Cela fait un bon bout de temps qu’Américains, Israéliens et Saoudiens justifient chacune de leurs interventions militaires au nom de la lutte contre "l’influence iranienne".
Le croissant chiite, l’axe iranien, le néo empire perse, l’hégémonie iranienne: les termes ne manquent pas pour dénoncer le « diable » qu’est l’Iran. Mercredi à Istanbul où tous les pays musulmans s’étaient réunis au chevet de Qods, les hauts responsables égyptiens, tout comme leurs homologues saoudiens, ont brillé par leur absence.
Les premiers pour cause de soutien d’Ankara aux Frères musulmans et les seconds, puisque la Turquie est proche du Qatar. Au fait, Le Caire et Riyad n’aimaient point voir Ankara se hisser à la tête du tollé anti-israélien du monde arabo-musulman.
L’Iran, lui, y a pris part au plus haut niveau sans aucune considération ni complexe. Pour rappel, jusqu’en l’an 2000, Riyad et Téhéran entretenaient des liens plus ou moins cordiaux. En 2007, l’ancien président iranien Mahmoud Ahmadinejad a même participé au Conseil de Coopération du golfe Persique. Ce rapprochement, s’il se poursuivait au même rythme, aurait pu devenir un danger existentiel pour Israël. Israël a donc attaqué en 2006 le Liban.
Mais au bout de 33 jours, l’effet escompté ne s’est pas produit. La défaite de Tel-Aviv et la victoire du Hezbollah ont fait de ce mouvement le héros de la rue arabe. Après de multiples revers, l’opinion musulmane a senti à quel point le mythe d’invincibilité d’Israël est irréel et non fondé et comment la volonté et la foi pourraient rendre possible l’impossible.
La victoire de 2006 était bien présente dans les esprits quand fut déclenché en 2011 le printemps arabe. Ce printemps a été pour beaucoup un projet américain.
Cependant et à la lumière des faits, il existe peut-être une autre lecture de cet événement qui a si profondément marqué l’histoire de la région : la rue arabe ne voulait guère de démocratie importée de l’Occident, identique à celle que l’invasion américaine prétendait avoir établie en Afghanistan ou en Irak. Elle voulait d’un système politique qui sache marier le souverainisme et l’indépendance à la foi religieuse et qui soit à même de rendre les pays musulmans capables de tenir tête aux grandes puissances.
Pas un seul rapport n’indique l’ingérence iranienne en Tunisie, en Égypte, en Libye, au Yémen ou à Bahreïn lors des révolutions arabes de 2011. En Syrie et en Irak non plus, l’Iran n’y était, quand le terrorisme takfiriste ou Daech a fait surface entre 2012 et 2014. Quant au Qatar qui a combattu l’État syrien et son allié iranien jusqu’à la dernière cartouche, le discours saoudien a aussi du mal à convaincre : c’est la politique de Riyad qui a poussé Doha dans les bras de Téhéran.
L’ingérence iranienne contre quoi Riyad dit se battre même au prix de sacrifier la Palestine n’a pas de réalité. L’ingérence s’il y a, n’est ni de nature politique encore moins de nature militaire. Elle est mentale, idéologique. À preuve, sept ans de guerre saoudienne en Syrie n’ont pas fait aimer Riyad aux sunnites palestiniens. À Qods, ils brûlent ces jours-ci les portraits de ben Salmane avec les drapeaux américains et israéliens tandis que cette même foule arbore fièrement les photos de Soleimani, commandant en chef de la Force Qods iranienne.
Sputnik persan
Traduit par Press TV