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L'Égypte s'est éloignée de Riyad

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
Le portrait du président Assad accroché dans l'un des quartiers de l'est d'Alep. ©L'Express

Le soutien désormais patent de l'Égypte d'Al-Sissi à la Syrie a poussé les commentateurs à en chercher la raison, surtout que ce soutien coûte de plus en plus cher au président égyptien. L'Arabie saoudite en veut beaucoup à l'homme fort du Caire qui a choisi de se ranger aux côtés des Russes et des Iraniens pour défendre la souveraineté de l'État syrien.

Mais pourquoi ce choix qui se fait d'ailleurs avec fracas, vaut à Sissi les foudres sans précédent de Riyad? 

1- L'affaiblissement de la Turquie: tout le monde connaît à quel point le général égyptien voue aux gémonies la confrérie des Frères musulmans et le régime d'Erdogan qui en est le principal soutien. Le coup d'état qui l'a propulsé au pouvoir en 2013, en lieu et place de Morsi, s'est même soldé par une violente vague de répression. Depuis, cette haine s'est étendue à la Turquie d'Erdogan qui n'a jamais caché son désir de voir certains terroristes de tendance "frériste" accéder au pouvoir en "Syrie de l'après Assad". Le soutien au gouvernement Assad permet de contrer la Turquie en Syrie. 

 2- A travers la Syrie, l'Égypte d'Al-Sissi croit voir en quelque sorte son propre avenir, si elle continue de faire confiance à l'Arabie saoudite. Les propos tenus par Sameh Choukri, ministre égyptien des Affaires étrangères, devant l'Assemblée générale de l'ONU, ont bien prouvé que le choix du Caire va désormais dans le sens d'un éloignement par rapport à Riyad. Al-Sissi ne veut à aucun prix voir un bain de sang à la syrienne chez lui et ne cherche nullement à mettre en danger la sécurité nationale pour une poignée de pétrodollars ou quelques promesses creuses. 

3- En outre, Daech s'est déjà infiltré dans le Sinaï égyptien. Le groupe terroriste " Ansar Beit-ol-Moqadas" qui revendique régulièrement des attentats contre l'armée égyptienne, est une branche de Daech et le Caire a peur de voir, comme en Syrie, certaines fractions des Frères musulmans rallier à la cause de Daech et se radicaliser. 

4- Le Président a par ailleurs les yeux rivés sur les toutes dernières évolutions aux États-Unis. L'élection de Trump et le discours pro-Moscou de ce dernier semblent avoir donné plus de cran à Al-Sissi qui n'hésite plus à clamer son soutien au gouvernement syrien et à la lutte que ce dernier mène contre le terrorisme. 

5- Al-Sissi a tourné le dos à Riyad puisque la politique saoudienne est propre à inspirer la méfiance: qui dit que Riyad n'irait pas faire à l'Égypte le même coup qu'il a fait à Assad ? Après tout, Al-Sissi se rappelle bien comment l'Arabie saoudite, alors qu'elle entretenait de bonnes relations avec Hafez al-Assad, a trahi le dictateur irakien Saddam. Et puis, si la Syrie échoue face aux terroristes, son implosion provoquerait le chaos dans toute la région et les terroristes qui se multiplieront, ne tarderont pas à affecter la sécurité égyptienne. Daech et consœurs qui vivent aux dépens de Riyad, ont affirmé à plus d'une reprise leurs velléités expansionnistes à travers tous les pays musulmans. Qu'adviendrait-il alors de l'Égypte ? 

6- Et enfin, la puissante armée égyptienne qui agit dans l'ombre du général Al-Sissi compte des courants qui croient que le sort de l'Egypte est lié à celui de la Syrie. Selon ces courants, la sécurité égyptienne est inhérente à celle de la Syrie. Les armées des deux pays se sont d'ailleurs battues, à plusieurs reprises, l'une à côté de l'autre et contre des menaces conjointes. 

Les pressions saoudiennes pourront donc redoubler. L'Égypte, elle, semble avoir fait son choix...  

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SOURCE: FRENCH PRESS TV