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Face au Hezbollah, Israël a perdu son pouvoir de dissuasion

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Les exercices militaires de l’armée israélienne au Golan, près de la frontière syrienne, le 5 septembre 2017. ©AFP

L’armée israélienne annonce ce mardi sa plus grande manœuvre militaire depuis 20 ans, sur le front nord, limitrophe du sud du Liban : c’est une manœuvre destinée à préparer « les troupes » à un scénario de guerre totale face au Hezbollah. 30 000 soldats et réservistes sont mobilisés pendant 11 jours, répartis en 30 bataillons de combat et secondés par des dizaines de navires de guerre et de chasseurs-bombardiers. Que cherche l’armée israélienne ?

Le journal Al-Akhbar revient sur cet exercice d’envergure et écrit : « Qu’est-ce qui a poussé Israël à lancer ce vaste exercice militaire alors que les experts israéliens ne cessent de crier à la montée en puissance de la Résistance au bout de six ans de guerre en Syrie, et que l’état-major de l’armée israélienne en veut au monde entier de s’être trompé de calcul et de n’avoir pas vu à temps les mutations en cours et le “péril hezbollahi” qui le guette à ses portes ? »

Amos Hariel, chroniqueur militaire à Haaretz se moque d’ailleurs de cet exercice militaire, « qu’attendait depuis longtemps le Hezbollah », pour voir de quel bois est faite l’armée israélienne maintenant que la guerre en Syrie prend « une tournure fâcheuse » et « risque de se solder par une retentissante victoire d’Assad et ses alliés ».

« L’armée est tombée dans le piège de la propagande. Elle montre ses muscles pour rassurer l’opinion israélienne sans entreprendre des mesures par ailleurs si nécessaires à la remise à niveau de ses capacités de combat », fait remarquer Hariel, pour qui tout ce branle-bas de combat ne vise qu’à faire passer au Hezbollah un « puissant message de dissuasion ».

Mais Hariel ne va pas au bout de son analyse. En Syrie, Israël se trouve confronté à l’un des pires scénarios qui soient : la perspective d’un maintien d’Assad au pouvoir avec en toile de fond l’émergence d’un axe Damas-Hezbollah-Téhéran qui jouit du soutien ferme de Moscou et qui compte lui mener la vie dure, le cas échéant.

En effet, la manœuvre militaire à laquelle se livre l’armée israélienne marque la fin d’une époque : Israël, « jusqu’ici puissance militaire suprême », doute désormais de ses capacités de dissuasion. Pendant longtemps, le Renseignement israélien assurait les généraux de l’érosion progressive des « armées arabes » à la faveur des compromis (armées égyptienne et jordanienne dans la foulée des accords de Camp David) ou des guerres d’usure (le cas des armées syrienne et irakienne).

Or ce pronostic s’est démenti aussi bien en Irak qu’en Syrie, où les forces armées nationales ont triomphalement surmonté l’épreuve de la guerre. La manœuvre militaire qui commence sur le front nord d’Israël revient à reconnaître cette erreur de calcul stratégique, erreur pour laquelle Israël devra payer bien longtemps le prix fort.

Hariel reconnaît d’ailleurs que l’exercice militaire en question fait écho à vrai dire « aux changements qui se sont produits sur les frontières du Nord israélien ». Sur toutes les chaînes télévisées israéliennes, les communiqués de l’armée se succèdent pour promettre « la défaite militaire du Hezbollah » au cas où une confrontation venait à se produire.

Et pourtant, les experts militaires israéliens ne partagent pas tous l’avis des généraux de l’armée. Le mot « défaite » leur pose problème. Le spécialiste de la chaîne 10 de la TV israélienne pose à juste titre la question suivante : « Mais une défaite du Hezbollah dans quel sens ? Défaire son idéologie, sa structure organisationnelle, ou le défaire à titre d’acteur désormais incontournable sur la scène politique syrienne ? »

Cette triple question conduit le commentateur israélien à avouer qu’il ignore « ce qu’entendent réellement les responsables israéliens par une “défaite du Hezbollah” » : « Mais une chose est sûre : dans chacun de ces trois cas de figure, Israël devra se préparer à rester pour longtemps au Liban puisque le Hezbollah n’est plus ce qu’il était en 2006 et qu’on ne peut le vaincre ni rapidement ni en un seul coup. »

Ainsi que l’affirme le commandant en chef du front nord, Tayem Himmen, la victoire face au Hezbollah est un concept qui reste bien flou, pouvant aller de petits succès militaires pour Israël à la disparition totale de la Résistance. Yediot Aharonot va plus loin. En l’absence d’une définition claire de la victoire qu’Israël devra remporter face au Hezbollah, son chroniqueur parle de deux fronts :

« Israël devra intervenir contre le Hezbollah à la fois au Liban et en Syrie. Puisque le Hezbollah a étendu son champ d’action.

Dans l’état-major de l’armée israélienne, il y a des militaires qui qualifient le Hezbollah de “seconde armée du Moyen-Orient” après celle d’Israël. Ces gens estiment que le Hezbollah est capable de gérer par bataillons interposés un vaste champ de bataille en se faisant aider par ses drones et son artillerie lourde. Son aptitude à disposer des tunnels souterrains lui procure la possibilité d’agir par des unités commandos, en peu de temps, comme il l’a déjà fait dans ses offensives contre Daech. »

L’aveu est cinglant : à chaque opération menée par le Hezbollah contre Daech en Syrie, Israël s’est livré à un travail d’analyse et a évalué la stratégie et les tactiques de la Résistance. La peur au ventre, il a assisté à l’émergence d’une « armée » qu’il ne reconnaît plus et contre qui il ne sait pas comment réagir...

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SOURCE: FRENCH PRESS TV