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USA/Iran : un compromis impossible à moins que ?

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Une réunion des commandants militaires iraniens lors de l'exercice militaire Zolfaqar-99. ©YJC

Peu de temps après l’annonce par les ministres de la Défense de l’OTAN de vouloir augmenter le nombre de militaires en Irak de 500 à 4 000 soldats en Irak, les États-Unis ont bombardé les forces de la Résistance soutenues par l’Iran en Syrie, écrit Richard Hanania sur Twitter, dans un article récemment repris par le site d’information MD East News.

« C’est une politique qui pourrait non seulement enliser les forces américaines dans un nouveau bourbier - comme le montrent les attaques régulières à la roquette sur les installations américaines - mais aussi entraver les tentatives de relancer la voie diplomatique avec l'Iran, une priorité majeure de la nouvelle administration », indique l’article.

L’Iran représente, selon l’article, le sujet sur lequel le fossé entre les administrations Obama et Trump était peut-être plus grand par rapport à n’importe quel dossier de la politique étrangère. Trump s’est retiré de ce qui était considéré comme étant le « couronnement » de la politique étrangère d’Obama au cours de son deuxième mandat, à savoir, l’accord sur le nucléaire iranien ou Plan global d’action conjoint (PGAC), et a poursuivi une campagne de « pression maximale » qui semblait à beaucoup d’égards être une « tentative à peine déguisée de changement de régime », ajoute l’article.

Toujours est-il que le président Biden a montré sa volonté de ramener Washington dans l'accord nucléaire ; cependant, ce serait désastreux s’il le fait, sans penser aux moyens d’empêcher une future administration américaine de compromettre de la même manière ses acquis, estime l’auteur qui ajoute :

« Pour s’assurer que la détente avec l'Iran persistera, le président Biden doit pourtant non seulement résister à toute augmentation de troupes otaniennes, mais aussi et surtout, opter pour un retrait complet d’Irak et de Syrie. »

En principe, le Plan global d’action conjoint se concentre sur le programme nucléaire iranien, tandis que l’administration Trump s’en est retirée unilatéralement en 2018, exactement parce que d’autres sujets de désaccords n’y étaient pas traités, écrit aussi Richard Hanania.

« Pour Obama, en revanche, l’important enjeu de la sécurité nationale résidait dans la non-prolifération ; et pour y parvenir, il était prêt à tolérer une plus grande influence régionale de l’Iran. Cela a été clairement expliqué dans une interview : “La situation dans cette région nous oblige à dire à nos amis, ainsi qu'aux Iraniens, qu’ils doivent trouver un moyen efficace de partage sur la donne de voisinage et d’instaurer une sorte de paix froide. Sinon, traiter l’Iran comme un ennemi signifierait que nous devons commencer à entrer en guerre et à utiliser notre puissance militaire pour régler les comptes. Et ce ne serait dans l’intérêt ni des États-Unis ni du Moyen-Orient.” »

Selon l’article, « l’idée même que l’Iran ait un siège à la table [de négociations] était impensable pour Trump ». « Par conséquent il a préféré ignorer cette réalité que le PGAC fonctionne tel qu’il était conçu. Il a même abandonné l’idée qu’en poursuivant la pression maximale, il serait possible de mettre à genou Téhéran. En effet, il ne voulait pas d’une situation dans laquelle l’Iran abandonnerait ses ambitions nucléaires, tout en restant capable de se ressaisir sur le plan financier et de sortir de l’isolement diplomatique ».

L’article se poursuit en se focalisant plutôt sur la politique irakienne et syrienne des États-Unis.

« Presque au moment où Obama négociait le PGAC, il a envoyé des troupes en Irak et en Syrie pour combattre Daech. Pourtant, une fois que cette organisation [terroriste] a perdu les derniers morceaux de terrains restant toujours sous son contrôle en mars 2019, les États-Unis [de Trump] ne sont pas partis. Là aussi, alors que la campagne de pression maximale était en cours, les soldats américains ont dû rester pour “avoir un œil” sur l’Iran. (…) Avec la défaite de Daech et alors qu’il y avait peu de raisons de s’attendre à une résurgence de ce groupe, l’Iran est devenu le meilleur prétexte pour les États-Unis afin de justifier la poursuite de la présence militaire américaine en Irak et en Syrie (…), à quoi s’ajouta plus tard un autre argument : rester pour “protéger le pétrole des alliés kurdes”. »

« Selon l’ancien commandant de l'OTAN James Stavridis, les États-Unis étaient en Irak pour “contrer l'influence iranienne” ; qu'a fait l’Iran de cette influence? », se demande l’auteur, faisant allusion par la suite aux accusations non fondées formulées par le camp occidental contre l’Iran, l’accusant de vouloir « exercer une certaine influence sur le gouvernement et l’armée irakiens ». « C’est sur fond de ce cercle vicieux que l’armée américaine est restée en Irak pour contrer l’Iran, et qu’elle entend contrer l’Iran à cause de ce qu’il fait en Irak », ajoute l’article.

« En effet, l’Iran a plus de motifs pour combattre les organisations terroristes dans la région, tout comme, d’ailleurs, la Russie et le gouvernement d’Assad en Syrie. C’est l’Iran qui a contribué à entraîner et à équiper les Unités de mobilisation populaire qui ont pu faire échec à Daech et faire revenir des zones occupées au territoire national irakien. On pourrait en conclure que finalement l’influence iranienne à la fois en Syrie et en Irak a aidé et aide encore à garantir que Daech ne réapparaîtra pas. Et pourtant, cela fait des années que les forces américaines en Irak et en Syrie se voient dans le camp d’en face de l’Iran et de ses alliés. Sous la présidence Trump, cette approche a trouvé ses fervents partisans parmi ceux qui souhaitent que de toute façon la diplomatie échoue, pour trouver une “excuse commode” afin d’augmenter la pression sur l'Iran. »

Pour conclure, l’article de Ricahrd Hanania ajoute :

« Avec l’avènement au pouvoir de Joe Biden, la question d’allègement des sanctions a refait surface. Dans ce contexte, les troupes américaines en Syrie et en Irak servent de fil conducteur qui peut faire dérailler les plans du gouvernement dans le sens d’une interaction renouvelée avec Téhéran. Même si l’administration Biden parvient à éviter des affrontements majeurs, une future administration, à l’instar de Trump, souhaitant annuler les gains diplomatiques, aura une excuse toute prête pour le faire. Ceux qui prendront le pouvoir aux États-Unis après Biden attendraient toute moindre confrontation, tout simplement pour rappeler que les États-Unis et l’Iran se trouvent sur les camps opposés dans deux zones de conflit.

Pour ces raisons, il est impératif pour l’administration Biden de rechercher un retrait complet d’Irak et de Syrie. L’administration Trump a commis une erreur non seulement en se retirant du PGAC, mais aussi en apportant un soutien inconditionnel aux Saoudiens dans leurs répressions internes et leurs exactions extra-frontalières, notamment leur guerre au Yémen. Tout cela faisait partie d’un effort pour mettre fin à une prétendue menace iranienne et justifier une implication américaine sans fin dans les zones de conflit du Moyen-Orient.

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Le président Biden devrait faire beaucoup plus, que de chercher simplement un retour aux politiques plus équitables de l'administration Obama en ce qui concerne l’Iran. Il devrait plutôt chercher un moyen de garantir que les acquis jusqu’ici obtenus durent plus longtemps, ôtant à toute future administration US la possibilité de les inverser. Obama et Trump étaient fondamentalement différents concernant l’approche américaine envers le rôle régional de l’Iran. Si Biden ne se retire pas d’Irak et de Syrie et ne contribue pas à bâtir sur l'héritage d’Obama, c'est peut-être la vision de Trump qui finira par triompher. »

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SOURCE: FRENCH PRESS TV