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La Chine s'interroge sur l'après-Kim Jong-un

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Des drapeaux chinois et nord-coréen dans la ville chinoise frontalière de Dandong, le 18 décembre 2013. ©AFP/Archives

Des troupes chinoises en Corée du Nord, des Américains pour s'emparer de l'arsenal nucléaire, la réunification avec la Corée du Sud: la Chine s'interroge ouvertement sur l'après-Kim Jong-un, quitte à rompre avec près de sept décennies d'alliance entre les deux régimes communistes.

Le dernier essai nucléaire nord-coréen, début septembre, a attisé la colère de Pékin qui a voté et promis d'appliquer les sanctions de l'ONU, en réduisant ses livraisons de pétrole à Pyongyang.

Mais, officiellement du moins, la Chine ne veut pas entendre parler d'un changement de régime chez son petit voisin et continue à plaider pour "le dialogue", afin de convaincre la Corée du Nord de renoncer à la bombe. 

Du point de vue de Pékin, une guerre et/ou un effondrement du régime risqueraient d'amener un flot de réfugiés sur son territoire et des troupes américaines à sa frontière.

Ce qui n'empêche pas certains commentateurs chinois d'évoquer désormais l'impensable: une rupture entre les frères d'armes, unis pendant la guerre de Corée (1950-53).

Une semaine après le dernier essai nucléaire nord-coréen, dont les secousses ont semé la panique dans les régions frontalières du nord-est de la Chine, un expert des questions internationales a carrément appelé Pékin à engager des discussions avec les États-Unis et la Corée du Sud sur l'après-Kim.

- "Se préparer au pire" -

Sous le titre "Il est temps de se préparer au pire en Corée du Nord", l'expert, Jia Qingguo, doyen de l'École d'études internationales de la prestigieuse Université de Pékin, s'interroge pour savoir qui des Américains ou des Chinois devraient mettre la main sur les installations nucléaires nord-coréennes, afin de les sécuriser.

Il envisage que les troupes chinoises entrent dans le pays afin d'installer des zones de protection pour les réfugiés et les empêcher de pénétrer en Chine. Il évoque une présence de troupes sud-coréennes ou onusiennes pour maintenir l'ordre en Corée du Nord et s'interroge sur une possible réunification politique avec Séoul.

"La communauté internationale devra-t-elle mettre en place un nouveau gouvernement pour la Corée du Nord, ou bien organiser, sous l'égide de l'ONU, un référendum sur la réunification dans toute la péninsule en vue d'une Corée réunifiée ?", se demande-t-il.

L'article a été publié en anglais sur le site East Asia Forum, de l'Université nationale australienne, mais il est peu probable que le gouvernement chinois n'ait pas donné son aval à sa diffusion.

Pour un diplomate occidental en poste à Pékin, il peut s'agir simplement pour le gouvernement chinois de faire peur au dirigeant nord-coréen --et bonne impression aux États-Unis avant la venue du président américain Donald Trump, attendu en Chine en novembre. En visite samedi à Pékin, le secrétaire d'État Rex Tillerson a évoqué la question coréenne avec le président Xi Jinping.

"Si la communauté internationale peut s'unir pour lui faire croire qu'il va vraiment y avoir une guerre, il y a une chance que la Corée du Nord gèle ses essais nucléaires", imagine le chercheur Wang Peng, de l'Université Fudan à Shanghai.

Mais pour David Kelly, du cabinet de recherche China Policy, basé à Pékin, il y a bel et bien un débat au sein de l'intelligentsia chinoise, qui se dit que "on se porterait mieux sans les Nord-Coréens, une Corée réunifiée serait une chance formidable pour la Chine, le nord-est (chinois) en profiterait".

- "Premières loges" -

Même analyse pour Barthélémy Courmont, chercheur à l'Institut de relations internationales et stratégiques à Paris: "La Chine estime désormais qu'un éclatement de la Corée du Nord ne se ferait pas nécessairement à son désavantage", notamment sur le plan économique. "Si la Corée du Nord venait à tomber de façon pacifique, la Chine serait aux premières loges pour la reconstruction. La Chine est le seul pays capable d'assurer la reconstruction de la Corée du Nord", souligne-t-il.

En cas d'effondrement du régime, ce serait à Pékin de jouer ses cartes au mieux afin de profiter de la réunification, observe Deng Yuwen, ancien responsable de la revue de l'École centrale du Parti communiste chinois, qui a dû quitter ses fonctions en 2013 après un article appelant --déjà-- à rompre avec Pyongyang.
 

Bouclier antimissile US, THAAD. ©Reuters

"Si les deux Corées sont réunifiées, il n'y aura plus de nécessité à la présence des troupes américaines en Corée du Sud et le peuple sud-coréen ne les laissera pas rester", pronostique-t-il, dans un article publié en avril par le centre de réflexion indépendant Charhar Institute.

Cerise sur le gâteau, le bouclier antimissile américain Thaad n'aurait plus non plus de raison de se maintenir en Corée du Sud. La question du Thaad, bête noire des dirigeants chinois, "serait tout naturellement résolue", plaide M. Deng.

Au final, si Pékin peut être tenté de lâcher son difficile allié, "le seul problème c'est de savoir comment couper le cordon, parce que personne ne sait comment la Corée du Nord réagira", avertit David Kelly.

Avec AFP

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SOURCE: FRENCH PRESS TV