Par Xavier Villar
Près de 100 Palestiniens ont été tués par le régime israélien lors de ses attaques génocidaires contre Rafah dimanche soir, avant même l'offensive terrestre prévue contre la ville du sud de Gaza.
Le groupe de résistance palestinien, Hamas, a condamné le dernier bombardement aérien sur la ville surpeuplée, affirmant que l'agression israélienne représente une « expansion de la portée des massacres qu'il[Israël] commet contre notre peuple ».
Rafah est située à environ 30 km de la ville de Gaza, où plus de la moitié des 2,3 millions d’habitants du territoire assiégé ont été déplacés et passent des nuits froides dans les rues.
La grande majorité de ces réfugiés, des personnes déplacées à l’intérieur du pays (PDI), sont prises au piège entre la pression génocidaire du régime israélien et la collaboration du gouvernement égyptien.
L'escalade de la violence à Rafah, la ville la plus méridionale de Gaza, survient alors que le bilan des morts de la guerre génocidaire israélienne sur le territoire a dépassé les 28 000 personnes, pour la plupart des femmes et des enfants.
La décision de Benjamin Netanyahu de lancer une invasion terrestre sur Rafah fait suite à des semaines de négociations de cessez-le-feu qui n’ont jusqu’à présent pas abouti, le régime cherchant à laisser la porte ouverte aux hostilités, contrairement à l’offre de la Résistance palestinienne de cessation complète de ses opérations.
Comme prévu, quelques heures après que le Hamas a annoncé son propre plan, il a été rejeté à la fois par les États-Unis et le régime de Tel-Aviv, soulignant leur intention de saboter toute tentative menant à la fin de la guerre.
Il est évident que le régime israélien souhaite que le génocide continue de faire rage, malgré le tollé général. Il sait que la Résistance palestinienne a le dessus et bénéficie de la bonne volonté du public.
Le ministre israélien des Affaires militaires, Yoav Gallant, a reconnu publiquement que « la guerre est loin d'être terminée », tandis que le Premier ministre Netanyahu, après avoir rencontré le secrétaire d'État américain Antony Blinken, a fait ces remarques : « Nous devons mettre fin à la guerre par une victoire éclatante, et ce n'est qu'une question de temps. Notre armée avance systématiquement et nous lui avons ordonné de se concentrer sur Rafah. »
Les raisons expliquant cette nouvelle phase du génocide en Palestine, notamment l’invasion planifiée de Rafah, sont nombreuses. Premièrement, Israël considère ses horribles crimes à Rafah comme une « victoire » symbolique contre un potentiel cessez-le-feu qui pourrait le forcer à céder à la Résistance palestinienne.
Deuxièmement, Israël souhaite créer de nouvelles réalités sur le terrain pour renforcer sa position de négociation dans les futurs pourparlers de cessez-le-feu, d’autant plus qu’il a été clairement mis en retrait depuis le 7 octobre. Autrement dit, le Hamas a fait de la protection des civils une exigence clé dans toute négociation de cessez-le-feu : cessation des hostilités, fourniture de logements temporaires, levée du blocus, retrait des zones peuplées, puis des autres zones, etc.
Israël a tenté de briser le lien entre le peuple palestinien et le Hamas, pourtant il reconnaît l'existence d'un tel lien et le fait que le Hamas est le véritable représentant du peuple palestinien.
Cela contredit le discours libéral qui considère le groupe de résistance palestinien comme une « milice ». Dans le même temps, l’Autorité palestinienne est utilisée comme exemple de « puissance non conflictuelle ».
Selon ce récit, l’Autorité palestinienne est considérée comme un indigène obéissant qui ne juge pas nécessaire de contrarier l’occupant colonial et collabore même avec cette puissance coloniale pour réprimer toute tentative de démantèlement du statu quo dont elle fait partie.
Pour les Palestiniens impliqués dans la lutte anticoloniale contre Israël, l’Autorité palestinienne (AP) manque de légitimité et ne peut être considérée comme le représentant du peuple palestinien.
Même pour Israël, l’AP n’a aucune pertinence en raison de son manque de soutien en Palestine et de son incapacité à faire respecter « l’ordre colonial » dans les territoires palestiniens. De ce point de vue, les actions du Hamas le 7 octobre ont définitivement démontré l'inutilité de l'Autorité palestinienne dans le contexte colonial palestinien.
Pour en revenir à l’offensive du régime israélien à Rafah, cela fait partie de son plan réel : occuper tout le territoire de la bande de Gaza et expulser sa population indigène, à l’image de ce qui s’est passé en 1948 lors de la Nakba.
Les récentes déclarations des autorités sionistes, selon lesquelles « le retour des Palestiniens expulsés vers la zone nord de Gaza ne sera pas autorisé », mettent en évidence clairement la politique coloniale d'occupation et de colonisation ultérieure.
Le discours selon lequel le régime lutte contre le Hamas à Gaza, et non contre les Palestiniens, ne prend pas en compte les dimensions historico-politiques du sionisme compris comme un colonialisme de peuplement.
Le Hamas n’a été ni vaincu ni affaibli. En fait, le groupe a consolidé sa présence dans la ville de Gaza et ses environs, selon divers médias locaux, démystifiant la propagande sioniste selon laquelle le groupe avait été démantelé dans cette zone.
Le groupe de résistance lui-même a annoncé que sa branche armée, les Brigades Al-Qassam, n'avait pas cessé ses opérations contre l'occupation dans le nord depuis le début de l'assaut terrestre et avait continué à tirer des roquettes malgré les efforts d'Israël pour supprimer les capacités militaires de la Résistance.
La volonté de colonisation, ainsi que l’intention génocidaire, sont ce qui propulse toutes les actions sionistes en Palestine, même avant sa création en 1948.
Le siège actuel de Rafah fait partie du plan d’occupation et d’expulsion. C’est dans le cadre de la lutte de résistance anticoloniale que nous devons comprendre et appréhender les actions du Hamas et du reste des groupes de résistance palestinienne.
Toutefois, comme toutes ses autres actions, l’offensive génocidaire contre Rafah est également vouée à l’échec et provoquera l’effet inverse.
Xavier Villar est docteur en études islamiques et chercheur basé en Espagne.
(Les opinions exprimées dans cet article ne reflètent pas nécessairement celles de Press TV)