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Zoom Afrique du 6 janvier 2023

Environ 30 000 tirailleurs africains sont morts sur les champs de bataille de la Première Guerre mondiale. (Photo par l'AFP)

Les titres de la rédaction :

  • Ouganda : La liaison ferroviaire Kampala-Malaba sera achevée en février 2023
  • La CEDEAO ne sanctionnera pas le Mali
  • Le Sénégal souhaite investir plus de 806 millions de dollars dans un programme d'investissement régional d'ici 2025.
  • Tchad : Onze officiers de l'armée accusés de tentative de coup d'État

Les analyses de la rédaction :

1. Les tirailleurs sénégalais, une histoire méconnue et des héros mis de côté

À l'occasion de la sortie du film "Tirailleurs", avec Omar Sy, mercredi, le gouvernement français a annoncé que les derniers tirailleurs sénégalais pourront retourner dans leur pays d'origine, sans perdre le bénéfice de la pension du minimum vieillesse. 

Plus de 100 000 d'entre eux ont participé aux combats de la Seconde Guerre mondiale. Mais étrangement, l'histoire française les a rendus invisibles. Pourtant, de nombreux "tirailleurs sénégalais" sont morts au front. Même face à l'ennemi, le sort de ces soldats noirs était différent de celui des Blancs. Ces derniers sont capturés et envoyés en Allemagne, tandis que certains des premiers sont massacrés, d'autres sont faits prisonniers dans des camps en France. 

En décembre 1944, au Sénégal, des tirailleurs rentrant chez eux ont été massacrés dans le camp militaire de Thiaroye, où ils manifestaient pour réclamer le paiement de la solde qui leur était due pendant leurs années de captivité. Les troupes coloniales et les gendarmes français sont accusés d'avoir causé des dizaines de morts. Les historiens évoquent même des centaines de victimes. 

Ces récits reflètent la grande histoire des tirailleurs sénégalais, pendant la Seconde mais aussi la Première Guerre mondiale. Car au moment de la Libération de la France en 1945, ces soldats ont été mis de côté, comme s'ils n'avaient pas participé à la victoire française. Cela était dû, notamment, à la volonté des États-Unis qui, en pleine période ségrégationniste, ont participé à la Libération et ont refusé de défiler aux côtés des soldats noirs. 

Huit décennies plus tard, un nouveau film met en lumière ces soldats de l'ombre. Dans "Tirailleurs", Omar Sy et les autres acteurs revisitent l'histoire des Tirailleurs sénégalais pendant la Première Guerre mondiale. Un corps de soldats qui faisait partie des troupes coloniales de la fin des années 1800. Une unité qui comprenait, comme son nom l'indique, des Sénégalais mais aussi d'autres Africains. 

Pendant la Première Guerre mondiale, près de 200 000 tirailleurs ont défendu les couleurs de la France, dont les trois quarts sur le continent européen. On estime à 30 000 le nombre de soldats perdus dans cette unité. Sans compter les soldats qui sont revenus blessés. 

Le film de Mathieu Vadepied, coproduit par Omar Sy, est un hommage à ces tirailleurs sénégalais. La sortie du film - et surtout la promotion qui l'a entouré - a conduit le ministère français de la Solidarité à annoncer une mesure concernant les derniers tirailleurs sénégalais. Ils pourront retourner dans leur pays d'origine tout en continuant à bénéficier de la pension minimale de vieillesse. Une mesure symbolique : selon les caisses d'allocations familiales françaises, 22 d'entre eux sont encore concernés. 

Une reconnaissance tardive pour eux. Surtout quand on sait les sacrifices qu'ils ont consentis. Comme le 16 avril 1917. Dans le secteur du Chemin des Dames, à Hurtebise, Laffaux et Vauxaillon, la bataille fait rage. Les tirailleurs sénégalais, forts d'environ 15 000 hommes, composant la première ligne de combattants. La moitié d’entre eux trouvera la mort. Le député du Sénégal Blaise Diagne, à l’Assemblée nationale, avait accusé les généraux français d’avoir utilisé les tirailleurs comme de « la chair à canon ». 

Pourtant, beaucoup de polémique tourne autour de ce film et de ses acteurs. 

Quatre jeunes hommes originaires d’Afrique, arrivés en France il y a plusieurs années, seraient sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF). En 2021, ils avaient participé dans les Ardennes au tournage du film « Tirailleurs » aux côtés de l’acteur français. 

Leur visage s’affiche dans toutes les salles de cinéma de France, mais ils pourraient être bientôt expulsés du pays. Selon l’antenne locale du collectif Réseau éducation sans frontières (RESF) des Ardennes, quatre jeunes qui ont participé au tournage du film « Tirailleurs » avec Omar Sy, en 2021, après avoir été choisis lors d’un casting, sont désormais sous le coup d’une Obligation de quitter le territoire français (OQTF). 

Certains figurants ont ainsi été reçu. « Tragique ironie de l’histoire, et de l’Histoire : ceux, qui par leur participation au film avaient permis de rappeler l’ingratitude de la République française vis-à-vis de ceux qui ont dû combattre pour elle, sont aujourd’hui les victimes de ce qu’on peut considérer comme une autre forme d’ingratitude », dénonce RESF dans un communiqué signé du collectif ardennais pour la défense des jeunes majeurs étrangers. 

Pour RESF, « ils se sont pliés à tout ce qui était nécessaire à leur intégration dans la société (dont la maîtrise du français) et à leur contribution à l’économie française, en réussissant leur parcours de formation ». C’est notamment pourquoi ils auraient fait appel de la décision des services de l’État. 

« Malgré cela, les services de la préfecture des Ardennes ont considéré que ces jeunes n’avaient pas légitimité à rester en France et ont délivré ces OQTF, privant des entreprises de leur main-d’œuvre, dans un département démographiquement affaibli », écrit le communiqué. « D’autant plus qu’ils viennent de la même région d’Afrique que les tirailleurs et la famille d’Omar Sy », ajoute cette membre de RESF Ardennes. 

Quant à Omar Sy, le héros du film, s'étonne que les Français se sentent plus touchés par la guerre en Ukraine que par d'autres conflits plus lointains. 

Heureux que le film 'Tirailleurs' "apaise" et aille "vers la réconciliation", l'acteur qui vit aujourd'hui aux États-Unis estime qu'aujourd'hui, les choses bougent enfin. "Ces récits-là vont sortir de sous le tapis". 

"Il faut accepter le récit des autres. Un récit ne contredit pas l’autre, ne l’annule pas, ne le nie pas. C’est l’addition de tous ces récits qui fait notre histoire commune". 

On estime que les 180.000 tirailleurs sénégalais engagés dans la guerre de 14-18, 30.000 ont été tués. 

Interrogé sur une guerre plus proche, celle de l'Ukraine, Omar Sy s'étonne que les gens se sentent plus touchés par ce conflit que par ceux qui se déroulent en Afrique. 

"Je suis surpris que les gens soient si atteints. Ça veut dire que quand c’est en Afrique vous êtes moins atteints ?" 

"Moi, je me sens menacé de la même manière quand c’est en Iran, ou en Ukraine", assure-t-il. "Une guerre, c’est l’humanité qui sombre, même quand c’est à l’autre bout du monde", souligne-t-il. 

"Quand c’est loin, on se dit que 'là-bas, ce sont des sauvages, nous, on ne fait plus ça'. Comme le Covid, au début, on a dit : 'c’est que les Chinois'". 

"On se rappelle que l’homme est capable d’envahir, d’attaquer des civils, des enfants. On a l’impression qu’il faut attendre l’Ukraine pour s’en rendre compte", ajoute-t-il. 

Des propos qui ont versé beaucoup d’encre au pays des défenseurs des droits de l’Homme. Pourtant, les paroles de cet acteur reflètent un côté humaniste, les médias français s’acharnent encore une fois sur une personnalité pour masquer ses propos, qui ne sont pourtant pas loin d’une réalité. Est-ce réellement les propos de l’acteur qui dérange ou est-ce la sortie de ce film, en pleine période où la France perd du terrain en Afrique face aux Africains, qui dérange ? 

2. Burkina: la France se retire ! 

Les jours sont comptés pour la force opérationnelle Sabre, qui s'apprête à quitter le Burkina Faso d'ici février 2023. En plus de ce départ, l'ambassadeur de France à Ouagadougou, Luc Hallade, a été prié de quitter le pays. Les autorités de la transition au Burkina Faso ont demandé à Paris de remplacer le diplomate. 

Les relations France-Burkina : La débâcle française se poursuit à Ouagadougou avec le retrait de ses troupes et de son ambassadeur 

Ce qui n'était qu'une possibilité il y a quelques mois suite à la prise du pouvoir par les militaires dirigés par Ibrahim Traoré est désormais une réalité. En effet, un éventuel retrait de la force Sabre avait été évoqué par le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu en novembre 2022. C'est désormais un fait au début de l'année 2023, selon Africa Intelligence. 

Un tournant décisif dans les relations entre le Burkina Faso et la France a été pris. Les 400 éléments des unités spéciales quitteront le Burkina Faso en février, selon le journal. Paris a également pris acte du départ de son ambassadeur Luc Hallade, selon la même source. 

Il faut noter que le Burkina Faso n'a plus confiance en l'ambassadeur français Luc Hallade. Le pays demande depuis une quinzaine de jours aux autorités françaises de le remplacer. Une lettre datée du 20 décembre 2022 a été envoyée au Quai d'Orsay en ce sens. "Il s'agit d'une crise de confiance. Ce n'est pas la fin de la relation diplomatique, mais c'est l'interlocuteur qu'on demande simplement de changer", a déclaré une source proche du dossier à l'Agence d'information du Burkina. 

Des milliers de jeunes Burkinabè réclament depuis des mois le démantèlement de la base française de Kamboinsin où était stationnée la Force Sabre et le départ de l'ambassadeur de France au Burkina, Luc Hallade. 

En effet, beaucoup de ceux qui ont exigé le départ de la France du pays ne comprennent pas que malgré sa présence, c'est la même France qui peint toute la carte du Burkina en rouge, en somme pour dire que la présence de ses forces spéciales est inutile et qu'elle n'est pas là pour aider. 

Mais ce qu'il faut savoir, c'est que les nouvelles autorités de transition du Burkina, dirigées par le capitaine Ibrahim Traoré, ont été réticentes à accepter le soutien opérationnel de Paris. Certains observateurs y voient un possible rapprochement avec la Russie, à l'instar du Mali et de la République centrafricaine, qui se sont déjà tournés vers la Russie. La question que l'on peut se poser est de savoir si le Burkina souhaite changer la force opérationnelle Sabre contre la Russie. Reste qu'avec ce retrait, l'influence de Paris sur le continent est de plus en plus réduite. 

Par ailleurs, la militante panafricaniste Nathalie Yamb, engagée pour une Afrique libérée de toute tutelle, a annoncé de nouvelles victoires pour l'Afrique dans son combat contre la politique française sur le continent. 

Elle se réjouit déjà de la décision des autorités burkinabés de demander à la France de rappeler son ambassadeur en poste à Ouagadougou. Pour Nathalie Yamb, c'est une belle victoire pour démarrer cette nouvelle année décisive. 

"Coup d'envoi de 2023 avec une nouvelle victoire d'étape ! Bientôt, le départ de Luc Hallade et de l'opération Sabre. Brique par brique, nous allons déconstruire l'édifice de la Françafrique ! Bravo les enfants ! On avance, on avance !", a réagi celle qui est surnommée La Dame de Sotchi, en référence à son discours virulent contre la France lors du sommet Russie-Afrique de Sotchi en 2019. 

La veille, Nathalie Yamb avait demandé le départ des soldats français de l'opération Barkhane et de l'ambassadeur de France du Burkina Faso. "Mes vœux pour 2023 pour le Burkina Faso : le retour de l'ambassadeur de France Luc Hallade, le départ de l'opération française Sabre, la reconquête de grandes parties du territoire et que chaque Burkinabè puisse manger tous les jours à la fin de la journée", a-t-elle déclaré. 

L'année dernière, la France a interdit à Nathalie Yamb d'entrer sur son territoire. Paris lui reprochait des "propos virulents sur les positions françaises sur le continent africain, susceptibles de favoriser l'entrée de puissances étrangères hostiles à la France sur le continent africain et d'alimenter le développement du ressentiment populaire anti-français en Afrique, mais aussi au sein des diasporas africaines en France". Nathalie Yamb nous a rappelé à plusieurs reprises que ce n'est pas un sentiment " anti-France " qui s'installe en Afrique, mais plutôt un sentiment " pro-Afrique ".

3. Mali: Barkhane accusée d’avoir tué des civils maliens !

La force française Barkhane est accusée d’avoir détenu des citoyens maliens, dans une prison secrète. Si cette information avait été révélée par un média français, il y a un an, elle est confirmée dans un livre paru ce jeudi. Il a été indiqué que ces détentions ont eu lieu en dehors de tout cadre. Et parfois, mort s’en serait suivie. 

Ce sont des dizaines de Maliens qui auraient été enfermés dans une prison tenue secrète, gérée par Barkhane. La Force française aurait installé l’infrastructure au cœur de l’aéroport de Gao, au Nord du Mali. C’est ce qu’a révélé un journal, dans une publication en date de ce mercredi 4 janvier 2023. Le média rappelle que cette information avait été révélée par le journal français Libération, en 2021, mais sans précision. 

C’est après des investigations menées dans ce pays d’Afrique de l’Ouest qu’un journaliste, Rémi Carayol, fait un déballage. Il confirme l’existence d’un lieu aménagé dans l’aile Ouest de l’aéroport de Gao. Ce lieu, indique-t-il dans un livre paru ce jeudi 5 janvier servait à retenir les Maliens suspectés de terrorisme. Ces derniers sont par la suite remis aux autorités locales, précise le journaliste qui couvre l’actualité du Sahel, depuis dix ans. 

« Le Mirage sahélien. La France en guerre en Afrique : Serval, Barkhane et après ? ». Tel est le titre de l’ouvrage qui met en lumière certaines pratiques peu répandues de l’armée française au Mali. Seulement, d’autres révélations faites par l’auteur sont plutôt troublantes. Et on pourrait même penser à des exécutions, tel que l’a rapporté Rémi Carayol. Le chapitre 8 de l’ouvrage de 338 pages, à paraître aux Éditions La Découverte, en dit long. 

« Au Mali, la force Barkhane a tué des innocents. Elle en a également incarcéré dans le plus grand secret : un nombre indéterminé de « suspects » ont été expédiés dans une prison clandestine située à l’intérieur de sa base principale à Gao. Le « château », comme on l’appelle… », est-il écrit, selon un journal qui a consulté ces lignes. 

L’auteur précise que ce lieu de détention n’existe pas officiellement. « Les suspects arrêtés par les soldats français y sont pourtant gardés pendant plusieurs jours. Parfois plusieurs semaines, dans le plus grand secret (peu de militaires y ont accès et le réseau téléphonique est brouillé à l’intérieur). Et ils y sont interrogés, de jour comme de nuit, par des spécialistes du renseignement, avant d’être remis aux autorités maliennes », poursuit Rémi Carayol. 

L’auteur a ajouté que « la Division des droits de l’homme de la Minusma (DDHP) et les associations maliennes de défense des droits humains s’irritent de n’avoir pas accès à ce lieu de détention ». Il a en outre précisé que « plusieurs sources onusiennes m’ont affirmé que les enquêteurs de la DDHP interpellent régulièrement les représentants de la force Barkhane sur ce sujet, lors de réunions à huis clos. En vain ». Des révélations qui en mettront de l’eau au moulin des pro-africains. 

Le 15 août 2022, la Force française Barkhane actait son départ effectif du territoire malien. Un départ annoncé par le Colonel Abdoulaye Maïga, porte-parole du gouvernement malien. Dans un communiqué publié dans la soirée du vendredi 19 août 2022, Bamako évoquait la genèse de ce retrait de Barkhane du Mali.  

Pour rappel, le Mali a demandé au Conseil de sécurité de l'ONU, également le lundi 15 août 2022, une réunion d'urgence pour faire cesser ce qu'il présente comme « les actes d'agression » de la France sous forme de violations de sa souveraineté, de soutien apporté aux groupes terroristes et d'espionnage. Une réunion qui n’a jamais eu lieu et on peut voir maintenant pourquoi. Quoi qu’il en soit, la vérité finie toujours par remonter à la surface.  

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SOURCE: FRENCH PRESS TV