Quant au dossier syrien, Washington a lâché ses alliés pour qu’ils saisissent au fur et à mesure les réalités de la donne actuelle en Syrie et il s’est, en même temps, soumis à l’approche russe concernant la présidentielle syrienne. Bref, Washington s’approche de plus en plus de Téhéran et de Moscou, quant au dossier syrien, selon le quotidien libanais Al-Bana.
"Les Américains ne font plus aucun cas des positions de leurs alliés et ils ne pensent qu’à l’équilibre de force. Ce revirement relève d’un retour au rapport Baker-Hamilton." dit le quotidien.
Pour rappel, le rapport est celui présenté par le Groupe d'étude sur l'Irak (ISG), une commission indépendante co-présidée par le républicain James Baker et le démocrate Lee Hamilton. Il a été remis mercredi 6 décembre 2006 au président américain George W. Bush et préconise 79 recommandations pour un changement de la politique américaine en Irak et dans la région.
Le document préconisait un désengagement graduel, l'armée américaine devant davantage axer sa mission sur la formation, l'équipement et le soutien des forces irakiennes que sur le combat. Il suggère d'autre part à Washington de réduire son « soutien politique, militaire et économique » à l'Irak si le gouvernement de Bagdad n'enregistre pas des progrès substantiels en matière de sécurité et à associer davantage les voisins de l'Irak au processus de stabilisation du pays, à commencer par l'Iran et la Syrie, acteurs régionaux incontournables avec lesquels Washington refusait à l’époque de dialoguer. Après avoir reçu le rapport des mains de James Baker le président américain, George W. Bush, a déclaré qu'il l'étudiera « très sérieusement ».
Le gouvernement américain ne semble pas toutefois l'étudier comme il faut!
Dix années se sont écoulées de la publication de ce rapport mais les sabotages politiques, la formation des coalitions différentes, les changements arbitraires qui s’ajoutaient aux guerres civiles et aux révolutions ont fait voler en éclat les recommandations du rapport Baker-Hamilton. Maintenant, les chimères d’un nouvel empire ottoman ont disparu, une domination des Frères musulmans ne semble qu’une hallucination et le recours à Al-Qaïda pour éradiquer les ennemis, option recommandée et soutenue par l’Arabie saoudite, ne fonctionne plus. Tous les projets des Etats-Unis ont échoué. De l'Irak jusqu'à la Syrie, en passant par l'Afghanistan, la Libye, l'Egypte, Bahreïn, la Tunisie, etc. Le coup de grâce en est certes la victoire des forces syriennes dans la libération de Palmyre...
Washington a décidé alors de se débarrasser de sa politique de deux poids deux mesures face au terrorisme. Au lieu de cette politique ambivalente, critiquée toujours par les alliés de la Syrie, dont et surtout l’Iran, la Maison Blanche s’est finalement décidée à mettre au cœur de ses politiques une lutte constante contre le terrorisme et à lâcher ses faibles alliés (arabes) qui ne savent que de fomenter des complots. En contrepartie, elle préfère coopérer avec les ennemis qui sont en train de se transformer en ses nouveaux partenaires d’autant plus que le groupe terroriste Daech se trouve aux portes de l’Europe.
Les arguments mentionnés expliquent bel et bien le changement de l’ordre du jour de la Conférence de Vienne sur la paix en Syrie. Là, une évolution de poids s’est produite lorsque les Turcs et les Saoudiens ont finalement accepté le couac de leurs calculs. C’est bien à l’issue de cette Conférence qu’une résolution internationale, excluant le départ d’Assad, a été émise. Les participants à la Conférence ont, en dernier ressort, cessé d’assujettir l’accalmie du conflit au départ de Bachar Assad et ont soumis à cette réalité que le sort du président syrien devra être déterminé par le peuple de la Syrie.
C'est dans la foulée de cette série d’évolutions, que le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, était parti pour Moscou où il s’était adressé aux responsables russes :« Allons-y ! On va tomber d’accord sur une solution et on va convaincre les Saoudiens et leurs alliés à rejoindre le processus de paix »!
Washington a toutefois subordonné son revirement au retrait du Hezbollah de la Syrie.
Parlant d’une nouvelle Constitution pour la Syrie, les Etats-Unis veulent dire un partage de pouvoir entre le Président et le Premier ministre, tout en insistant sur un partage de pouvoir entre les différentes communautés.
Et cela sans oublier le plan avorté de Washington qui consistait à diviser les différentes ethnies et communautés.
Aujourd’hui, la Syrie se trouve face à un processus politique important et décisif et elle n’aura d’autre choix que de tracer ses politiques de manière à garantir sa victoire définitive, à maintenir ses alliés et à sauver ses équations politiques intérieures. Une telle politique ne serait peut-être pas très conforme aux desiderata de la Russie mais elle pourrait pourtant être considérée comme un simple point de désaccord tant qu’on accepte cette réalité : Ce sont les Syriens qui décideront de leur avenir, soit par un scrutin soit par un référendum.
Quant à un président destiné à gérer une Syrie entière, Washington a déjà des noms à l’esprit et il pourrait attendre le bon moment, par exemple après que la Syrie retrouve sa position dans le monde arabe et sur le l’échiquier international, pour révéler ses noms".