernait 15 personnes, dont trois Français. Les plus connus d’entre eux étant l’ancien ministre des AE, Bernard Kouchner et le philosophe, Bernard Henry Lévy. Bagdad soupçonne les "conseillers étrangers" de Barzani d’avoir rédigé la soi-disant "Constitution kurde" et d’avoir voulu fixer les frontières de "l’État kurde", malgré un discours officiel à Paris qui se dit contre cette "indépendance".
La France a débloqué près de 500 millions d’euros pour aider à renforcer son poids sur le marché irakien où les entreprises françaises Lafarge, Total, Alstom, Airbus, Thales, Veolia, Sanofi maintiennent déjà une présence active. En 2015, les échanges commerciaux entre la France et l’Irak se sont élevés à 1,26 milliard d’euros.
Toujours est-il, la fin de non-recevoir d’Abadi à discuter du Kurdistan irakien illustre à quel point les tentatives occidentales destinées à provoquer le démembrement de l’Irak ont suscité un scepticisme et un rejet de la population irakienne. Le parti pris implicite de la France en faveur de la partition de l’Irak intervient alors que le référendum en Catalogne a été condamné par l’Élysée qui craint un effet boule de neige en France.