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Vers une hybridation de la guerre en Syrie

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Des forces spéciales américaines auprès des YPG (milice kurde) : Donald Trump suit les traces d’Obama en Syrie. ©RTR

La base aérienne russe en Syrie, Hmeimim, et la base navale de Tartous ont été attaquées simultanément par des drones samedi. Le système avancé de défense aérienne russe a contré l’attaque. Une vague de 13 drones a été impliquée, et, fait intéressant, trois d’entre eux ont été capturés intacts.

Après quarante-huit heures d’analyse minutieuse de l’incident, le ministère russe de la Défense a publié lundi une déclaration:

Au cours de la nuit, les installations de défense aérienne russes ont repéré 13 cibles aériennes inconnues de petite taille s’approchant des dispositifs militaires russes. Dix drones de combat s'approchaient de la base aérienne russe Hmeymim et trois autres du centre logistique de Tartous.

Les solutions techniques utilisées par les terroristes pendant l’attaque des installations russes en Syrie n’auraient pu provenir que d’un pays doté d’un potentiel technologique élevé en matière de navigation par satellite et de contrôle à distance pour tirer des engins explosifs artisanaux fabriqués et assemblés par des personnes compétentes dans un lieu précis, selon l'agence de presse russe ITAR-TASS.

Les pays dotés d’un «potentiel technologique élevé» et d’une capacité de «navigation par satellite et de contrôle à distance» impliqués dans la guerre par procuration en Syrie ne sont que deux – les États-Unis et Israël. Faites votre choix. À mon avis, il est improbable qu’Israël, malgré ses bravades, ose attaquer la Russie.

En somme, il y a eu une attaque américaine malveillante contre les «structures» russes le jour de Noël de l’Église orthodoxe russe. La déclaration à Moscou a été faite après l’examen des 3 drones qui ont été capturés. Son ton assez explicite est destiné aux fonctionnaires du Pentagone. Certes, le Pentagone avait déjà sorti sa propre déclaration préventive pour rejeter la responsabilité de l’attaque sur les rebelles syriens. C’est un acte de déni plausible, car il y a des groupes rebelles opérant dans le nord de la Syrie. Mais ils sont affiliés à Al-Qaïda, et sont des proxys américains et israéliens. RT a publié une réplique ironique à la déclaration de non-responsabilité du Pentagone.

Pourquoi les États-Unis contestent-ils les bases russes en Syrie? Le fait est que ces bases russes sont situées dans la province de Lattaquié, le long de la côte méditerranéenne. Et l’objectif militaire américain est d’accéder à la côte méditerranéenne pour pouvoir avoir accès à l’enclave du Kurdistan qu’ils sont en train de créer en Syrie et qui, sans cet accès, sera encastrée et dépendra de manière critique des voies d’approvisionnement via la Turquie ou l’Irak, en plus d’être économiquement non viable (bien que ce soit une région de la Syrie riche en pétrole.)

Le quotidien saoudien Asharq Al-Awsat a rapporté lundi que l’administration Trump prévoyait d’accorder une reconnaissance diplomatique à l’enclave du Kurdistan dans le nord de la Syrie (qui est de la taille du Liban). L’idée est de créer un ancrage permanent pour les États-Unis et Israël dans un Kurdistan indépendant stratégique, économiquement autosuffisant, où se rejoignent les frontières de la Turquie, de l’Irak et de la Syrie, et qui pourrait éventuellement aller jusqu’à la frontière occidentale de l’Iran avec le nord de l’Irak.

Mais la stratégie américano-israélienne restera un rêve illusoire si le Kurdistan est enclavé et continue à être contesté par la Turquie, l’Iran, l’Irak et la Syrie. D’où l’importance cruciale de créer une voie d’accès à la Méditerranée via la province de Lattaquié.

La Russie et la Turquie ont très bien compris les intentions américaines. Cela explique leur dernière initiative visant à éliminer les groupes affiliés à Al-Qaïda encore présents dans la province d’Idlib adjacente à Lattaquié. Les forces gouvernementales syriennes et leurs alliés avancent sur Idlib dans une opération qui a débuté la semaine dernière. Idlib est une province assez grande et de longs combats sont nécessaires pour vaincre ces groupes d’Al-Qaïda. Dimanche, les forces gouvernementales syriennes ont pris une ville stratégique, Sinjar qui les amène à moins de 20 kilomètres de l’énorme base aérienne d’Abou Zohour à Idlib. En passant, l’autoroute reliant Damas et Alep passe également par l’est d’Idlib.

La Turquie coopère avec la Russie pour dégager Idlib des groupes d’Al-Qaïda. (Idlib borde la Turquie.) En effet, la Turquie est farouchement opposée aux efforts américains pour créer un Kurdistan dans le nord de la Syrie. Le président turc, Recep Erdogan a ouvertement menacé le weekend dernier que Washington « ne pourra jamais transformer le nord de la Syrie en un corridor pour les terroristes », promettant de « les frapper très durement ». Ils devraient savoir que nous sommes déterminés à ce sujet. Les zones qu’ils considèrent comme faisant partie du corridor terroriste pourraient s’avérer être leurs tombes. 

Il est possible que les récentes tentatives des États-Unis et d’Israël d’attiser les troubles en Iran soient liées à tout cela. Le plan de jeu américano-israélien vise à embourber l’Iran dans des problèmes internes. Les gouvernements syrien et irakien sont proches de l’Iran et du Hezbollah pour faire le gros du travail dans la guerre contre les groupes Al-Qaïda et Daech soutenus par les États-Unis.

Téhéran a compris la stratégie américano-israélienne. L'Iran a acquis beaucoup d’expérience pour vaincre les opérations secrètes américaines et israéliennes. Le Guide suprême, Ali Khamenei a compris que le conflit syrien est aussi une bataille existentielle pour l’Iran. Les commandants du Corps des Gardiens de la Révolution islamique ont déclaré que le choix était entre combattre les proxys américano-israéliens en Syrie et en Irak ou les combattre sur le sol iranien.

Comment Moscou réagira-t-il à l’attaque des drones américains contre ses bases? Une solution permanente consisterait à riposter contre les forces américaines et à leur infliger de lourdes pertes – comme à Beyrouth en 1983. Si quelques douzaines de cercueils américains arrivent à Washington en provenance de Syrie, le président Trump dira certainement : «Assez, les gars rentrez à la maison».

Mais le problème est que les États-Unis mènent une «guerre hybride», intégrée à la milice kurde et ne peuvent pas être ciblés facilement. Le Pentagone a également inséré des «sous-traitants privés» (des mercenaires américains) afin de minimiser les risques politiques.

Par conséquent, l’option de la Russie sera d’intensifier les opérations de nettoyage de la province d’Idlib et d’éradiquer une fois pour toutes les groupes d’Al-Qaïda soutenus par les États-Unis et Israël. Bien entendu, Nikki Haley, sur des instructions israéliennes, commencera à hurler à l’ONU pour dénoncer des « crimes de guerre ».

Bien sûr, comme dit l’adage, en amour comme à la guerre, tous les coups sont permis et il y a une autre option qui s’offre aux Russes comme aux Iraniens : équiper les talibans afghans de drones. Mais il est peu probable qu’ils aillent aussi loin. Du moins pour l’instant.

Par M K Bhadrakumar

Source: réseauinternational 

 

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SOURCE: FRENCH PRESS TV