Par Xavier Villar
La Cour internationale de justice (CIJ), l'un des six organes des Nations unies, a déclaré que la présence d'Israël dans les territoires palestiniens occupés est illégale et doit cesser « dès que possible ».
Vendredi, le président de la CIJ, Nawaf Salam, a présenté l’avis consultatif non contraignant d’un panel de 15 juges concernant l’occupation israélienne de la Palestine qui a été largement couvert par les médias.
L’avis consultatif détaille une série de politiques israéliennes qui, selon la Cour, violent le droit international. Il s’agit notamment de la construction et de l’expansion de colonies en Cisjordanie et à Qods-Est occupées, de l’exploitation des ressources naturelles, de l’annexion et du contrôle prolongé de terres, ainsi que de pratiques discriminatoires à l’encontre des Palestiniens.
La Cour suprême des Nations unies a conclu qu'Israël n'avait pas le droit d'exercer sa souveraineté sur ces territoires, soulignant que l'entité violait les lois internationales qui interdisaient l'acquisition de terres par la force et faisait obstacle au droit des Palestiniens à l'autodétermination.
« La construction de colonies israéliennes en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, ainsi que le régime qui leur est associé, ont été établis et maintenus en violation du droit international », a-t-il déclaré.
Le ministre palestinien des Affaires étrangères, Riyad Maliki, a décrit cette décision comme un « moment décisif pour la Palestine, la justice et le droit international » dans une déclaration aux médias à La Haye.
M. Maliki a salué la décision de la CIJ, soulignant que « la Cour a rempli ses devoirs juridiques et moraux avec cette décision historique ». Il a également exhorté les États à respecter leurs obligations et à éviter toute forme de soutien à l'occupation israélienne, y compris l'assistance, le commerce et les armes.
En réponse, le ministère israélien des Affaires étrangères a rejeté la résolution, la qualifiant de « fondamentalement incorrecte et partiale ». Le bureau de Benjamin Netanyahu a publié un communiqué qualifiant la décision de « décision basée sur des mensonges » qui déforment la réalité, affirmant que « le peuple juif n'est pas un occupant sur sa propre terre ».
D’un point de vue politique, le sionisme, comme d’autres projets coloniaux, doit justifier son objectif en termes de civilisation. Dans ce contexte, on peut rappeler Theodor Herzl, l’austro-hongrois fondateur du mouvement raciste sioniste, qui décrivait en 1896 la future colonie comme « un bastion de l’Europe contre l’Asie, un avant-poste avancé de la civilisation contre la barbarie ».
En 1936, Chaim Weizmann, le chef de l’Organisation sioniste, décrivait les Palestiniens comme « les forces de destruction, les forces du désert » et les colons juifs comme « les forces de la civilisation et de la construction ». Cette justification civilisationnelle révèle que, depuis sa création, l’entité sioniste a formulé son discours en termes coloniaux, cherchant à éliminer les Palestiniens autochtones.
L’historien Patrick Wolfe note que « les colonies de peuplement sont fondées (et étaient fondées) sur l’élimination des sociétés autochtones… Les colons viennent pour rester : l’invasion est plus qu’un événement, c’est une structure ». Dans la pratique, le colonialisme israélien se manifeste à travers divers mécanismes destinés à consolider les faits accomplis, tels que la construction de colonies, la colonisation économique et l’occupation militaire. Ces mécanismes visent à justifier l’annexion administrative et juridique des territoires palestiniens.
C’est pour cette raison que la Palestine peut être considérée comme un « laboratoire des processus mondiaux de domination et de dépossession ». Dès sa fondation et même avant, une logique coloniale s’est instaurée. Malgré les tentatives sionistes de présenter le pays comme inhabité, la Palestine avait, et a toujours, une population autochtone.
Le projet d’élimination de la population autochtone était présent dès le début. Entre le 30 novembre 1947 et le 14 mai 1948, plus de 400 000 Palestiniens furent déplacés de leurs foyers et se retrouvèrent sans abri. En décembre 1948, 350 000 autres subirent le même sort.
En 1947, le Premier ministre israélien de l’époque avait explicitement déclaré que l’objectif du sionisme était de « conquérir le pays, dans son intégralité ou en grande partie, et de perpétuer cette conquête jusqu’à ce qu’un accord politique soit trouvé ».
Après la guerre des Six Jours de 1967, Israël a continué d'étendre son occupation à de nouveaux territoires palestiniens. Des colonies israéliennes ont été établies dans des zones d'où la population locale avait été expulsée, interdite de retour et dont les biens avaient été confisqués, conformément à la loi israélienne de 1950 sur les biens des absents.
La première colonie, Kfar Etzion, située entre Qods occupée et Hébron, a marqué le début d’une série de soi-disant « colonies de sécurité ».
Ces colonies n’étaient pas destinées à l’exploitation agricole des terres mais à l’appropriation territoriale et sont donc considérées comme faisant partie intégrante de la colonisation de peuplement.
Conformément à l’article 49, paragraphe 6, de la Quatrième Convention de Genève et à la résolution 242 de l’ONU de novembre 1967, la création et l’expansion de colonies dans les territoires occupés sont considérées comme illégales au regard du droit international.
Plusieurs experts soulignent qu’en plus des signes visibles de cette colonisation – tels que les colonies fortifiées, les « avant-postes », le mur de séparation, les clôtures, les points de contrôle, les panneaux, la présence militaire omniprésente, le reboisement stratégique et les propriétés détruites – il existe une dimension invisible de la colonisation.
Cet aspect caché comprend des restrictions administratives qui limitent l’exploitation de la terre et la libre circulation des Palestiniens, comme un régime de permis, des zones militaires « fermées » et des routes de « contournement ».
L’occupation illégale se poursuit. En 2020, il y avait au moins 132 colonies israéliennes officielles et 124 « avant-postes » non officiels en Cisjordanie occupée, abritant environ 427 800 colons.
Ces zones comprennent 18 zones industrielles, qui font partie intégrante du système économique du régime israélien illégitime et illustrent clairement la « colonisation économique ».
Dans les territoires palestiniens occupés, la colonisation progresse par une appropriation territoriale planifiée sous forme de « morsures » successives.
La colonisation économique complète cette stratégie, en établissant un rapport de domination qui paralyse l’activité palestinienne et restreint son développement, empêchant ainsi une vie autonome.
La décision de la Cour internationale de justice (CIJ) affirme non seulement l’illégalité de l’occupation sioniste au regard du droit international, mais va également plus loin.
La juge Hilary Charlesworth a déclaré dans son verdict que « selon le droit international coutumier, la population du territoire occupé ne doit pas allégeance à la puissance occupante et n’est pas empêchée d’utiliser la force, conformément au droit international, pour résister à l’occupation ».
D’un point de vue juridique, cette décision constitue un acte d’accusation dévastateur contre Israël.
Concernant Gaza, la Cour précise que le territoire reste occupé. Elle reconnaît également le régime raciste qui règne dans les territoires occupés. La décision mentionne explicitement qu'Israël applique un traitement inégal aux Palestiniens, qui ne peut être justifié par des critères objectifs ou des objectifs légitimes.
En conclusion, la CIJ affirme que la présence israélienne dans les territoires palestiniens occupés est illégale et que le régime est tenu de mettre fin à son occupation dès que possible, y compris à Gaza.
La décision reconnaît ainsi la nature coloniale d’Israël et ses politiques racistes envers les Palestiniens autochtones.
Xavier Villar est docteur en études islamiques et chercheur basé en Espagne.
(Les opinions exprimées dans cet article ne reflètent pas nécessairement celles de Press TV)