C'est à tous les points de vue, un retentissant échec : les États-Unis ont échoué dans leur tentative d'imposer à la Corée du Nord un accord taillé sur mesure. À peine quelques jours après la visite historique de Kim Jong-un à Vladivostok en Russie, Pyongyang a tiré samedi 4 mai plusieurs missiles à courte portée depuis la ville côtière de Wonsan en direction de la mer du Japon, située au nord-est. Dans ce dossier éminemment stratégique qui aurait du déboucher sur un accord Washington-Pyongyang propre à se substituer à celui signé en 2015 avec l'Iran, les Américains vont d'échec en échec. Pour le reste, la Corée du Nord donne l'impression à s'intéresser davantage au Moyen-Orient. Une délégation nord-coréenne en Syrie et des liens peut-être avec la Résistance palestinienne. Israël a du pain sur la planche.
Il y a quelques jours la Corée du Nord a réclamé le retrait du secrétaire d'État Mike Pompeo des discussions, en l'humiliant lui et son compère, Bolton. Pyongyang dénonçait en Pompeo un ex-agent qui manque de subtilité, de prudence et de maturité. Ceci étant, le secrétaire d'État US n'a pas entendu de cette oreille cet avertissement nord coréen affirmant qu'il était toujours chargé de l'équipe de négociateurs.
Après ce premier blocage, le fossé profond de perception qui éloigne une Corée du Nord avare de son indépendance et une Amérique se croyant maître du monde n'a cessé de se creuser autour de l’objet à négocier mais aussi sur l’ensemble des autres questions y afférant. Ce que l'administration US ne semble pas comprendre est ceci : les Nord-coréens ne veulent négocier que s'ils sont traités sur un pied d’égalité avec Washington, mais ce dernier le refuse absolument.
Sans être prêts à donner aucune sorte de garantie, les Américains veulent un désarmement nucléaire et balistique complet et sans condition de Pyongyang. Selon le chef de la diplomatie nord-coréenne, Ri Yong Ho, son pays ne désarmera pas sans confiance établie avec les États-Unis.
S'il est vrai que Pyongyang semble hautement intéressé par un développement économique en coopération avec une Corée du Sud débarrassée de l’influence américaine, objectif qui semble avoir été acquis en grande partie en deux ans de pourparlers Pyongyang-Washington, il n’abandonnera jamais des armes qu’il considère comme son seul gage de sécurité et l’unique moyen de tenir ses adversaires à distance.
La Corée du Nord "a lancé plusieurs missiles à courte portée depuis la péninsule de Hodo, près de la ville côtière de Wonsan, en direction du nord-est entre 9h06 (2h06 en France) et 9h27 aujourd'hui". C'est le haut commandement militaire sud-coréen qui a annoncé la détection de ces tirs dans un communiqué. Les missiles ont parcouru entre 70 et 200 km au-dessus de la mer du Japon. La Maison blanche a rapidement réagi après ces tirs : "Nous sommes au courant des actions de la Corée du Nord cette nuit. Nous continuerons à surveiller", a déclaré Sarah Sanders, porte-parole de la Maison blanche, inquiète visiblement d'être accusée de s'être laissée berner par la partie nord-coréenne qui fait désormais ce qui bon lui semble sans aucun égard pour les Américains.
Mais la série de défis nord-coréens à l'adresse de Washington est loin d'être close: une délégation nord-coréenne s'est rendue la semaine dernière en Syrie avec visiblement de "belles propositions balistiques" à formuler auprès des Syriens. Les experts nord-coréens bien présents en Syrie auraient aidé cette dernière à optimiser ses vieilles batteries de missiles Sol-Air S-200 (Code OTAN: Sa-5 Gammon) de la défense aérienne syrienne. Ces mêmes missiles ont réussi à abattre deux F-16 I “Sufa” (Tempête) de l’Armée de l’air israélienne et endommagé un F-15 Sufa. Ces mêmes missiles auraient aussi atteint un F-35A et l'ont tellement endommagé qu’il fut perdu lors de son atterrissage d’urgence dans la première base aérienne israélienne. Officiellement, Tel-Aviv a imputé cette perte à deux volatiles migrateurs de passage.
Selon des sources bien informées Damas est largement intéressé par l’acquisition du système de missiles Sol-Air nord-coréen Pong’Gae 5, plus connu par sa dénomination KN-06. Cette acquisition pourrait bien "neutraliser" les contraintes qui empêchent Damas d'avoir recours à ses S-300 fournies par Moscou. Pour Israël c'est une très mauvaise nouvelle puisqu'il ne possède aucun levier de pression contre Pyongyang. La Corée du Nord vient de rejoindre pleinement l'axe Damas-Téhéran-Moscou, en partie à la faveur des erreurs de calcules de l'administration US. Les missiles de courte portée nord-coréens pourront aussi être tirés très prochainement depuis Gaza.