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Zoom Afrique du 25 avril 2024

Zoom Afrique du 25 avril 2024

Les titres de la rédaction :

  • Cameroun : la transformation à nouveau au cœur du Salon avicole international de Yaoundé
  • L’OPEP s’engage à aider la Namibie à devenir un important producteur de brut
  • Guinée : le gouvernement prévoit un appui de 25 millions $ aux agriculteurs en 2024/2025
  • Le Nigeria relance la production de pétrole à Awoba et y vise 12 000 barils/jours

Les analyses de la rédaction :

1. France-Haïti : l’heure de la réparation historique est-elle venue ? 

Depuis plusieurs siècles, la République d’Haïti porte le fardeau d’une dette historique imposée par la France, une dette qui a ébranlé les fondements de sa souveraineté et entravé son développement. Aujourd’hui, la question de la restitution des 17 milliards d’euros, correspondant aux indemnités versées par Haïti à la France suite à son indépendance, refait surface au sein des débats publics, tant en Haïti qu’à l’international. 

En 1825, la France, alors sous le règne de Charles X, a contraint la jeune république haïtienne, première nation noire à avoir brisé les chaînes de l’esclavage, à verser 150 millions de francs-or, somme ensuite ramenée à 90 millions, en guise de dédommagement pour les colons français et la perte de ce qui était considéré comme un bien. Ce fut une condition sine qua non pour que la France reconnaisse officiellement l’indépendance d’Haïti, obtenue en 1804 après une lutte acharnée contre l’oppression coloniale. 

L’impact de cette dette sur Haïti a été dévastateur. Pour honorer ces paiements, le pays s’est vu contraint de contracter des emprunts auprès de banques françaises, endettant lourdement son économie pour des générations et hypothéquant ainsi ses ressources, ses capacités d’investissement et son avenir. Les effets de cette dette de l’indépendance, symboliquement et financièrement, sont perçus par beaucoup comme une continuation de l’exploitation coloniale sous une autre forme, un frein majeur au progrès et à l’autodétermination du peuple haïtien. 

Le débat actuel repose sur un socle d’arguments souverainistes et de justice réparatrice. Les souverainistes haïtiens affirment que la dette a été imposée par la force et l’intimidation, relevant presque d’un acte de rançon. Ils soutiennent que la France doit assumer la responsabilité de cet héritage oppressif et effacer un passif qui est moralement et légalement contestable. Ils y voient un geste nécessaire pour la reconnaissance des torts historiques et un pas vers la réparation des préjudices subis par Haïti, un pays aujourd’hui en proie à des défis socio-économiques considérables. 

L’argumentaire haïtien ne se limite pas à une simple question de remboursement financier. Il s’inscrit dans un contexte plus large de reconnaissance des injustices historiques et de réévaluation des relations postcoloniales. Les partisans de ce mouvement réclament à la France un acte symbolique fort, un mea culpa qui s’accompagnerait d’un support concret pour le développement durable de l’île, enracinant ainsi une collaboration future sur les bases de l’équité et du respect mutuel. 

Cette somme de 17 milliards d’euros, bien que symbolique, représente pour beaucoup une étape cruciale pour le redressement et la réhabilitation d’une nation qui aspire à se libérer des chaînes résiduelles de son passé colonial. Au-delà des chiffres, c’est la reconnaissance du droit d’Haïti à l’autodétermination et à la souveraineté pleine et entière qui est revendiquée. 

Malgré les appels répétés de diverses parties prenantes, la France n’a pas encore adopté de position officielle sur une éventuelle restitution. La complexité de la question, mêlant droit international, responsabilité historique, et répercussions politiques, fait de cette affaire un enjeu délicat à résoudre. 

La voix haïtienne résonne avec force dans ce débat, rappelant au monde que les séquelles du colonialisme ne sont pas simplement des vestiges du passé, mais des réalités vécues qui continuent d’influencer le présent et l’avenir d’un peuple en quête de justice et d’équité. 

2. Niger: les entourloupes US pour rester 

Les États-Unis ont informé le gouvernement du Niger vendredi qu’ils acceptaient leur demande de retirer les troupes américaines de ce pays d’Afrique de l’Ouest, ont déclaré trois responsables américains, une décision à laquelle l’administration Biden s’était opposée et qui transformera la position de Washington en matière de contrôle de la région. 

L’accord marquera la fin d’une présence de plus de 1000 soldats américains et remettra en question le statut d’une base aérienne américaine de 110 millions de dollars qui n’a que six ans d’existence. C’est le point culminant du coup de force militaire qui a déclaré « illégale » la présence militaire américaine dans le pays. 

« Le Premier ministre nous a demandé de retirer les troupes américaines et nous avons accepté de le faire », a déclaré un haut fonctionnaire du département d’État lors d’une interview accordée au Washington Post. Ce fonctionnaire, comme d’autres, a parlé sous le couvert de l’anonymat pour évoquer cette délicate situation. 

La décision a été scellée lors d’une réunion qui s’est tenue vendredi entre le secrétaire d’État adjoint Kurt Campbell et le Premier ministre du Niger, Ali Lamine Zeine ». 

La base de drones américaine au Niger est utilisée par le Pentagone et la CIA pour garder le contrôle de Daech dans la région. 

Les troupes américaines vont-elles vraiment quitter le Niger ? 

Bien sûr qu’ils seront mis à la porte, mais visiblement, ils veulent gagner du temps. 

Car il est évident que les États-Unis veulent retarder la question aussi longtemps que possible. Et cela est visible dans leurs discours politiques. 

« Nous avons convenu d’entamer des conversations dans les jours qui viennent sur la manière d’élaborer un plan de retrait des troupes », a déclaré le haut fonctionnaire du département d’État américain. « Ils ont accepté que nous le fassions de manière ordonnée et responsable. Nous devrons probablement envoyer des représentants à Niamey pour discuter de tout cela. Il s’agira bien sûr d’un projet du ministère de la Défense ». 

« Nous avons convenu d’entamer des consultations » que les États-Unis veulent continuer de discuter afin de ne pas retirer tout de suite les troupes du pays. 

« Sur la manière d’élaborer un plan » de retrait, histoire de gagner du temps, comme pour le retrait des troupes militaires français du Mali, lorsqu’ils avaient pris le temps de mettre en place une mise en scène macabre avec le charnier en novembre 2023 à Kidal, accusant les militaires maliens d’être les responsables de ce charnier. 

Lorsque les États-Unis annoncent vouloir retirer leurs troupes « de manière ordonnée et responsable », cela veut dire que cela se fera donc sans pression ou de date limite, mais cela sous-entend également qu’il y aura beaucoup de retards et les équipes changeront constamment. 

Les États-Unis ont déjà interrompu leur coopération en matière de sécurité avec le Niger, limitant les activités américaines, y compris les vols de drones non armés. Mais des militaires américains sont tout de même restés dans le pays, incapables de s’acquitter de leurs responsabilités et se sentant laisser dans l’ignorance par les dirigeants de l’ambassade des États-Unis alors que des négociations se poursuivent, selon une récente plainte déposée par un lanceur d’alerte. 

Depuis, d’autres manifestations ont eu lieu au Niger pour exiger le départ des troupes américaines. 

« Dans la ville d’Agadez, où se trouve une base aérienne américaine, des milliers de manifestants se sont rassemblés pour demander le départ des forces américaines. 

Les manifestations ont été organisées par une coalition de groupes de la société civile qui soutiennent leur gouvernement depuis son arrivée au pouvoir l’année dernière ». 

Pour les souverainistes nigériens, le départ des forces américaines est une affirmation de l’autodétermination nationale et un pas vers la reprise en main de leur destinée sécuritaire. Ils considèrent cette évolution comme une opportunité de redéfinir les termes de la coopération internationale, en favorisant une approche qui respecte davantage les prérogatives et la volonté de l’État nigérien. 

Le retrait américain s’inscrit dans un contexte où le Niger, comme d’autres pays du Sahel, cherche à diversifier ses partenariats et à renforcer ses propres capacités militaires et institutionnelles. L’espoir est de construire une stratégie de sécurité plus autonome, ancrée dans la réalité locale et moins dépendante de l’assistance extérieure. 

Le départ des troupes américaines représente donc pour le Niger une page à tourner, mais aussi un défi à relever. Il est impératif que le gouvernement nigérien et la société civile saisissent cette occasion pour repenser leur modèle de sécurité nationale, tout en œuvrant pour une stabilité régionale qui bénéficiera à l’ensemble des pays du Sahel et à leurs populations. 

3. Mali : entre aide extérieure et exploitation souveraine des ressources naturelles

Le Mali, pays riche en ressources naturelles, se trouve à la croisée des chemins dans son parcours de développement économique. Si l’aide extérieure a longtemps été perçue comme un levier de croissance, au sein de ce peuple souverainiste des questionnements apparaissent concernant la réelle nécessité de ces aides au regard du potentiel intrinsèque du pays. 

Car oui, récemment, l’État malien a sécurisé un financement de la Banque mondiale d’environ 37 milliards de FCFA destiné à soutenir l’entreprise d’électricité EDM SA. Cet apport financier vise à améliorer les infrastructures et la fourniture d’électricité dans le pays, un prérequis essentiel pour le développement économique et social. Cependant, les critiques souverainistes s’interrogent sur la pertinence de dépendre de l’aide internationale pour des secteurs aussi vitaux, et plaident pour une appropriation nationale des solutions de développement. 

Car tout le monde le sait, le potentiel minier du Mali est immense, avec notamment des gisements d’or considérables. Mais des failles existent dans l’exploitation de ces richesses. Le code minier en place est souvent pointé du doigt comme étant un vecteur de spoliation des Maliens, ne leur permettant pas de profiter pleinement des bénéfices de leurs ressources naturelles. Les critiques dénoncent des accords et des cadres réglementaires qui favorisent davantage les sociétés minières étrangères au détriment de l’économie locale et des communautés. Car rappelons-le, les entreprises étrangères exploitant l’or malien sont nombreuses.  

Parmi les acteurs majeurs, on trouve, Barrick Gold, une société canadienne qui est l’un des plus grands producteurs d’or au monde et opère notamment la mine d’or de Loulo-Gounkoto au Mali. 

Il y a aussi B2Gold, également basée au Canada, qui est active dans l’exploitation de la mine d’or de Fekola. 

Resolute Mining, une société minière australienne, impliquée dans l’exploitation de la mine d’or de Syama. 

Hummingbird Resources, une entreprise britannique qui opère la mine d’or de Yanfolila. 

Ces entreprises gèrent la majorité des mines d’or actives du pays. La gestion et les conditions de ces opérations minières sont régies par le fameux code minier du Mali, qui fait l’objet de débats, notamment en termes d’équité et d’impact sur le développement économique du pays. 

Le cours de l’or a dépassé, ce vendredi 12 avril 2024, les 2 400 $ US l’once. Un record historique. Malheureusement et comme toujours, le Mali du sous-sol dont on extrait d’énormes quantités chaque année ne bénéficiera que de retombées marginales. 

Le gros des bénéfices ira dans les poches de ces multinationales occidentales. Par son code minier, l’État reçoit 10 % de royalties (parts gratuites versées pour l’exploitation des terres) et se bride à acheter au maximum 20 % des actions. Ensuite dans le code minier, il est demandé aux multinationales de verser 5 % de leurs revenus dans les localités où elles opèrent et il est convenu d’appeler cela pompeusement le contenu local en fait issu du pillage organisé légalement des ressources du sous-sol. 

À part Dieu et les multinationales, aucun Malien ne sait exactement quel est le montant réel de ces 5 %, car ces sociétés soi-disant » partenaires » ne présentent à l’État malien qu’une fraction, soit 1/5ème ou tout au plus 1/4 de leurs bénéfices.  

Ces multinationales invitées aux pillages des ressources nationales investissent généralement très peu de leurs capitaux fixes. Il leur suffit de venir obtenir des permis, les amener en bourse pour récolter les fonds qui leur sont indispensables, pareilles entreprises étant toujours super juteuses. Qu’apportent-elles qui ne peut être apporté localement ? 

Les engins ? Ils sont tous en vente libre. Les ingénieurs en mines, ce n’est pas eux qui font défaut. Une fois les multinationales installées, la main d’œuvre ainsi que les cols blancs recrutés locaux perçoivent des salaires de misère qui ne peuvent être comparés à ceux perçus par les expats. 

La question soulevée est donc la suivante : le Mali, avec son abondance en ressources naturelles, a-t-il réellement besoin d’aides extérieures pour son développement ? Les souverainistes argumentent que le Mali pourrait largement se passer de l’aide extérieure si les ressources étaient exploitées de manière juste et bénéfique pour la population. Ils préconisent une révision des codes miniers pour assurer que la richesse générée par le secteur minier serve d’abord les intérêts du peuple malien, avant ceux des investisseurs étrangers. 

Cela impliquerait de renégocier les contrats miniers, de renforcer les capacités des institutions nationales de gouvernance des ressources, et de mettre en place une politique économique qui canalise les recettes minières vers des investissements structurants et des projets de développement durable.  

Ce qui permettrait également au Mali de sortir du franc CFA et de battre sa propre monnaie arrimée cette fois-ci à ses propres ressources naturelles et rendrait l’indépendance économique du Mali. 

L’indépendance économique et la maîtrise du développement constituent le cœur même de cette vision souverainiste. Elle suggère que, plutôt que de s’appuyer principalement sur l’aide internationale, le Mali devrait prioriser une mobilisation de ses ressources intérieures et une meilleure répartition des bénéfices issus de ses richesses naturelles. 

En définitive, le débat ne se limite pas à un choix binaire entre aide extérieure et autonomie. Il s’agit plutôt de trouver le juste équilibre permettant d’assurer un développement endogène, inclusif et durable pour le Mali, où la valorisation des ressources internes et la coopération internationale équitable vont de pair pour le progrès de tous les Maliens. 

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SOURCE: FRENCH PRESS TV