Abandonnée ou presque par Washington dans la guerre au Yémen, l’Arabie saoudite cherchera désormais à retirer aux Russes et Iraniens l’initiative en Syrie, écrit le journal russe La Pravda. Réalité ou illusion ?
« Des pays arabes semblent enclins à adhérer l’un après l’autre à un processus de reconnaissance de la légitimité de Bachar al-Assad en Syrie. Des États du golfe Persique, à savoir, l’Arabie saoudite, Bahreïn et les Émirats arabes unis, ainsi que l’Égypte parlent d’ores et déjà d’une normalisation avec la Syrie, signe qu’ils approuvent en quelque sorte la légitimité d’Assad qui a récemment remporté les élections présidentielles pour briguer un nouveau mandat.
À son tour, l’Occident campe sur sa position consistant à ne pas reconnaître la légitimité de Bachar al-Assad, et cela lui a pourtant assuré un constat d’échec.
Les EAU et Bahreïn parlent de la réouverture de leur ambassade à Damas, Manama ayant également annoncé une reprise de liaisons aériennes avec la Syrie. Tout récemment, l’Arabie saoudite a elle aussi organisé deux rencontres avec des responsables politiques syriens.
À en croire des analystes arabes, alors que les États-Unis ne se montrent plus très intéressés par la poursuite d’un appui inconditionnel à l’Arabie saoudite dans la guerre au Yémen, Riyad cherche à s’approprier l’initiative en Syrie. (…) Toujours est-il que la normalisation entre les États arabes et la Syrie se poursuivra lentement et surtout avec modération, de peur de ne pas susciter l’ire des États-Unis. Les médias arabes tentent même de faire passer ce processus pour des “contacts avec des objectifs humanitaires”. »
Ceci étant dit, le journal russe Pravda évoque la question de savoir si la Russie et l’Iran, deux alliés de Damas dans les années de guerre contre les terroristes soutenus par les puissances étrangères, devraient-il se préoccuper de leur place en Syrie de l’après-guerre ?
L’article reprend par la suite les déclarations de Boris Dolgov, du Centre des études arabes et islamiques de l’Institut des études orientales de l’Académie des sciences de Russie.
« Avec l’appui de l’aviation russe, l’armée syrienne a libéré 90% du territoire national. Ces zones sont actuellement revenues sous la souveraineté nationale syrienne. Les élections présidentielles en Syrie ont démontré l’appui collectif du peuple syrien à Assad, son gouvernement et ses approches politiques et l’horizon prometteur d’une relance économique dans ce pays a d’ores et déjà éveillé les convoitises des États arabes. »
L’intérêt que portent de nos jours certains États arabes envers la Syrie serait donc de nature économique, peut-être même symbolique. En outre, des mesures significatives de la part des États arabes dans le sens de rapprochement se font toujours attendre.
Rappelons que la Syrie avait effectivement été suspendue, à l’initiative, entre autres, de l’Arabie saoudite, comme membre effectif de la Ligue arabe en novembre 2011, sous prétexte de la « militarisation du conflit syrien ». En mars 2013, l’organisation de la Ligue arabe avait envisagé d’attribuer le siège de la Syrie à l’opposition en exil, mais à l’époque, certains pays s’y étaient opposés : l’Algérie, l’Irak et le Liban, voire le Yémen.
Mais si aujourd’hui, un rapprochement s’esquisse avec l’idée d’un retour de la Syrie au sein de la Ligue arabe dont elle fut l’un des six membres fondateurs en 1945, la question qui se pose est de savoir est-ce que les alliés de la Syrie, à savoir la Russie et l’axe de la Résistance, accepteront de se faire facilement remplacer par un groupe de pays arabes dont les mauvaises intentions en Syrie sont de notoriété publique ? Autrement dit, est-ce que la Syrie qui a toujours reconnu l’appui de l’axe de la Résistance et de la Russie dans le combat qu’elle continue toujours de mener contre les terroristes et séparatistes soutenus soit par les Occidentaux soit par les États arabes, acceptera-t-elle d’abandonner ses alliés, en contrepartie d’une normalisation avec de soi-disant nouveaux partenaires qui semblent renifler l’argent et le pétrole ? Rien n’est moins sûr…
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