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Le Yémen, un bourbier grandeur nature !

Les comités de résistance populaire yéménites, le 15 octobre 2015. ©AFP

Ce vendredi 25 mars 2016 coïncide avec le premier anniversaire de la guerre déclenchée par Riyad contre le Yémen. Bien que le royaume wahhabite continue de défendre sa guerre, le bilan de près d’un an d’intervention militaire au Yémen n’est pas défendable. Pourquoi ?

C’est sous prétexte de ramener au pouvoir un président démissionnaire et en fuite, en la personne de Mansour Hadi, que Riyad a lancé le 25 mars dernier ses chasseurs à l’assaut de l’un des pays les plus pauvre du monde arabe. L'Arabie saoudite a argué de la légitimité d’un « chef d’Etat » qui, rompant le dialogue politique, a choisi de quitter, déguisé, son lieu de résidence à Aden pour Riyad, avant de demander très solennellement à son hôte d'écraser sous les bombes le peuple qui l'avait désigné comme son président. Et l'Arabie saoudite obtempéra ! 

Riyad, dont les frappes aériennes ont fait, selon les instances internationales, plus de 6300 morts, des milliers de blessés et des centaines de milliers de déplacés, a réduit en cendres les infrastructures yéménites, provoquant l’exode des civils dans les pays voisins d'Ethiopie et de Djibouti. Or, le peu d’images diffusées de ces réfugiés, affamés et entassés dans des camps de fortune, suffit pour ternir l’image déjà écornée du royaume wahhabite, à qui Amnesty international et Human Rights Watch reprochent sa cruauté et ses pratiques barbares. N’est-ce pas là une cuisante défaite en termes d’image dans un monde dominé par « la logique du visuel » ? D'aucuns diraient, et non sans raison, que c'est trop cher payé pour une guerre qui n’a ni ramené Mansour Hadi au pouvoir ni contribué à désarmer « les bêtes noires de Riyad » à savoir les chiites houthistes...

Revenons à présent à la coalition que l’Arabie saoudite se targue d’avoir formée sur le dos du peuple yéménite, une coalition qui réunirait en son sein les amis et alliés des Saouds mais qui, toute raison gardée, n’a cessé de montrer ses failles dès sa naissance. Pressé sous le poids de dépenses militaires faramineuses, et ce sur fond de chute vertigineuse des cours du pétrole, Riyad a vu les membres de ladite coalition le délaisser les uns après les autres. Aux premières semaines du conflit, la Turquie et le Pakistan ont choisi de se soustraire, suivis de peu de l’Egypte de Sissi qui, par manque de confiance en les méthodes saoudiennes, ne s’est jamais réellement engagée dans les combats. De cette coalition « sacrée » sur laquelle Riyad comptait pour faire preuve de son "autorité "et de son leadership sur le monde « sunnite », il ne reste plus désormais qu’un nom et des ombres : ceux des mercenaires de Hadi qui se battent tant bien que mal sur le sol yéménite, quand ils ne s'y livrent pas, tels des chiens enragés, à des combats fratricides.

 Et sur le plan militaire ?

Le fiasco n’en est que plus grand en termes militaires pour une armée saoudienne, qui en douze mois d’intervention n’a réalisé aucune victoire digne de ce nom. Dans le cas du port d’Aden, la seule prise importante des Saouds, ce sont à vrai dire l’armée yéménite et son allié Ansarallah qui ont choisi de s’en retirer. Encore fallait-il que Riyad et son allié émirati puissent y faire régner l’ordre, ce dont ils se sont montrés bien incapables, le port stratégique étant désormais le théâtre des règlements de comptes saoudo-émiratis, Riyad et Abou Dhabi s’efforçant mutuellement de s'y damner le pion.

Charles Schmitz, l’analyste de l’Institut de recherche sur le Moyen Orient à Washington, voit juste quand il dit :

« Les forces de Saleh et les Houthis sont devenus un véritable casse-tête pour Riyad. Ils n’ont ni armée de l’air, ni stocks d’armes mais continuent comme par miracle à préserver leur force militaire. Pire, on ne sait d’où ils parviennent à se procurer des missiles et à provoquer des pertes dans les rangs saoudiens » !!

La défaite de Riyad est encore plus perceptible quand on pense que l’équipée militaire de Riyad au Yémen a permis à Al Qaida puis à Daech de s’emparer de pans entiers de terres yéménites, allant jusqu’à penser à ériger leur propre émirat. Et ce dans un contexte d’extrême tension en Europe, où le danger des attentats se fait bien palpable, poussant l’opinion à exiger de leur dirigeant une plus grande fermeté vis-à-vis des Etats dont les accointances pro-takfirsites ne sont secrètes pour personne.

Alors, l’agression contre le Yémen, une victoire pour Riyad ? Rien n’est moins sûr même si M. Adel al Jubeir voudrait faire croire le contraire, lui qui dans son récent entretien sur CNN accusait les instances de défense des droits de l’homme d’exagérer le bilan des pertes civiles, tout en faisant endosser à Ansarallah, au Hezbollah et bien sûr à l’Iran, la responsabilité d'une guerre qui a démontré encore une fois une chose : la nullité stratégique d'un royaume qui, prisonnier de ses préjugés, peine à en finir avec son éternelle logique de jouer à somme nulle.  

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SOURCE: FRENCH PRESS TV