Le Koweït connaît bien la complication de la tâche pour laquelle il s’est dit prêt : jouer au médiateur entre l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis d’une part et entre ces deux pays et le Qatar d’autre part. Cela s’annonce assez difficile étant donné l’ampleur des divergences qui les divisent.
Le renommé journaliste Abdel Bari Atwan, rédacteur en chef du quotidien Rai al-Youm, a fait paraître, ce mercredi 31 mai, un article qui examine les chances d’une médiation réussie du Koweït dans le conflit opposant Riyad à Abou Dhabi et Doha.
« La crise persiste entre l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis d’une part et ces deux pays et le Qatar d’autre part et elle se nourrit d’une guerre médiatique absolue. C’est dans cette conjoncture chaotique que le Koweït s’est dit prêt à faire de la médiation, comme il avait déjà fait en 2014.
Là, ce qui mérite l’attention est que les dirigeants qataris ont opté, pendant les derniers jours, pour une approche qui trahit leur ligne de conduite controversée, d’autant plus que cette approche fut marquée par un certain durcissement.
L’émir du Qatar Tamim ben Hamad Al Thani a établi un contact téléphonique avec le président de la République islamique d’Iran Hassan Rohani, au lendemain à peine du début du conflit qui l’avait opposé à Riyad et à Abou Dhabi. Lors de cet entretien téléphonique, l’émir du Qatar a affirmé avoir ordonné à ses ministres d’œuvrer pour l’essor des relations entre Doha et Téhéran.
“Une approche marquée par le durcissement”, voilà ce qui pourrait bien décrire l’initiative de passer ce coup de fil qui met, d’une part, de l’huile sur le feu au conflit et prouve, d’autre part, comment le Qatar reste campé sur ses politiques indépendantes et ne veut pas changer de cap, du moins pour le moment.
À la question de savoir quelle est la principale origine de ce conflit qui va crescendo, il n’existe qu’une réponse valable : les relations en pleine croissance du Qatar avec l’Iran mettent en colère l’Arabie saoudite et ses alliés.
Il est vrai que l’émir du Koweït Jaber al-Ahmad al-Sabah s’est dit disposé à faire de la médiation dans ce conflit, mais sa réticence est aussi bien compréhensible, car les chances de succès d’une telle initiative s’annoncent assez maigres, étant donné l’avalanche de revendications que réclameront les parties en conflit et la faible probabilité du retrait du Qatar de ses actuelles positions.
Outre tous les cas précités, lorsque le Koweït a envoyé, au début de l’année 2017, son ministre des Affaires étrangères à Téhéran pour jouer au médiateur entre l’Iran et l’Arabie saoudite, cette dernière a publié un communiqué, à la descente d’avion du ministre koweïtien, pour dire qu’elle ne voulait d’aucun processus de réconciliation.
Par ailleurs, les médias qataris n’ont pas caché leur surprise de voir les médias saoudiens et émiratis attaquer la décision du Qatar d’élargir ses relations avec l’Iran, d’autant plus que ces deux pays ont déjà partagé un champ gazier dont la production constitue 65 % des exportations du Qatar.
Les responsables qataris se plaignent et demandent qu’on leur explique pourquoi leur décision de se rapprocher de l’Iran est sous le feu des critiques de l’Arabie et ses alliés, alors qu’un pays comme le Sultanat d’Oman entretient des relations élargies avec l’Iran ou qu’une ville comme Dubaï se livre à des échanges commerciaux avec l’Iran dont le montant dépasse les 15 milliards de dollars.
Cela dit, le succès de la mission de médiation du Koweït s’avère peu probable, car les différends sont beaucoup trop profonds pour que les ambassadeurs expulsés puissent récupérer leur poste. En effet, lesdits différends ne pourront être réglés avant que le Qatar ne se soumette à un changement dans ses attitudes envers l’Iran, le Hamas, les Frères musulmans et le Front al-Nosra.
La guerre médiatique opposant l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis d’une part et ces deux pays et le Qatar d’autre part ne cesse de s’intensifier.
Il paraît qu’un scénario, préparé en cachette, prend pour cible le Qatar.
Le Conseil de coopération du golfe Persique ne sera plus comme avant, car le fossé continue de se creuser en son sein et il sera de plus en plus difficile, voire impossible, de le combler. »