Le septième samedi de protestation en France vient de débuter : les Gilets jaunes, rejetant l'idée d'un essoufflement du mouvement, se sont donné rendez-vous pour l'acte 7. Un peu partout en France, les manifestants se réunissent en ce moment même pour un nouveau samedi de mobilisation. Mais une question se pose : cette mobilisation constante n'aurait-elle pas dû avoir lieu à l'adoption du loi Travail? En dépit de son immense impopularité, la loi travail n’a pas offusqué autant que la nouvelle taxe sur le carburant ayant engendré la crise des Gilets jaunes en France. Pourquoi?
Contesté pendant le quinquennat de l’ex-président français François Holland, la loi travail qu’Emmanuel Macron a fait passer par décret n’a pas exposé la France à d’importantes mobilisations, contrairement à l’instauration d’une nouvelle taxe sur le carburant qui a déclenché la crise des Gilets jaunes conduisant à des manifestations d’envergures et à des scènes de violence par la suite, évoque Sputnik.
L’économiste Patrick Louis précise que c’est la goutte d’eau qui fait déborder la vase :
«Pour moi, il n'y a pas de rapport immédiat entre la loi Travail et les Gilets jaunes. C'est une question de temps. La loi Travail a commencé à inspirer un peu les populations. Le niveau de colère augmente comme l'eau augmente dans le verre et commence à déborder. La loi Travail touchait essentiellement le monde des gens qui n'ont pas de travail et surtout le monde des entreprises où il y a des syndicats, des grandes entreprises industrielles plutôt dans les villes. […] La population des Gilets jaunes n'est pas exactement la même, et n'a pas été touchée en même temps que celle de la loi Travail», a-t-il expliqué lors d’une interview accordée à Sputnik.
Les raisons du déclenchement de la crise des Gilets jaunes se font beaucoup parler d’elles non seulement sur le Net mais aussi parmi les commentateurs de tous niveaux.
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Cet ancien eurodéputé explique qu’il y a une variété de différentes causes économiques, sociales et sociétales qui sont à l’origine du phénomène.
«C'est l'aspect social et il faut se rendre compte que l'État n'a plus d'argent. La France est endettée mais, elle trouve de l'argent pour financer l'immigration, pour financer tout un ensemble de choses, pour dire: on va accueillir plus de pauvreté, etc., alors que ces gens des campagnes ont travaillé toute leur vie, ont souvent cotisé et eux, ils se retrouvent avec moins de droits sociaux que des gens qui n'ont jamais cotisé pour pouvoir en bénéficier. Et on doit comprendre que dans ce cas-là vous avez la photo, la sociologie des gens qui manifestent », a-t-il décrypté.
Selon lui, les revendications des Gilets jaunes se sont axées sur le fait qu’il y a de l’argent en France mais seul le gouvernement en bénéfice et pas le peuple.
«Les gens ne comprennent plus: l'État s'occupe de tout, mais il ne s'occupe pas de moi. C'est une vraie révolte avec des causes économiques, des causes de justice sociale et des causes d'identité», a-t-il noté.
Pour l’universitaire français, les syndicats ont en partie contribué à la formation du mouvement, mais leur présence reste marginale dans cette lutte.
«Les syndicats sont dépassés. Nous avions la semaine dernière [du 29 novembre au 6 décembre 2018, ndlr] les élections syndicales, les syndicats sont dépassés et essaient de rentrer dans le jeu pour ne pas voir le monopole de contestation leur échapper », a-t-il estimé.
Patrick Louis est persuadé qu’Emmanuel Macron ne cèdera pas aux revendications des Gilets jaunes, car les autorités françaises sont à présent confrontées à une crise publique empêchant ces dernières de réagir par rapport au malaise général des Français et d’effectuer des réformes profondes.
«Macron ne peut pas agir parce qu'il est coincé dans le cadre européen. Il a un déficit budgétaire qui est très élevé, on a une dette qui est élevée et il n'a pas le contrôle de sa monnaie ni de son budget. Donc, il ne peut pas se remettre en cause parce que la politique ne se fait plus à Paris, elle se fait à Bruxelles. Il y a des grands firmes multinationales qui ont des intérêts à ce qui s'y passe, et ce n'est pas forcément l'intérêt des entreprises françaises moyennes ordinaires ou du peuple français », a-t-il confié.
Cet expert en économie conclut en indiquant que la conjoncture actuelle en France a exposé le pays à une impuissance publique. Or, le président français s’intéresse à tout sauf à l’intérêt immédiat du peuple.