Les titres de la rédaction :
Les analyses de la rédaction :
1. Thiaroye 1944 : Pour que justice et vérité honorent les tirailleurs sénégalais
Le Sénégal s’apprête à commémorer le 80ᵉ anniversaire du massacre de Thiaroye, un drame qui incarne à la fois l’injustice coloniale et le sacrifice des tirailleurs sénégalais. Ce 1er décembre 1944, des dizaines d’hommes ayant combattu pour la France furent abattus, non sur un champ de bataille, mais au cœur de leur terre natale, pour avoir revendiqué légitimement leurs droits. Ce sombre épisode, longtemps éclipsé des récits historiques, fait aujourd’hui l’objet d’une initiative courageuse : une demande de commission parlementaire française pour en dévoiler toute la vérité.
Cinq députés français, parmi lesquels Dieynaba Diop, une élue socialiste d’origine sénégalaise, ont déposé le 26 novembre une résolution transpartisane à l’Assemblée nationale. Leur objectif est clair : rompre avec le silence historique qui entoure ce massacre et rétablir la dignité de ces soldats africains. « Face à notre passé colonial, il est de notre devoir de rechercher la vérité », a déclaré Mme Diop. Ces mots résonnent avec force dans un contexte où la mémoire coloniale demeure un sujet sensible entre la France et ses anciennes colonies.
Le massacre de Thiaroye est bien plus qu’un événement du passé : il symbolise le mépris et l’injustice auxquels les soldats africains ont longtemps été confrontés. Après avoir risqué leur vie pour libérer la France de l’occupation nazie, ces tirailleurs espéraient une reconnaissance méritée. Au lieu de cela, ils ont été confrontés à la violence pour avoir exigé leurs soldes. Le nombre exact de victimes reste flou, preuve des efforts pour enfouir cet épisode dans l’oubli.
Pour le Sénégal, cet anniversaire est l’occasion de rappeler au monde l’héroïsme de ces hommes, mais aussi l’importance de leur histoire dans la construction de nos nations modernes. Les tirailleurs sénégalais ne furent pas de simples soldats ; ils furent des acteurs essentiels d’une lutte pour la liberté, dont le prix a été payé dans le sang.
La démarche des députés français est une étape cruciale pour une mémoire partagée entre la France et le Sénégal. Faire la lumière sur le massacre de Thiaroye, c’est reconnaître les erreurs du passé, mais aussi rendre hommage à la résilience des populations africaines. Pour le Sénégal, c’est une revendication de longue date qui trouve enfin un écho.
Alors que la France cherche à réviser ses relations avec ses anciennes colonies, ce geste symbolique pourrait renforcer la réconciliation et ouvrir un dialogue apaisé sur les mémoires coloniales. La reconnaissance des faits, l’indemnisation des familles, et une inscription claire de cet événement dans les manuels d’histoire constitueront des étapes décisives pour honorer les tirailleurs sénégalais et leur héritage.
À quelques jours de la commémoration du 80ᵉ anniversaire, le Sénégal appelle non seulement la France, mais aussi la communauté internationale, à se souvenir de Thiaroye. Ce drame transcende les frontières : il nous interpelle sur les injustices liées à la colonisation et sur l’urgence de leur réparation symbolique.
Thiaroye 1944 doit devenir un symbole universel de lutte contre l’oubli et de justice pour les opprimés. En honorant les tirailleurs sénégalais, nous célébrons leur courage et réaffirmons notre engagement envers une histoire commune fondée sur la vérité et la dignité.
2. Rejet de la France en Afrique : une critique politique profonde
Le rejet croissant de la France en Afrique n’est pas qu’un simple « sentiment antifrançais » alimenté par des manipulations étrangères. Une étude approfondie, menée par Tournons la Page et Sciences Po-CERI, dévoile des perceptions complexes et des critiques politiques structurées émanant de plus de 500 activistes africains. Ces réflexions dépassent largement les clichés souvent relayés dans les médias français.
Selon le rapport intitulé « De quoi le rejet de la France est-il le nom ? », le rejet de la politique française en Afrique est « massif et quasi unanime » parmi les militants interrogés. Cependant, ces critiques s’ancrent dans des analyses politiques sérieuses :
- Souveraineté nationale : La domination perçue de la France sur l’économie africaine, à travers le franc CFA ou le contrôle des ressources, est largement dénoncée. Un activiste gabonais souligne : « On est vraiment souverain lorsqu’on gère nos ressources. »
- Inadaptation sécuritaire : 78 % des participants estiment que la France n’est pas un partenaire fiable en matière de sécurité. Contrairement à la Russie, perçue comme plus efficace, Paris est critiquée pour limiter l’armement des armées locales.
- Critiques culturelles et politiques : Les concepts occidentaux, comme la démocratie ou les droits humains, sont parfois jugés inadaptés aux réalités africaines. Un Béninois explique : « Ce n’est pas un rejet des Français, mais d’un système d’ingérence. »
Le rapport met en lumière un décalage profond entre les récits dominants en France et les perceptions des Africains. Les médias français, accusés de biais, sont critiqués pour maintenir un « trop-plein d’attention » sur eux-mêmes, alors que les activistes réclament davantage de respect pour leur autonomie.
Un point de friction majeur réside dans l’hégémonie culturelle. Des participants dénoncent l’influence occidentale dans les médias, les manuels scolaires et même les valeurs sociales. L’étude appelle à une révision des relations franco-africaines, fondée sur l’écoute et le respect mutuel. Ce « nouveau souverainisme », qui ne rejette pas les citoyens français, mais critique un système perçu comme oppressif, invite la France à adopter une posture plus humble.
Le rejet de la France en Afrique n’est donc pas une simple rébellion irrationnelle, mais bien l’expression d’une quête de souveraineté, de justice économique et d’une gouvernance mieux adaptée aux réalités locales.
3. Pour Emmanuel Macron, les Haïtiens sont « complètement cons » et ont tué « Haïti » !
Emmanuel Macron affirme que les « Haïtiens sont complètement cons », qu’« ils ont tué Haïti », en référence à la décision du conseil présidentiel de transition haïtien de mettre fin au mandat de Premier ministre de Garry Conille. Le président français manque sans doute de culture historique, sans quoi il n’aurait jamais pu affirmer cela.
Emmanuel Macron n’est sans doute pas au courant qu’Haïti est une ancienne colonie française, qui a pris son indépendance en 1804, suite à une révolte d’esclaves contre les colons français. Haïti fut l’un des premiers peuples colonisés de la planète à devenir indépendants. Une vingtaine d’années plus tard, en 1825, Charles X, roi de France, envoie une flotte pour reprendre le contrôle d’Haïti. Pour éviter la guerre et une nouvelle domination coloniale, les Haïtien(ne)s se voient imposer une dette de 150 millions de francs, une somme absolument gigantesque, équivalente à 10 années de recette fiscale.
Pendant des décennies – et plus d’un siècle en tout – Haïti a remboursé cette rançon de l’indépendance, s’endettant encore et encore pour rembourser les échéances, payant donc de nouveaux intérêts et ainsi de suite. Pendant ce temps-là, l’État manquait d’argent pour investir dans le développement autonome du pays et s’est retrouvé sous la dépendance de créanciers qui imposaient des taux d’intérêt faramineux et des conditionnalités politiques néolibérales.
Si Haïti est dans la situation chaotique dans laquelle elle est aujourd’hui, c’est à cause du colonialisme, de l’impérialisme occidental. À cause du colonialisme français qui s’est matérialisé sous forme d’une dette odieuse qui a littéralement empêché Haïti de se développer. À cause de l’impérialisme étasunien qui a, par exemple, déployé 550 militaires dans le pays dans les années 2010 sans aucun résultat, bien au contraire. Rappelons que les États-Unis ont occupé Haïti de 1914 à 1935.
Alors qu’Haïti aurait besoin de réparation de la part de la France, d’annulation de sa dette qui est évidemment illégitime – la seule réponse donnée par l’Occident a été l’envoi de forces armées. Face à la violence des gangs et à la pauvreté de masse, la seule réponse apportée est la force, là où il faudrait de la justice économique et une amélioration des conditions de vie de la population qui arrangerait petit à petit la situation.
En prononçant ces propos, Emmanuel Macron s’est couvert de honte. Il a montré en deux phrases –et ce n’est pas la première fois– l’étendue de son mépris, de son racisme et de son arrogance coloniale.
Il est temps que la France reconnaisse le rôle majeur qu’elle a joué et qu’elle continue de jouer, par son ingérence, dans la situation actuelle d’Haïti. Il faut qu’elle accède aux revendications légitimes du peuple haïtien en rapport avec le remboursement de la rançon de l’indépendance pour arriver à l’autodétermination du pays.