Par Wesam Bahrani
La décision des États-Unis de lancer les travaux de construction d'un « système portuaire » au large de Gaza pour « fournir une aide à la population affamée de Gaza » peut apparaître pour beaucoup comme un geste humanitaire.
La jetée américaine serait en mesure de recevoir d'importantes cargaisons transportant de la nourriture, de l'eau, des médicaments et des abris temporaires, s'est vanté le président américain, Joe Biden, lors de son discours sur l'état de l'Union la semaine dernière.
Selon le Pentagone, le projet de construction du port militaire flottant prendra jusqu'à 60 jours, et plus de 1 000 soldats américains seront engagés dans ce projet ambitieux.
Les observateurs ont cependant exprimé à juste titre leur scepticisme quant à l’objectif de ce système portuaire américain, et ils ont tout à fait raison de croire que le Pentagone envisage d’établir une base militaire à côté de la bande bloquée.
Il est important de souligner les raisons pour lesquelles cela est plus important qu’il n’y paraît.
Biden a passé la majeure partie des six derniers mois à cracher un mensonge après l’autre sur le génocide de Gaza et sous-estimé littéralement l’intelligence des gens.
Ce n’est un secret pour personne que Gaza dispose d’un port dont Tel-Aviv a interdit l’exploitation depuis 2007.
Sur le plan intérieur, l’opération militaire pourrait influencer l’opinion publique. Les sondages montrent qu'un nombre croissant d'Américains prennent conscience du fait que des bombes de fabrication américaine sont larguées sur des enfants palestiniens à Gaza, tuant près de 14 000 d'entre eux et rendant orphelins quelque 20 000 autres.
À l’approche des élections, la popularité de Biden a chuté jusqu’à atteindre des niveaux record. Le président américain est désormais impatient de se présenter devant le public américain sous une forme de défenseur des droits humains.
Il semble désormais plus probable que les intérêts américains résident dans la conclusion d’un cessez-le-feu dans le territoire palestinien assiégé « avant l’arrivée des élections américaines ».
Même les appels à un cessez-le-feu de Biden (hypocrites) n’ont pas été programmés sur des normes éthiques, juridiques ou humanitaires, mais basés sur les intérêts électoraux américains et les intérêts israéliens sur le terrain.
Les États-Unis n’ont pas réussi à acheminer l’aide à Gaza par voie terrestre, alors qu’ils auraient pu le faire. Ils ont plutôt choisi de larguer des colis d’aide depuis des avions, une démonstration éhontée qui a déclenché une énorme réaction de la part des agences humanitaires.
Non seulement parce que le coup de publicité n’était qu’une « goutte d’eau dans l’Océan » de ce dont Gaza avait besoin, mais aussi parce que Washington avait été averti que les largages aériens étaient dangereux et pouvaient tuer des Palestiniens. Ce qu’ils ont fait.
Les États-Unis en sont certainement capables et disposent de tous les moyens politiques et militaires pour mettre fin au génocide à Gaza. L'utilisation par Washington de son droit de veto pour permettre et alimenter le génocide fait de Washington non seulement un complice principal du génocide palestinien, mais également un cerveau et un architecte clé [de ce génocide].
Les États-Unis sont-ils vraiment incapables de faire pression ou d’exiger du régime israélien qu’il ouvre les quatre postes frontaliers pour fournir une aide suffisante aux 2,3 millions de Palestiniens affamés à Gaza ?
Comme cela devient de plus en plus clair, la famine à Gaza est imminente. Et cela a déjà fait des victimes.
Pourquoi les États-Unis, en tant que cerveau principal, n’adhèrent-ils pas à la décision intérimaire de la Cour internationale de Justice, qui exigeait que l’occupation israélienne prenne toutes les mesures pour empêcher le génocide et la mort par famine ?
Pourquoi les États-Unis n’arrêtent-ils pas leurs exportations d’armes vers le régime de Tel-Aviv qui sont utilisées contre des civils palestiniens innocents à Gaza – tuant déjà près de 32 000 d’entre eux au cours des cinq derniers mois ?
Ces questions, sans réponses, suffisent à dénoncer la tromperie et l'hypocrisie de l'administration de Joe Biden concernant l'aide à Gaza et les véritables objectifs du port prévu.
Envoyer de l'aide à Gaza ne nécessite pas 60 jours, mais planifier un port pour établir une nouvelle base navale militaire américaine dans la région nécessiterait 60 jours.
L’Amérique disposera d’une nouvelle base militaire sur les côtes de Gaza, non loin du Liban et à 400 kilomètres de la base russe de Hmeimim. Mais qu’attend l’Amérique de ce port flottant ?
La protection de son régime mandataire à Tel-Aviv et de ses partisans dans la région est en tête de son ordre du jour.
Si les pressions ont augmenté sur le Hamas pour qu’il accepte les conditions de cessez-le-feu israéliennes et que les Américains aident l’armée israélienne pour l’éventuelle invasion de Rafah ; cela envoie aussi un message au Hezbollah, à l’Iran et au monde arabe. Dans le cas où la guerre se déplacerait du berceau palestinien vers la région, les États-Unis et leurs alliés envisagent d’utiliser le « port flottant » pour transporter les habitants de Gaza vers d’autres pays ou régions.
Les preuves sur le terrain suggèrent que cette base militaire américaine, une fois construite, ne survivra peut-être pas trop longtemps. Si les États-Unis sont capables de construire une base militaire au large de Gaza, l’Axe de la Résistance est également capable de la couler.
Les tactiques utilisées actuellement par la Résistance à Gaza, qui envisagent une guerre d’usure, sont basées sur la mise en place d’embuscades et la coordination avec le Jihad islamique de la Palestine ainsi qu’avec d’autres groupes de résistance plus petits opérant dans la bande côtière.