Le site d’information français Orient XXI a publié, le mercredi 11 octobre, un article condamnant la détention administrative en Israël et l’assimilant à un Guantanamo israélien.
Le Franco-Palestinien Salah Hamouri est incarcéré en Israël en vertu des ordonnances sur l’état d’urgence. Imposées par la puissance occupante britannique, elles étaient appliquées avant 1948 pour réprimer certains groupes sionistes, dont les dirigeants s’appelaient Menahem Begin ou Ytzhak Shamir, futurs premiers ministres d’Israël. Et étaient alors dénoncées par les juifs de Palestine comme « une violation flagrante des principes fondamentaux de la légalité et de la justice ». Pourtant, dès la création de l’entité israélienne, les Defense Emergency Regulations ont été utilisées contre la minorité palestinienne et, après 1967, dans les territoires palestiniens occupés. En 1966, le juriste palestinien Sabri Geries les avait longuement décrites.
Franco-Palestinien vivant à Qods-Est, Salah Hamouri est emprisonné par l’armée israélienne depuis le 23 août 2017. Arrêté sans qu’aucun motif ne lui ait été fourni, il est interné en vertu des ordonnances sur l’état d’urgence, les Defense Emergency Regulations, mises en œuvre par le gouvernement israélien pour juguler et réprimer le mouvement national palestinien. Celles-ci trouvent leur origine dans les règlements édictés par les forces d’occupation britanniques en Palestine en 1936 puis en 1939 et 1945 et réinsérées telles quelles par le gouvernement israélien dans son arsenal juridique dès 1949, au lendemain de la création de l’entité d’Israël. Ces ordonnances permettent aux forces de sécurité d’emprisonner une personne sans motif public ni jugement et sans qu’aucune information ne soit fournie à son avocat pour une période de six mois, renouvelable indéfiniment par un juge militaire.
Ces mêmes ordonnances avaient déjà permis aux forces israéliennes d’emprisonner Hamouri sans motif formel trois ans durant, entre 2005 et 2008. Entre-temps, la justice militaire israélienne a concocté un acte d’accusation où il fut accusé d’être membre d’une « organisation illégale » (le Front populaire de libération de la Palestine, FPLP). Hamouri n’a cessé de nier ce fait avant de plaider coupable sur les conseils de son avocate, dans l’unique but de voir sa peine divisée par deux, comme c’est le cas pour tous les prisonniers politiques palestiniens. Ce qui fut fait le 17 avril 2008. Trois mois avant d’avoir fini de purger sa peine, il a été libéré le 18 décembre 2011 avec 550 autres prisonniers dans un échange avec le soldat israélien Gilad Shalit.
Dans son chapitre intitulé « Les raisons de sécurité d’État », Sabri Geries détaille ensuite le contenu des ordonnances d’urgence imposées aux Palestiniens d’Israël. Celles-ci sont au nombre de 170, réparties en 15 chapitres. Ainsi l’article 119 « octroie au Gouvernement militaire le droit de confisquer ou détruire des bâtiments » sur la base d’un simple soupçon ; l’article 120 autorise l’armée à « confisquer les biens d’un individu » ; l’article 112 à « expulser toute personne à l’étranger, la déporter et lui interdire le retour au pays » ; les articles 122 et 126 autorisent les limitations de mouvement collectives pour des populations ciblées ; etc. Mais les deux les plus connus sont les articles 110 et 111. Le premier fixe les conditions de l’assignation à résidence. Le second « permet la détention administrative de toute personne que les autorités du gouvernement militaire décident de détenir, pour une raison ou une autre, de faire durer la détention indéfiniment, sans jugement, sans même l’inculper ». Il régit ce qui constitue de facto un Guantanamo légalisé qui perdure depuis bientôt 70 ans en Israël. Geries note d’ailleurs que la Cour suprême israélienne elle-même, et dans plusieurs décisions (qu’il cite), a admis n’avoir aucun moyen de contrôle sur ces ordonnances d’urgence.
Source : Orientxxi.info