Après avoir brûlé la quasi totalité de ses cartes, il ne reste à l'axe Bolton-Pompeo qu'un dernier recours : faire peur aux Iraniens. Le seul hic : ils ne connaissent ni les Iraniens ni la région , estime Hadi Mohamadi, joint par Presstv, en allusion à la décision du conseiller américain pour la sécurité nationale qui a annoncé l'envoi dans le golfe Persique d'une flotte composée d'un porte-avions et des bombardiers, façon d'envoyer un message "clair et indubitable" à l'Iran. Les USA prêts donc à la guerre avec l'Iran?
Cité par la Chaîne de télévision, CNBC News, le conseiller Bolton se met à menacer cette fois l'Iran :
« Les États-Unis déploient un porte-avions et une force opérationnelle de bombardiers au Moyen-Orient pour transmettre un message clair à Téhéran : Les Etats-Unis sont prêts à faire face a CGRI, à l'armée iranienne ou à leurs alliés dans la région qui se heurteront à une "force implacable", bien que les Etats-Unis ne cherchent pas la confrontation. »
Le CentCom en Asie de l'ouest figure depuis trois semaines sur la liste noire des forces armées iraniennes, mesure qui répond au blacklistage du CGRI par les Etats-Unis. " Depuis le début de cette nouvelle escalade, force est de constater en effet que ce sont les Iraniens qui sont en avance plutôt que le contraire. A suivre le file de l'actualité, on est enclin de relever la multiplication des attaques anti-américaines en Afghanistan, en Syrie tandis qu'en Irak aucun jour ne passe sans qu'une nouvelle carte anti-US ne soit jouée. Côté sanctions anti-iraniennes, les pétroliers iraniens continuent depuis le 2 mai, soit la date à laquelle les sanctions US sont entrées en vigueur, à exporter leur pétrole en opérant à travers le golfe Persique tout comme l'océan Indien comme si de rien était. Aucun pétrolier iranien n'a été perturbé sur son trajet. Pour les stratèges US qui ont allumé la mèche sur plusieurs, c'est plutôt une royale déculottée. Bolton donne l'impression de tirer là sa dernière cartouche : envoyer des bâtiments de guerre non loin des côtes iraniennes à défaut d'autres moyens et ce, pour pousser les Iraniens au dialogue. Mais cette attitude trahit une nouvelle fois la méconnaissance des conseillers de Trump de l'Iran et de ses politiques. Les Iraniens n'ont jamais négocié sous menace et ils n'iront pas changer leur attitude pour plaire à Bolton. C'est une constance d'ailleurs culturelle chez eux. En refusant de proroger les dérogations concernant l'enrichissement iranien, l'administration US a de surcroît balayé d'un revers de main toute chance d'un retour à la table des négociations. On s'attend d'ailleurs à un imminent retrait iranien du PGAC. Les Américains ont tout faux dans leur politique iranienne".
Cette analyse est partagée par Ilan Goldenberg, ancien responsable du département d'État et du Pentagone qui en réaction à Bolton a écrit dans tweet :
« Le déploiement d’un groupe de porte-avions pour rejoindre le CentCom au Moyen-Orient n'est pas inhabituel et cela peut probablement être une routine et une longue planification. »
A carrier into CENTCOM is not unusual & was likely routine & long planned.
— Ilan Goldenberg (@ilangoldenberg) May 6, 2019
The inflammatory language from Bolton is unusual/provocative but my guess is just an opportunity to try to intimidate the Iranians. Nothing more pic.twitter.com/aNyc5KNkOf
Le directeur du programme de sécurité du Moyen-Orient au Centre pour une nouvelle sécurité américaine ajoute : « Par contre le langage incendiaire de Bolton est une provocation inhabituelle, mais j’imagine qu’il s’agit simplement d'une tentative d'intimidation à l'adresse des Iraniens et rien de plus. "
Le politologue américain Micah Zenko a quant à lui rejeté les propos menaçants du conseiller pour la sécurité nationale US contre l’Iran : « Les propos de Bolton sur le déploiement systématique de la Lincoln auprès de CENTCOM AOR dans le but d’effrayer l’Iran est une menace particulièrement faible et creuse. Tout le monde sait que ce genre de démarche ne fonctionne plus. Cela n'a pas fonctionné au Venezuela. Cela ne fonctionnera pas non plus pour l'Iran".