Le Premier ministre israélien a pris une mauvaise habitude. Après avoir promis pendant des années le feu de l’enfer aux Iraniens et menacé leur pays et leurs infrastructures de destruction, il s’est mis soudain à les aimer : un jour il veut résoudre le problème de la sécheresse en Iran, un autre jour il incite les Iraniens à tenir tête à leur gouvernement comme ils ont tenu tête à « Ronaldo » pendant le mémorable match de la semaine dernière entre l’Iran et le Portugal. Mais à quoi joue le criminel de guerre Netanyahu, qui a son actif le meurtre de centaines de civils palestiniens, y compris des femmes et des enfants ?
La mise en scène est de nature sportive : dans un enregistrement vidéo daté de 26 juin, Netanyahu félicite l’équipe nationale iranienne pour ses performances face au Portugal dans le cadre de la Coupe du monde 2018. Après avoir jonglé avec un ballon de football, et loué le « courage » des joueurs iraniens face à Ronaldo, Netanyahu met en parallèle le résultat du match Iran-Portugal et les protestations qui ont eu lieu, le lundi 25 juin, au bazar de Téhéran contre le cours élevé du dollar. À partir de là, il incite ensuite les Iraniens à se révolter contre « le pouvoir » avant de promettre qu’il viendrait « prochainement en Iran ».
En effet, la sympathie soudaine dont fait preuve Netanyahu à l’égard des Iraniens est trop factice pour séduire : les Iraniens se rappellent fort bien les protestations officielles d’Israël, au cours de deux éditions de la Coupe du monde (2006 en Allemagne et 2010 en Afrique du Sud) contre la participation de l’équipe de football iranienne. Tel-Aviv réclamait l’expulsion de l’Iran, qu’il accusait de « négationnisme » et de « tentatives d’anéantir Israël ».
Même peu avant le début de la Coupe du monde 2018 en Russie, les médias israéliens ont réclamé l’expulsion du joueur iranien Mahdi Taremi de ce tournoi pour la seule raison qu’il avait retweeté un message du Leader iranien qui affirmait qu’Israël disparaîtrait avant 2025 !
Technologie israélienne
Le coup de com’ footballistique de Netanyahu n’est d’ailleurs pas le premier. Depuis qu’il s’est mis à aimer les Iraniens, Netanyahu multiplie ce genre de prises de position ostentatoires. Le 11 juin, il s’est soucié dans un autre enregistrement vidéo de la sécheresse qui frappe une partie de l’Iran et a accusé le « régime despotique iranien » de priver son peuple d’eau. Les internautes iraniens n’ont pas manqué du reste de lui renvoyer la balle, rappelant comment le régime israélien détournait les ressources hydrauliques de tous ses voisins, dont celles des Syriens et des Libanais, ou comment il assoiffe des milliers de gens à Gaza. On ne le sait que trop, les Palestiniens souffrent d’une pénurie d’eau et ont du mal à irriguer leurs champs agricoles et leurs oliviers.
Que se passe-t-il ?
Pour les analystes des questions politiques, le nouveau show auquel se livre Netanyahu, alors qu’il sait pertinemment à quel point les Iraniens le haïssent et abhorre son régime, est destiné à cacher une crainte foncière, celle de voir se poursuivre la montée en puissance désormais « incontrôlable » de l’Iran contre laquelle Israël ne peut rien. Autant donc tenter de s’insinuer dans les esprits des jeunes Iraniens par des moyens qui sont propres à la jeune génération et essayer de la sorte de semer le chaos, d’instiller le doute et la crainte de l’avenir au sein de la population. Ces tentatives assez grotesques vont d’ailleurs de pair avec la politique des sanctions économiques anti-iraniennes de Trump qui visent elles aussi à pousser les Iraniens à bout et à les monter contre leur gouvernement.
Le modèle soviétique ?
La méthode est bien connue des spécialistes de la Guerre froide : dans les années 80, le président US Ronald Reagan ne cessait d’envoyer des messages d’amitié et de sympathie au peuple soviétique pour mieux préparer l’effondrement de l’URSS. Bien qu’il le fasse de manière très gauche, Netanyahu tente lui aussi de singer l’ancien locataire de la Maison-Blanche et star de Hollywood, bien que le « simulacre » ne lui réussisse pas. Il manque en effet à « Bibi » ce qui manque au président affairiste des États-Unis, à savoir une réelle vision stratégique. Entre l’Union soviétique de 1989 et l’Iran de 2018, il y a une nette différence : pour avoir très longtemps cohabité avec les « loups », les Iraniens distinguent mieux que quiconque ceux d’entre eux qui se déguisent en moutons.