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De Gaza à la Californie : une liaison funeste !

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Des incendies violents ravagent Los Angeles depuis mardi 7 janvier (SIPA)

Par Ghorban-Ali Khodabandeh

Aux États-Unis, Los Angeles est ravagée par des incendies incontrôlables malgré les efforts des pompiers, avec des dizaines de morts et des milliers de maisons détruites. Les autorités admettent un manque de ressources, alors que plusieurs groupes et commentateurs ont établi un lien entre la guerre à Gaza et les dépenses militaires américaines en faveur d’Israël et les incendies catastrophiques.

Depuis le début des incendies de Los Angeles, l'un des principaux sujets de préoccupation des utilisateurs des réseaux sociaux a été de comparer les images bouleversantes de la bande de Gaza déchirée par la guerre avec le paysage apocalyptique de Los Angeles.

Des phrases telles que « Ce n'est pas Gaza, c'est Los Angeles » sont devenues virales sur les réseaux sociaux, illustrant la similitude entre les quartiers incendiés de Los Angeles et les zones déchirées par la guerre à Gaza. Beaucoup comparent les images de centaines de milliers d’Américains fuyant les incendies avec l’exode forcé de la population de Gaza.

Cette comparaison soulève une question fondamentale : le soutien inconditionnel des États-Unis à Israël a non seulement provoqué l'instabilité dans la région voir  dans le monde, mais encore entraîne des répercussions désastreuses sur la stabilité interne des États-Unis.

Pendant quinze mois, le monde entier a vu la terre et la population de Gaza brûler à travers les écrans et à présent, il regarde le ciel d’une ville américaine se remplir de fumée, les distances entre ces catastrophes s’effondrent en une vérité unique et brûlante : ces flammes parlent le même langage de destruction. Il s’agit d’une crise sans frontière.

Flammes à Los Angeles et à Gaza : une crise sans frontière

Des recherches menées par l’université de Lancaster ont révélé qu’au cours des soixante premiers jours qui ont suivi le 7 octobre, la réponse militaire à Gaza a généré plus de gaz à effet de serre que vingt nations vulnérables au climat n’en émettent en une année entière. En un seul mois – octobre 2023 – Israël a largué 25 000 tonnes de bombes sur Gaza, libérant des gaz à effet de serre équivalents à la combustion de 150 000 tonnes de charbon. Les vols cargo américains livrant des armes ont consommé 50 millions de litres de carburant d’aviation en décembre, rejetant 133 000 tonnes de CO2 dans notre atmosphère commune, soit plus que ce que la nation entière de la Grenade émet chaque année.

Mais cette catastrophe environnementale n’a pas commencé avec le génocide actuel. Pendant des décennies, les Palestiniens ont vécu et travaillé de manière durable avec leur environnement, en préservant les paysages indigènes et en cultivant une grande variété de produits, de la pastèque aux olives, ces dernières constituant un élément central de la culture et de l’identité palestiniennes.

Depuis 1967, Israël a systématiquement déraciné au moins 2,5 millions d’arbres dans le territoire palestinien occupé, dont près d’un million d’oliviers, qui constituaient la principale source d’alimentation et de revenus pour de nombreux Palestiniens. Israël a remplacé ces arbres par de la végétation européenne importée, reflétant peut-être ses propres racines européennes. Cette destruction a entraîné la fragmentation des habitats, la désertification, la dégradation des terres et l’érosion des sols qui affectent la résilience climatique de toute la région.

Chaque bombe qui tombe sur Gaza se répercute sur notre avenir collectif, son impact se faisant sentir par la montée des eaux, le réchauffement des températures et, oui, par les incendies qui menacent désormais les collines californiennes.

Aujourd’hui, les images satellite montrent des terres en friche là où poussaient autrefois les jardins. L’armée israélienne a détruit 70 % des puits d’eau du nord de Gaza, démoli des milliers de serres et transformé un sol fertile en terre toxique. Tout cela s’est produit parallèlement à la décimation de 80 % de toutes les infrastructures de Gaza. Rien qu’entre octobre 2023 et mars 2024, 48 % de la couverture arborée de Gaza a été perdue ou endommagée, soit détruite par des opérations militaires, soit coupée par des personnes désespérées cherchant du carburant sous le blocus.

Ce qui relie Gaza à la Californie : répercussions climatiques

L’ironie est d’autant plus frappante que le maire de Los Angeles a supprimé 17,6 millions de dollars à ses services d’incendie, tandis que la Californie a envoyé 610 millions de dollars à Israël par l’intermédiaire des contribuables. La Wonderful Company, qui contrôle près de 60 % de l’eau californienne par l’intermédiaire de la famille Resnick, injecte des millions pour soutenir l’expansion territoriale qui a transformé le paysage de Gaza en une catastrophe environnementale. Déjà, en 2025, Joe Biden tente de faire pression pour une « aide militaire supplémentaire de 8 milliards d’euros » afin de financer un génocide, alors que des milliers de citoyens américains, d’Ashville (Caroline du Nord) à Los Angeles, suffoquent sous l’effet de la crise climatique.

Les plaies environnementales de Gaza ne se refermeront pas facilement. Trente-sept millions de tonnes de débris jonchent désormais le paysage, un héritage toxique qui empoisonnera le sol et l’eau pendant des générations. Chaque jour, 130 000 mètres cubes d’eaux usées non traitées se déversent dans la mer Méditerranée, non pas parce que les Palestiniens ont choisi cette dévastation, mais parce que la violence israélienne a brisé leurs infrastructures, leur capacité à prendre soin de leur terre comme ils le font depuis d’innombrables générations.

Les flammes qu’on voit consumer les Palissades font écho aux souffrances de Gaza : des maisons réduites en cendres, des paysages transformés, des vies bouleversées. Mais elles portent aussi quelque chose d’autre – un avertissement urgent sur le destin commun de l’humanité. Lorsqu’on autorise le bombardement des nappes aquifères de Gaza et l’empoisonnement de son sol, on accélère la crise climatique qui embrase aujourd’hui la Californie.

Depuis 15 mois, les bombardements américano-israéliens sur Gaza ont libéré des quantités insensées de combustible fossile dans l’atmosphère tout en empoisonnant le sol à chaque obus. Israël a récemment fait exploser une « bombe sismique », qui, selon certains rapports, aurait pu être nucléaire.

Le génocide de Gaza a dévasté l’écosystème et rendra la survie de l’agriculture extrêmement difficile dans tout effort de reconstruction éventuel. Des bases militaires dans le monde entier, agrandies pour une escalade inutile avec la Chine, ont entraîné la contamination des sols par des produits chimiques toxiques, ce qui nuit aux sols. La biodiversité est en danger à l’échelle mondiale.

L’écocide de Gaza, reconnu comme un crime de guerre par le Statut de Rome, n’est pas seulement une tragédie lointaine. C’est un signe avant-coureur de l’avenir collectif si l’on continue à permettre que la guerre environnementale et le génocide ne soient pas contestés.

Incendies à Los Angeles : les États-Unis accusés d’hypocrisie

Tout au long des années, le gouvernement américain a accusé les autres pays d’utiliser l’argent de leurs contribuables pour leurs propres aventurismes au lieu de le dépenser au profit de leurs nations. Aujourd’hui, en plein incendie dévastateur à Los Angeles, de nombreux Américains se demandent pourquoi l’administration états-unienne devrait dépenser des milliards de dollars pour attiser les flammes de la guerre à Gaza et en Ukraine,  alors qu’elle ne dispose pas d’infrastructures nécessaires pour protéger les citoyens américains face à une catastrophes comme celle de Los Angeles.

Pourquoi les États-Unis devraient-ils alors dépenser des milliards de dollars pour leur présence militaire directe dans plus de 130 pays à travers le monde ? Pourquoi l’argent des contribuables américains ne devrait-il pas être utilisé pour les protéger en temps de crise comme la situation actuelle à Los Angeles ? Au cours de la dernière année, le gouvernement américain a alloué à plusieurs reprises des milliards de dollars à Israël et à l’Ukraine, contribuant au massacre des milliers d’innocents.

Or, si seulement une petite partie de cet argent avait été consacrée au peuple américain et à la création d’infrastructures essentielles, les États-Unis n’auraient pas été confrontés aux conséquences désastreuses d’un événement tel que l’incendie de Los Angeles.

La branche new-yorkaise de l’organisation antisioniste La voix juive pour la paix, a déclaré dans une publication Instagram sur les incendies que « plutôt que de consacrer des ressources à rendre notre pays vivable, notre gouvernement dépense des milliards pour le génocide des Palestiniens de Gaza par Israël ».

Dans les deux cas, les intérêts de l’économie de guerre qui donne la priorité aux personnes au pouvoir sont ce qui prime sur le respect des pratiques de protection et de la vie des autochtones. Ce qui brûle aujourd’hui en Palestine et à Los Angeles est le symptôme d’une même maladie : un système qui valorise la conquête au détriment de la conservation, le profit au détriment des personnes, l’expansion au détriment de l’existence.

Ghorban-Ali Khodabandeh est journaliste et analyste politique iranien basé à Téhéran.

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SOURCE: FRENCH PRESS TV