Sur les motifs qui ont poussé Donald Trump à reconnaître, au mépris du droit international, la ville de Qods comme capitale d’Israël, les analyses se multiplient. En revanche, ce dont on parle peu ou pas, c’est le risque concret qu’une telle décision fait encourir au régime de Tel-Aviv.
Depuis l’annonce de la décision du président Trump de judaïser la ville de Qods, aucun jour ne s’est passé sans que la Cisjordanie ou Gaza ne soit le théâtre de violentes protestations contre le régime d’Israël.
Le tollé a même dépassé les frontières de la Palestine et du Proche et Moyen-Orient pour envahir les grandes villes d’Europe et des États-Unis. Si Israël compte sur le facteur de « fatigue » pour faire reculer les Palestiniens, et dans leur sillage les arabes et les musulmans, c’est son droit. Mais tout risque de ne pas se dérouler suivant le modus operandi auquel l’axe Tel-Aviv-Washington travaille. L’expert iranien en stratégie, Sadallah Zarei, relève la perspective d’une « militarisation » de la Cisjordanie, ce qui est désormais une hypothèse à prendre en compte.
« À vrai dire, Israël risque de se heurter de plein fouet à une quatrième Intifada en Cisjordanie. Après la décision de Trump de changer de fond en comble les règles du jeu, l’option armée s’impose comme une nécessité et Israël se trompe s’il croit que cette militarisation n’est pas à la portée de main. La Cisjordanie se trouve au cœur de l’enjeu puisqu’elle abrite la ville de Qods, les secteurs de Jenin, d’al-Khalil (Hébron) et de Ramallah, soit toutes des localités d’une extrême importance stratégique. Une militarisation de ces localités reviendrait à mettre en danger la sécurité d’Israël et par là, à stopper net le régime de Tel-Aviv dans ses velléités expansionnistes auxquelles Washington vient de donner un solide coup de pouce.
Mais cette militarisation est-elle réellement possible ?
Peut-être pas depuis l’extérieur, car la Cisjordanie est une enclave qui ne donne pas sur mer et qui, de surcroît, a pour le voisin immédiat la Jordanie. Or, Amman n’aidera jamais la Résistance palestinienne, ne serait-ce qu’à cause des dizaines d’accords militaires qui l’unissent à Israël. Mais la population en Cisjordanie dispose des mêmes atouts que la courageuse population yéménite.
Tout comme Gaza ou le Yémen, la Cisjordanie est potentiellement apte à acquérir le savoir nécessaire à la fabrication de roquettes et de missiles. La technique de conversion des engins est d’ailleurs loin d’être complexe et elle s’exporte facilement. Un engin composé de 30 petites pièces pourrait être fabriqué dans 30 lieux différents avant d’être soumis au processus de montage. L’optimisation des engins est la phase suivante. C’est d’ailleurs suivant ce même processus que les Yéménites fabriquent et tirent leurs missiles contre l’agresseur saoudien. L’armée yéménite et Ansarallah ont tiré leurs premiers missiles d’une portée de 12 kilomètres. Mais la portée de leurs engins s’est progressivement élargie et elle en est désormais à 900 kilomètres.
Mais ce n’est pas tout. À tout moment, la situation en Jordanie voisine risque de basculer : c’est un pays où vivent au moins 4 millions de Palestiniens, soit la moitié de la population. Ces Palestiniens croient dur comme fer à la nécessité de la libération de leur patrie natale et ils ne sont pas prêts à oublier près de 70 ans d’occupation sioniste. Si d’aventure, cette population ou une partie d’elle se mettait à armer la Cisjordanie, Israël aurait du pain sur la planche. Et ce, sans compter la rage bien palpable qui s’est emparée de la population en Cisjordanie qui pourrait à tout moment la pousser à désarmer de force les militaires israéliens et à retourner ces armes contre les agresseurs.
Et ce jour-là, ainsi que l’a confirmé au cours de son dernier discours Nasrallah, le Hezbollah attend les Palestiniens au tournant. Nasrallah n’a pas l’habitude de parler en l’air. Quand il évoque la lutte armée comme une option réelle contre Israël, il sait de quoi il parle. Nasrallah a pesé la faisabilité d’un tel projet pour l’évoquer publiquement.