TV
Infos   /   A La Une   /   Europe   /   France   /   L’INFO EN CONTINU

Islamophobie en France : des licenciements controversés au sein de Magellan Partners

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Manifestation à Paris contre l’islamophobie, en avril 2025, en hommage à un musulman tué dans une mosquée. ©AFP

Un article récemment publié par StreetPress, média d’investigation français en ligne, a rapporté que des salariées voilées, au sein du cabinet de conseil en informatique Magellan Partners, ont été licenciées, à la suite de l’adoption d’une clause de neutralité intégrée à son règlement intérieur.

Magellan Partners, importante boîte parisienne de conseil en informatique employant près de 3 000 personnes, a modifié son règlement interne à compter du 1er septembre afin d’y introduire une clause dite de « neutralité ». Celle-ci exige des salariés qu’ils s’abstiennent d’exprimer leurs convictions politiques, religieuses ou philosophiques, que ce soit par leurs propos, leur tenue vestimentaire ou leur comportement sur le lieu de travail.

Selon l’article de StreetPress, l’application de cette nouvelle règle a entraîné le licenciement d’au moins deux salariées portant le voile, ainsi que celui d’une cadre ayant remis en cause la légalité de la mesure. D’autres procédures disciplinaires seraient également en cours.

Léna, chargée de gestion au sein d’Exakis Nelite, l’une des filiales du groupe, a confié à StreetPress qu’après trois années passées dans l’entreprise, elle avait été informée, à la fin du mois de septembre, d’une modification très importante du règlement intérieur.

Le 29 septembre, elle a été convoquée par son directeur régional, qui lui a demandé de retirer son voile, demande qu’elle a refusée. Lors de son entretien préalable au licenciement, le 30 octobre, sa responsable des Ressources humaines (RH) et son supérieur hiérarchique lui ont indiqué que la qualité de son travail n’était pas mise en cause, mais que le port du voile était considéré comme « un signe ostentatoire ». Léna a finalement été licenciée pour « faute » le 20 novembre.

« Je leur ai dit que je n’avais jamais revendiqué que j’étais musulmane, je ne parle même pas de ma religion », a-t-elle déploré.

La mère de trois enfants, qui s’inquiète pour sa perte de revenus, a affirmé : « J’en ai tellement pleuré, ils ont touché à nos valeurs. Ils nous ont montrées du doigt alors qu’on n’a rien demandé ».

« Ça nous a vraiment touchées, psychologiquement et physiquement. Ce qui m’a le plus déçue, c’est que je ne m’y attendais pas. J’ai toujours travaillé avec des entreprises de services numériques et je n’ai jamais eu de souci », a-t-elle ajouté.

Une autre salariée, Marwa, ingénieure en informatique en poste depuis quatre ans chez Magellan Partners, a indiqué avoir été confrontée à une situation similaire.

Selon son témoignage, elle a été informée mi-octobre que la clause de neutralité la concernait également, alors qu’elle était en mission auprès de la banque franco-belge Dexia.

Un mois plus tard, le 13 novembre, elle a été convoquée à son tour. Les Ressources humaines et le directeur régional lui demandent si elle souhaite retirer son voile. Refusant cette demande, elle a été licenciée pour faute le 18 novembre.

« On ne cherche que la neutralité mais où sont la liberté et le respect ? Ils sont en train de jouer avec la loi », a-t-elle déclaré, qualifiant son licenciement de difficile, d’injuste et d’illégal.

Les salariées concernées sont défendues par Me Alexandra Jongis, avocate, qui estime que « ces licenciements sont discriminatoires ». Elle rappelle que « le droit du travail indique que nul ne peut être licencié en raison de ses convictions religieuses ».

« Mes clientes voilées ont été embauchées en toute connaissance de cause. Elles ont exécuté leur contrat de travail à l’entière satisfaction de leur employeur. On ne change pas les règles du jeu en pleine partie », a-t-elle ajouté.

Le média d’investigation français a rapporté que Lisa, responsable de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE), avait été licenciée, le 2 juillet, pour faute après avoir contesté la légalité de cette mesure. Celle-ci affirme avoir alerté la direction sur les risques juridiques liés à la clause de neutralité, rappelant qu’elle ne pouvait légalement s’appliquer qu’à certaines conditions, notamment pour des salariés en contact direct avec des clients.

« Ça me met en colère de savoir qu’ils discriminent des femmes musulmanes. […] Mon rôle est de veiller à la légalité et à l’éthique des politiques », a-t-elle déclaré.

L’article de StreetPress a précisé que Magellan Partners met en avant, dans sa communication, des engagements en faveur de la diversité. Le groupe est signataire de la Charte de la diversité depuis 2019 et membre de l’Association française des managers de la diversité. Pourtant, selon StreetPress, la clause de neutralité n’est pas appliquée de manière uniforme dans toutes les filiales du groupe, notamment à l’étranger.

Le règlement intérieur, signé par le président du groupe Didier Zeitoun, cite l’article L.1321-2-1 du Code du travail, datant de 2016, qui prévoit que les restrictions aux libertés individuelles doivent être « justifiées par les nécessités du bon fonctionnement de l’entreprise » et « proportionnées au but recherché ».

StreetPress a indiqué que Didier Zeitoun, ancien dirigeant du groupe Atos et fondateur de Magellan Partners en 2008, n’a pas répondu aux sollicitations du média, tout comme la directrice des Ressources humaines Anne-Flore Le Gal et le consultant senior Jad Zahab, également secrétaire national de Renaissance « chargé de la laïcité et de la République ».

Magellan Partners a pour clients des entreprises comme Total, AXA, Generali mais aussi la Ville de Paris. Il est également en négociations exclusives pour le rachat d’une filiale du groupe Worldline, spécialisé dans les services de paiement.

 

Partager Cet Article
SOURCE: FRENCH PRESS TV