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Iran/Arabie saoudite : quelles sont les chances d'une possible détente?

US Rep. Ilhan Omar (D-MN) (L) talks with Speaker of the House Nancy Pelosi (D-CA) during a rally with fellow Democrats before voting on H.R. 1, or the People Act, on the East Steps of the US Capitol on March 08, 2019 in Washington, DC. (AFP photo)
L’Arabie saoudite a rompu ses relations diplomatiques avec l'Iran en 2016.

Du fait des mutations économiques, démographiques et militaires déterminantes dont le monde fait l’objet et de sa concurrence avec la Chine, l’administration américaine a ajusté sa stratégie et sa politique étrangère pour se concentrer sur le Moyen-Orient, opérant ainsi à un « recadrage » géopolitique.

Les alliés moyen-orientaux des États-Unis se sentent passablement abandonnés. Or, dans cette conjoncture, l’Arabie saoudite et Israël tentent de ramener leur principal acolyte dans leur giron en poursuivant deux projets distincts.

Dans tous ses jeux régionaux, le grand objectif de l’Arabie saoudite est de s’octroyer le titre de « grand frère » des Arabes et de devenir le leader du monde sunnite.

Les relations de Riyad avec le régime de Tel-Aviv mettront alors fin à la légitimité de l’Arabie saoudite dans le monde arabe. Les « timoniers » saoudiens s’en méfient, car non seulement ils ne sont pas en mesure de soutenir à long terme Israël face aux chiites et aux sunnites partisans des Frères musulmans, mais la situation ne permettra pas un soutien explicite de Tel-Aviv à Riyad dans les affaires internationales puisque l’un des plus grands attributs du leadership du monde arabe est la confrontation directe avec le régime israélien. 

C’est justement ce que l’Iran, en tant que leader de la lutte contre le despotisme, a réussi à faire en fidélisant de nombreuses personnes du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord.

Au niveau militaire, après l’invasion des États-Unis en Irak et en Afghanistan, Riyad, le héraut des ambitions régionales de Washington, s’est servi de ces deux pays comme de leviers de pression militaire sur le gouvernement iranien. Mais faute d’une compréhension exacte des structures sociopolitiques de l’Afghanistan et de l’Irak, c’est désormais l’Arabie saoudite qui se retrouve, au nord et au sud, encerclée par les forces loyales à l’Iran. 

Au niveau diplomatique, Riyad a opté pour des mesures frontales à l’égard de l’Iran dans le but de ternir son image sur la scène internationale : gel des relations diplomatiques, soutien public au groupuscule des Monaféghines et perturbation de la participation des pèlerins iraniens au Hajj.

Cependant, le manque d’expérience politique des dirigeants saoudiens a attisé le conflit avec l’Iran, que le royaume wahhabite avait lui-même enclenché. Leurs stratégies ont essentiellement consisté à :

1. Isoler l’Iran, ce qui, avec l’établissement des relations diplomatiques de Téhéran avec l’Occident, était une tentative quasiment vouée à l’échec. Elle n’a eu d’effet que sur les petits pays du golfe Persique, et ce de façon superficielle.

2. Provoquer une guerre par procuration et un conflit entre les acteurs du front de la Résistance et les terroristes takfiristes. Après la montée des affrontements en Syrie et en Irak, l’Arabie, qui finance les groupes terroristes, a transformé les luttes intestines en des guerres à grande échelle. 

3. Créer un clivage entre le chiisme et le sunnisme dans le but d’affaiblir les forces alliées de l’Iran au Liban, en Syrie, en Irak et au Yémen. Les politiques de contre-attaques multiconfessionnelles du gouvernement de Damas, les groupes irakiens soutenus par l’Iran, le mouvement Ansarallah du Yémen et le Hezbollah libanais ont réussi à déjouer ce plan des Saoudiens qui, par ailleurs, ont envisagé à un moment donné de démembrer l’Iran ; cela ressemblait plutôt à une grosse farce qu’à une stratégie.

4. Déclencher une guerre économique basée sur l’énergie. L’Arabie a essayé de maintenir le prix du pétrole au plus bas pour affaiblir l’Iran, qui s’est vu obligé d’augmenter sa production. L’hostilité acharnée de l’Arabie n’a pas seulement affecté l’économie iranienne, mais a aussi touché la société saoudienne. Car les guerres économiques au Moyen-Orient, avant de reposer sur des questions géopolitiques, s’échafaudent sur un système économique mondial dans lequel les Saoudiens sont confinés à un rôle de simple exécutants.

Or, les dirigeants du royaume saoudien se sont accoutumés à entretenir une adversité avec l’Iran qui, au contraire, ne voit aucune utilité dans cet acharnement, vu le cours des évolutions régionales qui va en sa faveur. En outre, le rétablissement de la paix et de la stabilité au Moyen-Orient garantirait à l’Iran un rôle de superpuissance régionale.

Cela dit, l’Arabie saoudite ne peut être considérée comme un acteur décisif de la déstabilisation de la région. Avant d’être le centre de gravité du front anti-Iran au Moyen-Orient, elle avait une position oscillante entre l’Iran et le régime d’Israël, mais elle a aujourd’hui un penchant plus prononcé en faveur de ce dernier.

Cependant, étant donné sa vulnérabilité face à l’Iran sur la scène internationale et les fortes secousses au sein du royaume, Riyad est au plus bas, et il ne reste à Téhéran qu’à refouler son principal ennemi, Israël, dans les confins de l’isolement et de l’abattement.

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SOURCE: FRENCH PRESS TV