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Crimes de guerre israéliens à Gaza : comment se positionne la France ?

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Crimes de guerre israéliens à Gaza : comment se positionne la France ?

Par Ghorban-Ali Khodabandeh

Crimes de guerre israéliens à Gaza : comment se positionne la France ?

Le président français a assuré vendredi 16 février qu’une reconnaissance unilatérale d’un État palestinien n’était plus « un tabou pour la France ». Une prise de position malgré les mises en garde d’Israël face à cette perspective qui s’esquisse chez certains alliés occidentaux. Face à l’inquiétude de la communauté internationale concernant le sort de la population palestinienne et les crimes de guerre israéliens à Gaza, Emmanuel Macron a par ailleurs imploré Benjamin Netanyahu mercredi 14 février de « cesser » les agressions à Gaza, estimant que « le bilan humain et la crise humanitaire » sont « intolérables ». Le compte rendu de cet appel entre Paris et Tel-Aviv montre donc que la France tâche tant bien que mal de freiner les agressions militaires d’Israël quitte à lui faire pression comme cela a été le cas ces derniers jours. Reste à savoir si ce changement de ton pourra dépasser les condamnations verbales et se traduire en actions concrètes pour la cessation des crimes de guerre israéliens à Gaza.

« La reconnaissance d’un État palestinien n’est plus un tabou pour la France »

Depuis les frappes israéliennes massives contre Gaza, Paris affirme que seule la « solution à deux États », israélien et palestinien, peut sortir la région de l’ornière. Et se réjouit que cette vieille idée, en sourdine pendant des années, ait été remise à l’ordre du jour par les États-Unis.

Mais la France a, pour une des rares fois, fait un grand pas en menaçant d’un feu vert unilatéral qui résulte de l’absence d'une volonté israélienne d’aboutir à une telle solution par des négociations. Il faut lui donner « un élan décisif et irréversible », a ainsi martelé vendredi le président français.

Après avoir été au cœur des négociations menées sous l’égide des États-Unis à la fin des années 1990 et au début des années 2000, cette perspective est au point mort depuis des années.

Près de 140 pays ont reconnu unilatéralement un État palestinien, mais aucune grande puissance occidentale ou membre du G7. Certes, une reconnaissance française ou européenne, voire américaine, aura un poids diplomatique. Mais en brandir la menace apparaît comme un moyen de pression supplémentaire sur Israël.

Les déclarations d’Emmanuel Macron interviennent alors que plusieurs signes en faveur d’une possible reconnaissance occidentale se sont manifestés récemment. L’Espagnol Pedro Sanchez estime, quant à lui, que reconnaître un État palestinien était « dans l’intérêt de l’Europe », sans écarter une décision unilatérale.

Macron dit à Netanyahu que les opérations israéliennes doivent cesser

Des mois se sont écoulés, une guerre d’une violence inouïe a été lancée contre Gaza, des dizaines de milliers de Palestiniens sont morts, et le gouvernement français, après avoir soutenu Israël dans ses velléités agressives, se contente de plaider trop mollement pour le cessez-le-feu.

Au cours d’un appel téléphonique mercredi 14 février 2024, le Président français a exprimé la ferme opposition de la France à une offensive israélienne à Rafah, qui n'aurait d'autre résultat qu'un désastre humain d’une nouvelle magnitude, ce qui constituerait des violations du droit international humanitaire, des crimes de guerre et augmenterait le risque d’une escalade régionale de nouvelles envergures.

Certes, le 14 février, Emmanuel Macron a haussé le ton en mettant en cause un « bilan humain et une situation humanitaire intolérables ». Mais aucun projet de sanction contre Israël ne semble à l’étude, sinon à l’encontre de quelques colons extrémistes frappés d’interdiction administrative du territoire français.

Dès le début des bombardements israéliens à Gaza, le principe directeur du président français Emmanuel Macron a été un soutien inconditionnel à Tel-Aviv. Macron est depuis lors allé plus loin en appelant à un cessez-le-feu, mais c’était trop peu et trop tard, avec des demandes de pure forme d’épargner les civils et en fermant les yeux sur les crimes de guerre et les actes génocidaires commis par Israël.

La France risque de devenir complice des crimes de guerre à Gaza

« La France a l'obligation juridique et morale d'agir pour Gaza, la France doit saisir d'urgence la CPI, si la France n'agit pas, elle devient complice des crimes de guerre israéliens à Gaza », tels étaient les messages moteurs d'une proposition de résolution initiée par 67 députés de l'opposition française pour amener le gouvernement à saisir la Cour pénale internationale sur la situation à Gaza.

Dans leur résolution, les députés signataires de la proposition exigent également que toutes les personnes impliquées dans des crimes de guerre israéliens à Gaza et des crimes contre l'humanité soient poursuivis et sanctionnés.

L'armée israélienne mène une guerre dévastatrice contre la bande de Gaza, depuis le 7 octobre dernier, faisant, jusqu'à ce jour, plus de 30 000 morts et de 70 000 blessés, pour la plupart des femmes et des enfants. La guerre génocidaire a provoqué une catastrophe humanitaire sans précédent, doublée d'une destruction massive des infrastructures, au point de traduire Tel-Aviv devant la Cour internationale de Justice pour crimes de guerre et de génocide, suite à une plainte de l'Afrique du Sud.

Des Français participent aux crimes de guerre israéliens à Gaza

Alors que l’armée Israélienne se livre, depuis le 7 octobre dernier, à un véritable massacre dans la Bande de Gaza, 4 185 Français ou Franco-israéliens sont engagés dans ses rangs. La présence des citoyens français et de binationaux dans l’armée israélienne est une réalité avérée depuis de nombreuses années.

Or, cette armée est aujourd’hui impliquée dans ce qu’il faut bien appeler un « génocide en cours », selon les termes de la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH). La requête pour génocide que vient de déposer l’Afrique du Sud contre Israël devant la Cour internationale de Justice (CIJ) souligne encore davantage la gravité des crimes de guerre israéliens à Gaza. Ce contexte de génocide, avec tous les crimes de guerre qui l’accompagnent, rend la présence de ces Français et Franco-Israéliens dans les rangs de l'armée israélienne encore plus problématique de même que les colons français et franco-israéliens vivant dans les colonies illégales en Cisjordanie et à Qods-Est, ont des comptes à rendre pour leur implication dans les exactions contre les populations palestiniennes.

Cette situation qui révolte l'opinion publique française et bien au-delà est mise en lumière par des prises de position courageuses émanant de diverses couches de la société française. C’est en particulier le cas à gauche de l’échiquier politique, où le député de La France insoumise (LFI), Thomas Portes, réclame des poursuites contre les Français impliqués dans les crimes de guerre israéliens à Gaza.

L’hypocrisie de l’Occident envers les crimes israéliens est révoltante

Le soutien indéfectible des pays occidentaux en l’occurrence la France à Israël suscite colère et indignation auprès de l’opinion publique mondiale.

Au cours des décennies, les civils palestiniens à Gaza ont subi carnage après carnage de la part d’Israël engendrant bien plus de souffrances, mais qui n’ont jamais suscité la moindre inquiétude exprimée par les politiciens en Occident. Les circonstances actuelles font tomber les masques et exposent le racisme sans fard qui se fait passer pour une inquiétude morale dans les capitales occidentales.

La punition collective de deux millions de Palestiniens à Gaza, qui dépendent d’Israël pour l'électricité - puisqu'Israël encercle et contrôle chaque aspect de leur vie dans la bande de Gaza, constitue un crime de guerre.

Bizarrement, les dirigeants occidentaux avancent que cela ne constitue un crime de guerre que lorsque la Russie bombarde les centrales électriques en Ukraine, exprimant l'espoir que le président russe Vladimir Poutine sera traduit devant la Cour pénale internationale à La Haye. 

Les Israéliens et les Occidentaux peuvent continuer leurs acrobaties mentales pour justifier les crimes de guerre israéliens à Gaza, mais leur hypocrisie et duplicité sont désormais exposées à l'opinion publique du monde entier.

Les dizaines de milliers de Palestiniens tués et mutilés par les bombardements israéliens à Gaza auraient pu être sauvés, si ces puissances avaient honoré leurs obligations en matière de droit humanitaire international. Or, elles ont fait le contraire en offrant une couverture politique, économique et militaire aux actions génocidaires et aux crimes de guerre à Gaza.

Ceci étant, le président français est-il conscient qu’il est en train de se rendre complice de crimes de guerre israéliens à Gaza ? Se rend-il compte des dégâts irrémédiables qu’il est en train d’infliger à la réputation internationale de la France et aux valeurs dont elle prétend être porteuse ?

Ghorban-Ali Khodabandeh est un journaliste et analyste politique iranien basé à Téhéran.

(Les opinions exprimées dans cet article ne reflètent pas nécessairement celles de Press TV.)

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SOURCE: FRENCH PRESS TV