Des Nigériens se sont rassemblés une nouvelle fois devant une base militaire française à Niamey. Des milliers de jeunes ont exigé le départ des 1500 soldats français présents sur leur sol. Alors que les relations entre Paris et Niamey sont au point mort depuis le coup d’État contre Mohamed Bazoum le 26 juillet.
« On ne veut pas de la France aujourd’hui, on ne veut pas de la France demain. Ils n’ont qu’à laisser notre pays tranquille », a affirmé Nour al-Assane, chauffeur nigérien venu protester devant les portes d’une base aérienne qui abrite une partie du contingent français, près de l’aéroport de la capitale Niamey.
« Les gens disent toujours que nous, les Africains, sommes les derniers au monde. Mais nous leur demandons de partir et ils refusent. Ils pourrissent là-bas, et nous ne leur donnerons la paix que le jour où ils partiront », a déclaré Ahya Garba, un manifestant.
Ibrahim, un autre manifestant semble donner carte blanche aux militaires. « Le Niger a été sous une dictature pendant douze ans. Le Niger ne va pas bien, donc nous voulons que Tiani remette le pays sur les rails, donc nous ne nous soucions pas de la transition. Nous voulons qu’il continue son travail, le bon travail pour le Niger ».
Les généraux au pouvoir à Niamey ont dénoncé plusieurs accords de coopération avec la France et exigent que Paris retire ses troupes.
Le rapport de forces se durcit entre les pays sahéliens et la France qui, enferrée dans une posture de fermeté, cherche en vain une porte de sortie à la crise provoquée par le coup d’État militaire du 26 juillet au Niger.
Vendredi, le président français Emmanuel Macron a déclaré que l’ambassadeur de France à Niamey était « pris en otage par la junte » au pouvoir et qu’il ne s’alimentait plus que de « rations militaires ».
Paris ne reconnaît pas les nouvelles autorités nigériennes et refuse à ce titre le départ de l’ambassadeur Sylvain Itté, exigé par les putschistes qui ont défait le président Mohamed Bazoum, aujourd’hui en détention dans son palais.
« L’entêtement irréaliste de Macron avec un discours aggravant l’impression d’un paternalisme a perdu la diplomatie française dans ce dossier », juge Bakary Sambe, directeur du Timbuktu Institute de Dakar.
Selon lui, « la hantise de voir le départ du Niger marquer un déclic dans toute la région a dû peser sur l’entêtement français. Hélas, la France se trouve désormais dans un cercle vicieux ».
Pour Antoine Glaser, coauteur du livre « Le piège africain de Macron », « la façon de s’exprimer de moins en moins diplomatique d’Emmanuel Macron révèle un profond agacement, on voit bien qu’il est un peu coincé, la France est piégée maintenant au Sahel ».
Les autorités militaires du Niger, du Mali et du Burkina Faso, trois pays d’Afrique de l’Ouest, ont signé un pacte de sécurité commun appelé « Alliance des États du Sahel », s’engageant à s’entraider en cas d’agression étrangère contre l’un des trois pays.
Les trois pays se démènent pour contenir les terroristes affiliés à al-Qaïda et à Daech, et ont également vu leurs relations avec leurs voisins et leurs partenaires internationaux mises à mal par des coups d’État militaires.
Le dernier coup d’État au Niger a davantage creusé le fossé entre les trois pays et le bloc régional, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qui a menacé de recourir à la force pour rétablir l’ordre constitutionnel dans le pays. Suite à cette menace, les dirigeants du Mali et du Burkina Faso se sont engagés à venir en aide au Niger si la CEDEAO mettait sa menace à exécution.
Les trois pays étaient auparavant membres de la force conjointe « Alliance G5 Sahel » soutenue par la France, avec le Tchad et la Mauritanie, lancée en 2017 sous le prétexte de lutter contre les groupes terroristes d’al-Qaïda dans la région.
Le Mali a quitté l’alliance inerte après un coup d’État militaire, tandis que le président déchu du Niger, Mohamed Bazoum, a déclaré en mai 2022 que la force était désormais « morte » après le départ du Mali. Les relations entre la France et les trois États se sont détériorées depuis les coups d’État au Niger, au Mali et au Burkina Faso.