La province syrienne d’Idlib est devenue le théâtre de règlements de compte sanglants entre d’anciens alliés, Riyad et Doha.
À mesure que la crise diplomatique opposant les deux capitales s’enlise, les terroristes que soutenaient les deux parties se livrent à des combats terriblement violents dont la portée dépasse le sol syrien. Les agences d’information ont fait état tout au long du mois de juillet d’affrontements sporadiques inter-terroristes sur les frontières syro-libanaises, affrontements qui ont d’ailleurs coûté la vie à plusieurs chefs terroristes. Mais les accrochages semblent désormais s’étendre à Idlib, cette province du nord de la Syrie qui abrite le gros des bataillons terroristes. Mais qui se bat contre qui ?
Ce sont les composantes du Jaish al-Fatah, milice née en 2014 suite à la fusion du Front al-Nosra (rebaptisé Tahrir al-Cham) avec d’autres milices comme Ahrar al-Cham, Jund al-Aqsa, Lawa al-Haq, Faliq al-Cham entre autres.
Cette coalition composée de 10 000 terroristes a été largement appuyée ces deux dernières années par le Qatar, la Turquie et l’Arabie saoudite avant qu’une crise politique n’éclate et n’envenime les relations de Riyad avec l’axe turco-qatari. Mais la crise qui a éclaté entre Riyad d’une part et Doha et Ankara de l’autre a changé le modus operandi : ceux des terroristes qui se revendiquent des Frères musulmans et donc du Qatar tentent désormais de s’emparer d’Idlib au détriment bien entendu, de l’aide pro-saoudienne de Jais al-Fatah.
Dans les combats fratricides qu’ils se livrent, les "ex frères d’armes" usent des mêmes méthodes qu’ils utilisent contre l’armée syrienne : assassinat ciblé, attentat à la voiture piégée... Fin juin, le mufti saoudien d’al-Nosra à Idlib a ainsi échappé à une tentative d’assassinat avant de quitter définitivement Idlib. La province est donc divisée entre les pro-Saoudiens et les pro-Qataris : al-Norsa (soutenu par Riyad) contrôle Sarmada, Jasr al-Choughour, Sarmin, Salqin, Haram et al-Dana tandis qu’Ahrar al-Cham, proche du Qatar et de la Turquie contrôle la ville d’Idlib et les gouvernorats de Kaf Nobol, Jabal al-Zawiya, Maa'rat al-Noman. Par ailleurs, l’emprise qu’impose al-Nosra sur le nord et le centre de la province d’Idlib a servi de prétexte à la Turquie pour se lancer dans une nouvelle offensive militaire contre le nord de la Syrie.
Où vont les Frères ennemis ?
S’il est vrai que les combats ont perdu de leur intensité depuis quelques jours, personne ne prédit leur fin : à mesure que la crise politique s’approfondisse entre Doha et Riyad, d’autres régions basculent dans des combats inter-terroristes : c’est une dynamique phagocytaire qui s’est déclenchée au sein des groupes takfiristes et qui risque de les emporter avec elle non seulement dans la banlieue de Damas, mais aussi à Quneitra, dans le sud-ouest d’Alep au nord de Hama. Les dissensions entre Riyad et Doha allant croissant, la coalition "Jaish al-Fatah" se trouve au bord de l’implosion et ceci, au grand bonheur de l’axe anti-terroriste : l’armée syrienne et ses alliés poursuivent leurs opérations pour pouvoir biser dans un avenir non lointain le siège des deux cités que sont al-Foua et Kefraya, encerclées depuis près de deux ans par les terroristes.