Les lignes qui suivent sont issues des explications fournies par le journaliste Gabriel Rogers au sujet des conditions de vie et surtout du meurtre dans la banlieue parisienne de Nahel M., un adolescent de 17 ans, sans casier judiciaire.
Des rapports disent que les manifestations contre le racisme chronique et la brutalité policière en France sont menées par des jeunes, le gouvernement français ayant déployé [plus de] 45 000 soldats et des véhicules blindés dans les rues de différentes villes pour les réprimer.
Le président français Emmanuel Macron, qui devait arriver dimanche en Allemagne pour des entretiens avec le chancelier allemand Olaf Scholz, a dû reporter la visite d’État alors que les manifestations faisaient rage à Paris.
Des rapports sur les événements survenus samedi dernier en France ont montré que parmi les quartiers les plus paupérisés, beaucoup se trouvaient en état de révolte ouverte contre l’establishment au pouvoir depuis le meurtre épouvantable de l’adolescent Nahel par la police française mardi 27 juin.
L’adolescent a été inhumé samedi 1er juillet à la suite d’une cérémonie funéraire tenue à la grande mosquée de Nanterre à laquelle ont assisté des milliers de personnes alors que des mesures de sécurité strictes y étaient établies.
« Si vous n’avez pas la bonne couleur de peau, la police est beaucoup plus dangereuse pour vous », a déclaré un jeune homme lors de ses funérailles, sous couvert de l’anonymat par crainte de représailles.
Qui était Nahel M. ?
Enfant unique élevé par sa mère, Nahel M. était d’origine algérienne et travaillait comme chauffeur-livreur de plats à emporter et était également passionné de rugby, selon des informations.
Il avait étudié dans un collège de Suresnes dans la banlieue ouest de Paris et avait suivi une formation d'ingénieur électricien, ont déclaré sa famille et ses amis. Il était connu comme une personne aimée de tous dans son quartier à Nanterre où il vivait avec sa mère Mounia.
« Qu’est-ce que je vais faire maintenant ? », disait sa mère s’effondrant en larmes après avoir appris la nouvelle. « Je lui ai tout consacré, je n’en ai qu’un, je n’ai pas 10 [enfants]. Il était ma vie, mon meilleur ami. »
Sa grand-mère parlait de lui comme d’un « garçon gentil et adorable », selon les rapports.
Depuis trois ans, il jouait pour le club de rugby des Pirates de Nanterre et faisait partie d’un programme d’insertion organisé par Ovale Citoyen, une association qui aide les adolescents en difficulté à trouver une place d’apprentissage.
« C’était quelqu’un qui avait la volonté de s’intégrer socialement et professionnellement, pas un gamin qui trafiquait de la drogue ou s’amusait de la délinquance juvénile », a déclaré au Parisien le président d’Ovale Citoyen, Jeff Puech.
Nahel avait un passé sans histoire et n’avait jamais été accusé de conduite criminelle, a confirmé sa famille.
Meurtre immonde
Les protestations ont été déclenchées par le meurtre de Nahel M. dans la banlieue parisienne de Nanterre mardi, la scène du meurtre ayant été filmé et publiée en ligne par des passants.
La police française a élaboré une explication tordue sur l’incident, affirmant que le garçon tué commettait des infractions au code de la route, mettait en danger les piétons, conduisait sans permis, désobéissait aux ordres de la police et que deux agents tentaient de désamorcer la situation.
De même, ils [les policiers] ont dit avoir tiré sur l’adolescent parce que leur vie était en danger, alors qu’il [Nahel] tentait de les percuter. Les policiers ont même affirmé qu’il était « connu de la police » en raison de 15 cas de violation alléguée.
Les preuves, cependant, suggèrent que Nahel était un jeune homme innocent sans casier judiciaire, et la vidéo enregistrée par un témoin oculaire ayant assisté par hasard à la scène prouve également que les affirmations faites par la police sont fausses.
Le jeune garçon de 17 ans n’avait pas de permis de conduire de plein droit et conduisait une voiture de location qu’il avait prise en toute légalité via une application et était en compagnie de deux amis, ce qui peut impliquer une conduite sous surveillance par la loi française.
Selon certaines informations, il pratiquait la conduite dans le but d’obtenir un permis de conduire, nécessaire pour continuer à travailler dans l’entreprise de livraison dont sa mère et lui dépendaient financièrement.
Aucune preuve de violation
Bien que la police française utilise des caméras embarquées et corporelles, elle n’a fourni aucune preuve que l’adolescent ait enfreint les règles de la circulation et mis en danger la vie des piétons avant l’arrêt.
La vidéo montre clairement qu’il a volontairement arrêté le véhicule et n’avait pas l’intention de s’enfuir, mais des problèmes sont survenus après que deux policiers ont pointé une arme sur sa tête à bout portant, avec des cris enregistrés : « Vous allez vous faire tirer dessus ! »
Cette situation l’aurait soumis à une énorme pression psychologique, car pour sortir du véhicule, il devait nécessairement effectuer des actions manuelles sur la boîte de vitesses et le frein à main, ce qui, dans des circonstances données, pouvait facilement être interprété comme une prise d’arme.
L’adolescent a instinctivement appuyé sur le gaz dans la panique, et un policier a immédiatement ouvert le feu sur lui. Pas dans les pneus de la voiture dans le but d’arrêter le véhicule, mais directement sur lui dans le but de le tuer.
Le véhicule a continué à avancer quelques mètres et a heurté un poteau, avec un klaxon provoqué par le coup de tête sur le klaxon. Il a reçu une assistance médicale d’urgence mais est décédé quelques minutes plus tard.
Racisme policier profondément enraciné
Mounia, la mère du jeune garçon tué, a appelé à protester contre son horrible meurtre, affirmant qu’« un policier a vu un visage arabe, un petit enfant, et a voulu lui ôter la vie ».
Le meurtre en plein jour, ainsi que la version policière déformée de l'événement, ont déclenché des protestations massives et spontanées de jeunes dans toute la France et au-delà.
Des manifestations contre le meurtre de Nahel ont également eu lieu en Belgique voisine, ainsi que dans la lointaine Guyane française en Amérique du Sud et à la Réunion dans l’océan Indien.
Selon les experts, les manifestations actuelles font écho au racisme vieux de longues années et profondément enraciné dans la société française, et sont aussi le résultat d’un mécontentement social généralisé qui a déjà provoqué des manifestations de plusieurs millions de personnes plus tôt cette année.
Cependant, les autorités françaises ne sont pas d’accord avec cette version. Le président Emmanuel Macron l’a attribué aux jeux vidéo. Même les célébrités françaises n’expriment pas trop leur soutien aux droits des jeunes Français, la plupart d’entre elles choisissant le silence.
La chef du parti des Verts français, Marine Tondelier, a cependant qualifié le meurtre de Nahel d’« exécution ».
« Ce que je vois sur cette vidéo, c’est l’exécution par la police d’un gamin de 17 ans, en France, en 2023, en plein jour », a-t-elle affirmé.
Réactions au meurtre d’un adolescent
Les voisins de Nahel lui ont rendu un hommage riche en émotions tout en dénonçant les traitements inhumains infligés aux minorités raciales en France.
« Nahel était un garçon tranquille », a déclaré samedi à l’AFP Saliha, 65 ans, une habitante de son quartier.
Le ministère algérien des Affaires étrangères a également exprimé sa « consternation » face au meurtre de l’adolescent par la police et a qualifié Nahel de « ressortissant » algérien à qui la France devait une protection.
Les Nations unies, dans un communiqué publié samedi, ont déclaré que la France devait s’attaquer aux problèmes profonds de discrimination raciale au sein de sa police.
« Nous sommes préoccupés par le meurtre d’un jeune de 17 ans d’origine nord-africaine par la police en France mardi », a déclaré la porte-parole du bureau des droits de l’homme de l’ONU, Ravina Shamdasani, lors d’un point de presse à Genève.
« C'est le moment pour le pays de s’attaquer sérieusement aux problèmes profonds de racisme et de discrimination dans l’application des lois », a-t-elle ajouté.
« Ce que nous avons vu ces derniers jours, c’est beaucoup de discours sur la loi et l’ordre, sur le rétablissement de l’ordre, sur l’horreur de cette violence », déclare un professeur de politique français
Ariane Bogain, maître de conférences en politique française à l’Université de Northumbria, a exhorté les autorités françaises à s'attaquer à la cause profonde du meurtre de Nahel - le racisme structurel dans le pays.
« Ce que nous avons vu ces derniers jours, c’est beaucoup de discours sur la loi et l’ordre, sur le rétablissement de l’ordre, sur l’horreur de cette violence », a-t-il déclaré à France 24.
« Ce que nous n’avons pas entendu, c’est une discussion sur les causes structurelles de tout cela », a-t-il ajouté.
(Les opinions exprimées dans cet article ne reflètent pas nécessairement celles de Press TV)